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Porter un casque à vélo est-il vraiment utile ?
mardi, 23 octobre 2012 / Thibaut Schepman /

Non, nous n’avons pas à « sauver la planète ». Elle s’en sort très bien toute seule. C’est nous qui avons besoin d’elle pour nous en sortir.

Indispensable pour les uns, dangereux pour les autres, le casque à vélo divise les fans de la pédale. « Terra eco » tente de faire le point. En selle !

Voilà le genre de débat à ne surtout pas lancer entre la poire et le fromage, au risque de foutre en l’air votre déjeuner dominical. Comme les geeks se divisent sur le Mac et le PC, comme les fans de foot s’écharpent entre le PSG et l’OM, les amoureux de la pédale, eux, se déchirent sur le port du casque à vélo.

Petit exemple, avec la dernière étude en date. Menée par l’Association médicale canadienne, elle montre que la plupart des cyclistes décédés d’une blessure à la tête dans l’Etat de l’Ontario entre 2006 et 2010 ne portaient pas de casque. Conclusion des auteurs : les cyclistes qui en portaient un s’en sont plus souvent sortis vivants. Tous les amateurs de vélos feraient donc bien de filer s’acheter un casque !

Le casque est-il dangereux ?

Dans les forums des articles qui ont relayé cette étude, le peloton des opposants au casque s’étranglent. Ils y rappellent la foultitude d’études précédentes qui disent tout bonnement l’inverse.


- L’une, menée en Australie en 2011 – où le casque est obligatoire – révélait au contraire que 80% des cyclistes blessés gravement ou décédés portaient un casque pendant l’accident. Ce qui voudrait dire que cette protection n’est pas totalement efficace.


- Une expérience, menée en 2005 en Grande-Bretagne, montrait même que les automobilistes frôlent plus volontiers les cyclistes équipés de casques que ceux qui n’en ont pas. Ce qui pourrait rendre les collisions plus fréquentes quand on porte une protection !

Trop de casque tue le casque

Et dans l’Hexagone ? Le débat fait rage ici aussi. Emmanuelle Amoros, chercheuse à l’Institut français des sciences et technologies des transports, de l’aménagement et des réseaux (Ifsttar), a publié en 2011 une étude sur les plus de 8 000 accidents à vélo dans le Rhône. Elle en a conclu que porter un casque diminue de 30% le risque de blessures à la tête, et même de 70% le risque de blessure grave à la tête. « Il n’y a donc rien d’aberrant à vouloir protéger la tête », estime-t-elle.

Sortie de route pour les 86% des cyclistes français qui roulent sans casque ? Dominique Lebrun, coordinateur interministériel pour le développement du vélo en France, mord dans le guidon et vole à leur secours. L’homme reconnaît volontiers ne pas porter de casque quand il roule à vélo : « L’usage du casque est recommandé, mais personnellement je ne ressens pas le besoin d’en porter un et je trouve cela contraignant. » Quant à l’idée de rendre le casque obligatoire, comme ce fut envisagé en France en 2008 : « Cela découragerait de nombreux utilisateurs, notamment ceux qui utilisent les vélos en libre service, ce qui aurait des conséquences sanitaires et environnementales très néfastes. L’intérêt du casque n’est pas suffisant pour compenser ces inconvénients. »

Et moi, qu’est-ce que je fais ?

Pour résumer, le casque vous protégera en cas de choc à la tête. Mais si vous prenez la voiture plutôt que le vélo pour éviter de vous balader avec un casque à la main toute la journée, votre santé en prendra un coup à long terme. Geneviève Laferrère, présidente de la Fédération des usagers de la bicyclette, va encore plus loin. Elle assume elle aussi, et sans complexe, faire le choix de ne pas porter de casque en ville et ne pas en faire porter à ses enfants. « La plupart des accidents graves de vélo ont lieu en campagne et non en ville. Ensuite, il est très rare de chuter sur la tête. On risque plutôt de se casser la clavicule si l’on chute (seules 11% des lésions graves concernent la tête, selon l’étude de l’Ifsttar, ndlr). Si on voulait être logique il faudrait porter une armure et pas seulement un casque », ironise-t-elle.

Voilà qui vous fait de belles jantes... Pour ne pas rester à court d’idées, la militante du cycle défend d’autres priorités pour réduire le nombre d’accidents. Pour elle, il faudrait limiter la vitesse des voitures, et lutter contre les vols des vélos, « qui poussent les gens à rouler sur des épaves ». La chercheuse Emmanuelle Amoros préfère garder le secret et ne pas révéler publiquement si elle porte ou non un casque quand elle grimpe sur son biclou. Mais elle indique se doter d’une autre protection, en portant des vêtements de couleurs vives le jour et une tunique réfléchissante la nuit. Selon une étude australienne, cela permettrait de réduire de 77% le nombre d’accidents corporels graves en améliorant « la conspicuité » - le fait d’être bien visible -des cyclistes par les voitures. Une idée qui, contrairement au casque, ne prend pas de place dans le sac à dos. Voilà qui pourrait sauver votre prochain déjeuner de famille. Merci qui ?

Et vous, casque ou pas casque ? Comment vous protégez-vous à vélo ? Dites-le nous dans les commentaires au bas de cet article.



Selon la Sécurité routière, 141 cyclistes sont décédés en 2011 (contre 273 en 2000). 59 ont été tués en milieu urbain et 88 en rase campagne. Dans 44,9% des cas, il s’agissait d’une collision avec un véhicule léger, dans 18,4% d’une collision avec un poids lourd ou un transport en commun et dans 8,84% par un véhicule utilitaire.