https://www.terraeco.net/spip.php?article46294
|
L’accaparement des terres affame à tout bout de champs
vendredi, 5 octobre 2012
/ Novethic / Le média expert du développement durable |
Le nombre de transactions foncières agricoles explosent, surtout dans les pays où l’on a faim. L’ONG Oxfam interpelle la Banque mondiale pour lui demander de freiner le marché de la terre.
Alors même que les prix alimentaires flambent pour la troisième fois en quatre ans, Oxfam publie un rapport sur la croissance de l’accaparement des terres dans les pays en développement par des investisseurs étrangers. Elle demande à la Banque mondiale, en tant qu’investisseur foncier et conseiller auprès des pays en développement, un gel temporaire de ces acquisitions dont les produits sont destinés à l’exportation ou à des cultures non alimentaires.
A ce titre, non seulement ces investissements massifs privent la population de ressources alimentaires, mais ils peuvent engendrer aussi l’expropriation, parfois violente, des producteurs locaux, qui perdent ainsi les moyens de subvenir à leurs besoins. Au Liberia par exemple, 30% du territoire national a fait l’objet de transactions foncières en seulement cinq ans. Or, prévient Oxfam, actuellement les prix alimentaires flambent pour la troisième fois en quatre ans et « les terres risquent de susciter un intérêt encore plus vif si les pays riches tentent de protéger leurs sources d’approvisionnement en produits alimentaires et si les investisseurs voient la terre comme un bon pari à long terme ». Ainsi la surface consacrée à la production d’huile de palme a-t-elle été multipliée quasiment par huit au cours des 20 dernières années. Elle atteint, selon les estimations, 7,8 millions d’hectares en 2010 et il est prévu qu’elle doublera d’ici à 2020. D’autres utilisations économiques telles que la séquestration du carbone, la production d’agrocarburants, de bois de construction et d’autres cultures non alimentaires sont appelées à se développer. Autant d’utilisations qui « entreront en conflit direct avec le besoin de terres supplémentaires pour nourrir une population mondiale croissante », constate Oxfam.
Oxfam espère voir des avancées à la prochaine assemblée annuelle de la Banque mondiale, qui se déroulera à Tokyo du 12 au 14 octobre, et l’enjoint à « envoyer aux investisseurs du monde entier un signal fort » pour « mettre fin à l’accaparement des terres et améliorer les normes » notamment en matière de transparence. Déjà en 2010, Grain avait soulevé le manque d’informations de ces investissements. « Quelle est la proportion des investissements privés ou publics ? Quels sont leurs objectifs ? Il s’avère en fin de compte que des entreprises refusent de communiquer des informations sur leurs investissements dans des terres agricoles, tout comme des gouvernements qui fournissent les terres », expliquait l’ONG. Dans une étude publiée le 31 août dernier, Grain souligne que « la plupart des gouvernements veulent conclure ces contrats, ils les signent, et ils répriment souvent les communautés qui se soulèvent et s’opposent aux expulsions (…) Dans quelques pays seulement, il existe des députés, des tribunaux, des fonctionnaires et des partis politiques qui essaient de fixer des limites élémentaires aux acquisitions de terres agricoles face à l’intérêt croissant des investisseurs étrangers ».
Cet article de Véronique Smée a initialement été publié le 4 octobre 2012 sur Novethic, le média expert du développement durable.
JPEG - 1.8 ko 150 x 43 pixels |