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Vaccins à l’aluminium, le sel de la discorde
vendredi, 16 novembre 2012 / Alexandra Bogaert

Les scientifiques ne parviennent pas à se mettre d’accord sur la dangerosité ou non des vaccins avec de l’aluminium. Pourtant, des personnes ont développé une maladie douloureuse et handicapante après avoir été vaccinées.

« C’est comme si j’avais été battue, rouée de coups, laissée pour morte. » Suzette Fernandes-Pires, 52 ans, a vécu un enfer qui a « détruit » sa vie. Suzette est atteinte d’une maladie au nom aussi barbare que les douleurs qu’elle fait endurer à ceux qui la contractent : la myofasciite à macrophages. Cette inflammation grave des muscles qui se traduit par un épuisement chronique, des douleurs musculaires et articulaires très fortes et des troubles de la mémoire, serait la conséquence de l’hydroxyde d’aluminium présent, comme adjuvant, dans un certain nombre de vaccins (60% de ceux présents sur le marché en contiennent).

Suzette avait 36 ans en 1996 quand elle a répondu à la grande campagne de vaccination nationale. Rappels de DT Polyo, hépatite A et B, elle a tout refait. « Deux mois après, je suis tombée malade. J’avais de fortes douleurs aux membres et une grande fatigue, jusqu’à une crise en 1997. » Paralysée par la souffrance, cette infirmière vétérinaire à Maisons-Alfort erre de médecin en médecin. Jusqu’à ce que, enfin, le diagnostic tombe. C’était en 2000.

Un adjuvant qui se digère mal et peut rendre malade

Son organisme a de grandes difficultés à digérer les particules d’hydroxyde d’aluminium contenues dans les vaccins qu’on lui a injectés dans les muscles, particules qui sont captées par les macrophages. Ces grosses cellules qui jouent le rôle d’éboueurs de l’organisme ont pour propriétés de pouvoir circuler partout dans le corps et d’englober les particules avant de les détruire. Sauf que, dans le cas précis de l’hydroxyde d’aluminium, le macrophage est rendu immortel tant qu’il n’a pas réussi à éliminer la particule.

Ainsi squattés, les macrophages se baladent dans l’organisme pendant des mois après l’injection, voire pendant des années. « Quand ils finissent par pénétrer dans le cerveau, où ils s’accumulent progressivement, ils provoquent des perturbations suffisantes pour induire un syndrome de fatigue chronique », expose le professeur Romain Gherardi, de l’hôpital Henri Mondor de Créteil.

Avec son équipe de l’Inserm (l’Institut national de la santé et de la recherche médicale), ce spécialiste des maladies neuromusculaires est celui qui a identifié, dans les années 1990, cette nouvelle pathologie qui affecte une personne sur 10 000. « Il n’y a plus aucun doute sur la relation directe entre l’hydroxyde et les lésions musculaires et cérébrales », avance Romain Gherardi qui fait l’hypothèse que la myofasciite à macrophages touche des personnes génétiquement prédisposées pour mal digérer les sels d’aluminium.

Des conflits d’intérêts bloquent-ils les financements ?

C’est notamment cette hypothèse qu’il devait vérifier à travers des recherches cliniques et expérimentales. Mais il a appris le mois dernier que l’Agence nationale de sécurité du médicament refuse de les financer. Alors que tout semblait très bien parti... Selon lui, « le corps d’experts qui a statué sur le financement des recherches est composé de personnes qui ont ou ont eu des responsabilités dans des agences de santé et qui ont mené des partenariats avec des laboratoires afin de développer des vaccins ». Bref, il se trouverait confronté à des pontes en plein conflits d’intérêts.

Mais pour d’autres chercheurs, la raison est tout autre : ils estiment que la toxicité des sels d’aluminium comme adjuvants n’a pas été suffisamment démontrée. Dans le doute, un groupe d’études sur la vaccination, composé de parlementaires, a réclamé, en mars dernier, un « moratoire sur l’alumine, utilisé comme adjuvant dans un certain nombre de vaccins, […] en attendant de recueillir davantage de données scientifiques sur ses conséquences éventuelles, en particulier dans les cas de vaccinations d’enfants en bas âge et de vaccinations répétées ». Une position à rebours de celle de l’Académie de médecine qui, en 2010, a même dénoncé le fait « que certains chercheurs cèdent à la tentation de faire passer la vulgarisation avant toute publication dans des revues scientifiques [provoquant] la peur injustifiée des vaccins », qui aurait un retentissement rapide sur la couverture vaccinale d’une population.

On se fait vacciner sans se poser de questions. On a tort ?

Faux !, dit Virginie Belle, journaliste et auteure de Faut-il faire vacciner son enfant ? (Editions Max Milo). « Les taux de couverture vaccinale en France sont excellents, expose-t-elle. On fait vacciner son enfant car c’est devenu naturel, sans vraiment avoir d’informations sur les bénéfices et les risques de ces vaccins. » De l’enquête qu’elle a menée, elle retient « le vrai besoin de transparence » qui pourrait aider des parents à se décider en toute conscience avant de faire vacciner leur enfant. Et ce d’autant que « seuls 1% à 10% des effets indésirables graves sont notifiés aux agences de santé, une sous notification connue mais jamais corrigée », explique-t-elle. Comme si « on préférait taire un problème pour sauver la couverture vaccinale ! »

Pour le cardiologue et député Gérard Bapt, membre du groupe d’études parlementaire, « il y a des vaccinations nécessaires et utiles ». « A mon sens, cependant, il faudrait donner le choix pour les vaccins dits obligatoires de se faire vacciner ou pas. Il faut aussi bien sûr poursuivre les études de manière indépendante et, concernant les vaccins de libre choix - grippe, papillomavirus -, il faudrait interdire aux laboratoires pharmaceutiques de faire eux-mêmes la publicité pour leurs produits. »

D’autres adjuvants inoffensifs existent

Suzette, qui est vice-présidente de l’association Entraide aux malades de myofasciite à macrophages, a combattu la douleur à coups de doses intensives de cortisone. « Aujourd’hui je ne souffre plus – ce qui n’est pas le cas de la majorité des 300 adhérents de notre association – mais je reste très fatiguée », explique-t-elle. Elle a dû arrêter de travailler quelques années, mais a repris ponctuellement une activité professionnelle. « Pour des raisons financières et aussi parce que c’est une maladie qui isole beaucoup. Elle ne se voit pas mais elle nous éloigne de nos amis, de notre famille », poursuit-elle.

Elle a refait un vaccin en 2004, un rappel de la DT Polyo. « Mais à la place de l’hydroxyde d’aluminium, l’adjuvant était du phosphate de calcium », précise-t-elle. Cet adjuvant est « totalement physiologique car c’est de ça que sont constitués nos os », explique Romain Gherardi. Il plaide pour que les scientifiques mettent au point une nouvelle génération d’adjuvants, permettant une réponse immunitaire plus forte aux vaccins, et qui disparaîtraient totalement de l’organisme en quelques semaines seulement. D’après le nombre de publications sur le sujet, la recherche en ce sens est très active. Les laboratoires se réveillent.


Une couverture un peu trop courte

Les objectifs de couverture vaccinale fixés par la loi de santé publique sont d’au moins 95 % pour toutes les vaccinations, et de 75 % pour la grippe. Selon le dernier rapport de l’Institut de veille sanitaire, publié en novembre 2012, ils ne sont pas atteints. Trop peu de personnes se sont fait vacciner contre la grippe saisonnière, les papillomavirus humains ou encore la rougeole-rubéole-oreillons. En revanche, les taux de vaccination sont atteints pour la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et la coqueluche. —