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La balle de tennis
jeudi, 28 mai 2009
/ Louise Allavoine
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/ Simon Astié
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Sur le court central de Roland-Garros, la sphère jaune file comme l’éclair. Mais il faudra 2 500 ans pour que Dame Nature digère son caoutchouc.
Depuis le lancement de l’opération balle jaune, « 13 projets ont vu le jour et ont permis la réalisation de plus de 1 800 m2 de tapis sportifs » destinés à des hôpitaux pour enfants ou à des instituts pour jeunes handicapés, souligne la Fédération française de tennis dans un communiqué. La FFT se veut optimiste mais la surface reste petite au regard des 2,7 millions de balles collectées depuis 2009 (soit 900 000 en moyenne sur 14 millions de balles consommées annuellement). La FFT ne baisse pas les bras. En 2012, elle compte collecter 1 100 000 balles jaunes auprès des ligues participantes. Reste que le recyclage des balles n’est pas aisé et peu rentable écologiquement. Voilà ce que nous écrivions en 2009 au moment du lancement de l’opération balle jaune. |
Rafael Nadal aime la planète. La preuve ? Il s’échine à expédier ses matchs, utilisant ainsi un minimum de balles. Lors de la finale de Roland-Garros en 2008, 22 jeux ont été disputés, nécessitant seulement deux changements de balles. Un vrai geste écolo quand on sait que Mère Nature digère mal le caoutchouc. Celui utilisé pour fabriquer les balles de tennis peut persister dans l’environnement jusqu’à 2 500 ans. Joueurs du dimanche, vous avez bien lu : il faut 25 siècles pour venir à bout de chaque petite sphère de 53 grammes égarée dans le jardin du voisin ! Les balles de compétition, elles, se réutilisent en entraînement, puis pour les initiations dans les écoles de tennis. Et après un à deux ans d’une existence frappée, elles finissent leur vie à l’incinérateur.
Ce destin est partagé par les 14 millions de balles vendues chaque année en France. « Cette consommation effrénée sans que rien ne soit mis en place pour un éventuel recyclage » vaut au tennis d’avoir été classé, en 2007, cinquième sport le plus polluant par le magazine Sport et Vie. [1]
Premier set : le transport. « Une société de valorisation des déchets, Coved, a accepté d’assurer la logistique du recyclage des balles usagées gratuitement », se félicite Gaël Bonnaire, responsable Equipement, et cerveau de l’Opération balle jaune.
Deuxième set : le broyage en granulats. Recam, un recycleur de pneus, produit les granulats dans son usine de Nouan-le-Fuzelier, près d’Orléans, à l’œil également. « Broyer les 40 000 balles d’une ligue représente à peine une demi-journée de production », détaille Gaël Bonnaire. Pas grand-chose donc au vu du bénéfice médiatique que rapporte ce petit service.
Troisième set : la transformation. Direction Amiens cette fois, où EnviroSport modèlera les sols sportifs à partir des granulats. Fin mai, juste avant le début de Roland-Garros, la FFT devait ainsi remettre sa première livraison au centre de rééducation d’enfants handicapés à Voisenon, en Seine-et-Marne. Dans ce département, la ligue a récolté, la saison dernière, 51 000 balles qui ont été utilisées pour la réalisation d’un revêtement de 112 m2. Soit la surface d’un demi-terrain de tennis environ : un maigre résultat. « L’Opération balle jaune a une rentabilité écologique difficile à justifier, notamment à cause du transport », avoue Arnaud Louveau, de Labosport. Pour que son bilan CO2 passe au vert, il faudrait, selon lui, récupérer environ une balle sur quatre mise sur le marché français. « Mais même si l’on est loin du compte, ce projet est un gage de bonne volonté de la part de la Fédération. Et question caoutchouc, les balles de tennis ont un impact négligeable comparé aux pneus », relativise-t-il.
C’est dans l’usine de Pattaya que les différents éléments de la balle sont formés et assemblés. La matière première est découpée et disposée dans des presses pour concevoir des demi-coques. Mais qui dit découpe, dit chutes. « Il n’y a que 2 % de rebuts. Nous réfléchissons cependant à la manière dont nous pourrions les réutiliser », indique Laurent Blary. Une fois les demi-sphères moulées reste à les réunir. Avec de la colle chimique ? « Secret industriel », brandit-il encore.
Mais question feutre, « monsieur Secret industriel » se montre plus prolixe. On apprend qu’il s’agit d’un mélange de fibres « naturelles » de coton et de laine, « donc de meilleure qualité », produit par des manufacturiers anglais et américain, et appliqué sur les balles à la main par les employés locaux. « C’est un travail minutieux et difficile pour lequel on ne trouverait pas de main-d’œuvre en Europe, justifie Laurent Blary. Et notre personnel bénéficie ici des meilleurs niveaux de salaires. »
Voyage sur les océans
A Pattaya, les 360 employés de l’usine fabriquent 30 millions de balles par an. Trop volumineux pour prendre l’avion à des coûts raisonnables, le produit vogue vers les marchés européen et japonais de Major Sports par bateaux. Il sera vendu sous la marque Tecnifibre, qui représente « un peu moins de 20 % » du marché de l’Hexagone, le troisième derrière celui des Etats-Unis et du Japon. Il y a trois ans, avant que la FFT remette en jeu la licence, Major Sports réalisait encore les prestigieuses balles griffées Roland-Garros. L’an dernier, c’est avec des produits Dunlop que Rafael Nadal a renversé le roi Federer.
Le programme environnemental de la Fédération française de tennis
La fabrication des balles Tecnifibre à l’usine de Pattaya en vidéo
Le tri, mode d’emploi, par Eco-emballages
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