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Critique n°3 : « Elles ne sont pas adaptées au bio, les semences actuelles ! »
lundi, 26 novembre 2012 / Cécile Cazenave

L’association AgroBio sauve les anciennes variétés paysannes en continuant à les cultiver et en les adaptant aux nouvelles conditions climatiques.

Deux générations de paysans. Cela a suffi pour oublier comment produire ses propres semences de maïs. Exemple dans le Sud-Ouest, où de nombreuses variétés traditionnelles ont été remplacées, en cinquante ans, par des semences issues de la recherche et de l’industrie. Résistantes et à hauts rendements. Mais à racheter chaque année. Et mal adaptées à l’agriculture bio qui limite, voire exclut les engrais, pesticides, herbicides… La perte a failli être définitive. Jusqu’à ce qu’une poignée d’agriculteurs bios ne décide de sauver les dernières variétés paysannes encore sur pied dans le coin. « Le bouche à oreille a fonctionné : nous sommes allés les chercher dans les exploitations qui continuaient à faire le maïs de leurs grands-parents, mais aussi en Italie et au Portugal », explique Jennifer Kendall, animatrice d’AgroBio Périgord.

En dix ans, cette asso est devenue une plateforme expérimentale et l’une des premières maisons de la semence en France. Car une fois la centaine de variétés de maïs récupérées, il était essentiel de développer et de diffuser le savoir-faire nécessaire pour les maintenir en vie. « Les cultiver, c’est leur permettre de s’adapter à de nouvelles conditions climatiques, par exemple, et servir ainsi, à l’avenir, de ressources agronomiques », insiste Jennifer Kendall. C’est au Brésil, en 2004, que les apprentis vont chercher des modèles d’organisation participative pour reproduire, stocker, transmettre les techniques. Chaque agriculteur partenaire devient expérimentateur : il reçoit un échantillon de semences et doit en rendre le triple, qui sera à nouveau redistribué. Aujourd’hui, plus de soixante organisations participent au réseau Semences paysannes, qui fait entendre sa voix à l’échelle nationale. Côté maïs, plus de 300 agriculteurs du Grand Ouest participent au programme de sauvegarde lancé par AgroBio Périgord. Contre toute attente, plus d’un tiers sont des agriculteurs conventionnels qui ont poussé la porte par souci de ne plus dépendre de l’industrie semencière. « Au début, ça nous faisait bizarre, mais les semences sont libres, elles appartiennent à tout le monde, explique Jennifer Kendall. Et puis, pour ceux-là, c’est peut-être la porte d’entrée vers le bio ! » —