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Red Bull, Burn, Monster : donnent-ils des ailes ou des malaises ?
lundi, 21 janvier 2013
/ Karine Le Loët / Rédactrice en chef à « Terra eco ». |
Un petit coup de mou ? Et votre main se tend vers une boisson énergisante. Au mieux, vous n’aurez qu’un shot de caféine. Mais risquez bien pire si vous êtes en plein effort physique ou déjà bien imbibé d’alcool. Explications.
Mise à jour le 1er octobre 2013 : Le 1er octobre, l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail) a rendu son avis. Elle insiste sur les dangers que la consommation de caféine fait courir aux enfants et aux adolescents. Des apports en caféine trop élevés pouvant entraîner des troubles du sommeil chez ce public sensible et les prédisposer à développer ultérieurement des conduites addictives à d’autres substances psycho-actives. Les femmes enceintes, celles qui allaitent, ou alors les personnes présentant des pathologies cardio-vasculaires, psychiatriques et neurologiques ou encore une insuffisance rénale ou des maladies hépatiques sévères, doivent aussi éviter d’en consommer. A éviter aussi, et ce pour tous, l’absorption de ces boissons lors d’un exercice physique ou associées à de l’alcool. Enfin, l’Anses recommande également d’encadrer la promotion de ces boissons, dont les publicités sont très présentes lors de soirées ou de grands événements sportifs. |
Un Napoléon, la main sous le plastron, qui dégomme une canette et peut quitter l’île d’Elbe par les airs ; un accusé assoiffé, sauvé par la boisson. « Red Bull vous donne des ailes », disent-ils. Vraiment ? Peu de chance qu’une boisson énergisante – puisque c’est d’elle qu’il s’agit – vous aide à voler. Mais de l’excitation, du tonus, de la nervosité, pour sûr, vous en aurez. Dans une canette de Red Bull, Burn ou Monster Energy, vous trouverez généralement de la caféine, de la taurine, du D-glucuronolactone, du guarana parfois, du sucre toujours. Pour quels dangers ?
Suite au signalement de deux décès par crise cardiaque (13 cas de pathologies « probablement » ou « possiblement » liées à ces boissons ont été officiellement reconnues), l’Agence de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a lancé, en juin dernier, un appel aux professionnels de santé. Ceux-là sont appelés à transmettre tous les effets néfastes qu’ils auraient observés chez leurs patients après la consommation de ces produits. En attendant, elle ne souhaite pas s’exprimer sur la question.
Tentons d’y voir plus clair. Et reprenons la composition de notre canette. La taurine ? Un acide aminé présent dans les produits d’origine animale (viandes, poissons, fruits de mer, produits laitiers…). Le glucuronolactone ? Un composant produit par le foie lors de la dégradation des sucres. Le guarana ? Une plante à la forte teneur en caféine. « Ces produits ne sont pas forcément dangereux pris isolément, explique Frédéric Maton, président de la Société française de nutrition du sport (SFNS.) C’est l’association de ces substances aux propriétés excitantes qui peut l’être en modifiant le comportement du consommateur. »
Mais il n’y a pas que de la caféine dans une canette. Et les teneurs des autres molécules ne sont pas anodines. La taurine est par exemple présente à hauteur d’un gramme, soit l’équivalent de cinq jours de consommation via les aliments quotidiennement ingérés, souligne un avis de l’Anses publié en novembre 2006 (voir le PDF. « Est-ce qu’elle a des effets nocifs pour la santé ? Nous ne sommes pas sûrs à 100%. Ce qui est sûr, c’est que l’argument annoncé par les fabricants comme quoi elle aurait des propriétés anti-oxydantes n’est pas vrai à de telles doses », explique Frédéric Maton. Selon un avis de son institut publié en janvier, se shooter à forte dose à la taurine ne sert tout bonnement à rien : « Les apports alimentaires en taurine dans le cadre d’une alimentation diversifiée équilibrée, associés à sa fabrication endogène, suffisent à couvrir les besoins, même semble-t-il lors d’une pratique physique intense. » Idem pour le glucoronolactone consommé, dans une canette, à des quantités 500 fois plus importantes que l’apport naturel journalier : « Les doses importantes rencontrées dans certaines boissons énergisantes ne semblent présenter aucun intérêt ni justification nutritionnel. »
« La caféine des boissons énergisantes est un puissant diurétique, elle accélère la déshydratation. C’est un paradoxe que les sportifs en boivent ! Elle entraîne aussi une fuite minérale de phosphore, le potassium, le calcium. Chez le consommateur habituel, elle risque d’entraîner une carence en potassium et d’augmenter le risque cardiaque », ajoute le médecin. Le souci c’est que c’est justement dans ce cadre-ci que les industriels semblent encourager la consommation de ces liquides. C’est le cas de Red Bull qui joue franchement la carte du sport sur son site Internet : « Dans toutes les disciplines où les athlètes ont besoin d’aile, Red Bull répond présent : ski, snowboard, escalade, surf, moto, football ou encore Formule 1 (…) mais aide aussi les sportifs passionnés de tous les âges à établir leur propre record. »
Sauf que l’’industriel oublie un détail : si Red Bull il y a, c’est souvent plongé dans un verre d’alcool. Selon l’Anses, « 27% des consommateurs de moins de 35 ans associent, au moins de temps en temps, ces produits à l’alcool ». Or, « la caféine de ces boissons vient contrebalancer les effets de l’alcool, entre autres une certaine somnolence. On a alors l’impression qu’on tient mieux l’alcool, on consomme davantage et de façon plus fréquente. Et ça conduit à des prises de risque », souligne Philippe Arvers. Dans une étude menée en 2012 sur des universitaires grenoblois, le médecin a mis en évidence une plus grosse occurrence d’accidents, de bagarres et de rapports sexuels non protégés chez les jeunes ayant consommé le joli cocktail.
Faut-il bannir ces boissons ? Non, pour la Société française de nutrition du sport (SFNS.) qui plaide pour « une consommation éclairée ». « Il faut qu’un sportif sache qu’il risque un trouble du rythme cardiaque comme un fumeur sait qu’il risque un cancer. Après il décidera de prendre ce risque ou pas. »