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A quoi servent les retraités ?
jeudi, 7 juin 2012 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

Les têtes grises, ça coûte cher. Surtout s’ils s’en vont buller au soleil dès 60 ans, s’agace-t-on. Mais ne nous y trompons pas. Les retraités font leur part du boulot, contribuant à l’économie et à construire une société durable.

L’âge de la retraite est un sujet des plus délicats. Si le gouvernement soutient un départ à 60 ans pour les travailleurs ayant commencé à 18 ou 19 ans, d’autres crient à la folie financière. Valérie Pécresse, l’ancienne ministre du Budget, a ainsi affirmé que la mesure coûterait « des centaines d’euros à des millions de Français » tandis que le Medef (Mouvement des entreprises de France) a condamné une « mesure inquiétante pour la pérennité financière des régimes de retraite et la compétitivité des entreprises ».

Car les retraités coûtent cher. En avril 2010, le Conseil d’orientation des retraites avait laissé entrevoir le déficit abyssal à prévoir. Si rien n’était fait, disait-il alors, il faudrait trouver 56 milliards d’euros en 2030 pour alimenter les retraites et 71,6 milliards en 2050.

A intervalles réguliers, on peste ainsi contre la charge que représentent les retraités. Et on oublie que l’heure du grand départ venue, nos têtes grises ne passent pas leur journée à buller, cocktail à la main, les orteils dans le pédiluve. Mieux, à leur manière, ils contribuent largement à l’économie et à la société. A quoi servent-ils ? Quelques exemples :

- A faire du bénévolat

Comme chaque année cet hiver, on a vu : les camions des Restos du cœur, les cloches de l’Armée du Salut, la Banque alimentaire au bout de nos caisses de supermarché... Voilà bientôt l’été. Il va falloir occuper les enfants des quartiers, s’affairer dans les jardins ouvriers, défendre le thon rouge en Méditerranée. Pour les associations, pas de répit. Dans leurs rangs non plus. Là, s’agitent des soldats souvent recrutés aux portes de l’emploi. Selon une enquête Ifop réalisée pour le compte de France Bénévolat en août 2010, 51% des plus de 65 ans étaient engagés dans une forme ou une autre de bénévolat. C’est plus que le taux de la moyenne des Français : 36%.

- A voter... et à être élu

Quand les uns boudent les urnes, prétextant un voyage calé depuis des lustres ou l’urgence d’une lessive, les autres se font un devoir de voter. En 1995, les sexagénaires étaient 95% à être inscrits sur les listes électorales. Résultat de leur assiduité : alors qu’ils représentent 20% de la population, ils pèsent plus d’un quart du corps électoral. Et ils ne se contentent pas de s’inscrire, ils se déplacent pour voter ! En 2004, à en croire l’Insee, 69% des 60-69 ans s’étaient rendus aux bureaux de vote (contre 57,1% pour l’ensemble de la population). Ne s’arrêtant pas là, ils veulent aussi saisir les rênes du pouvoir. Nombreux sont les retraités qui arborent l’écharpe tricolore. Au lendemain des municipales de 2008, les plus de 60 ans représentaient près de 40% des vainqueurs et les retraités 32%.

- A garder les petits

Si la fibre politique ne lui dit rien ou que la vie de militant n’est pas sa tasse de thé, le senior peut toujours aller lire des histoires à ses petits-enfants. A l’heure où les familles peinent à faire garder leurs mômes, les grands-parents font souvent figures de solution. A en croire un rapport du Conseil économique et social paru en 2009, 85% des grands-mères et 75% des grands-pères jouent les nounous de dépanne ou occupent les petits pendant les vacances. D’autres s’y collent plus régulièrement : 38% des femmes et 26% des hommes assurent une garde hebdomadaire.

- A soutenir les plus grands

Il est loin le temps où le fils devenu cadre versait une pension à ses parents restés au village, vivotant de leur maigre retraite. Aujourd’hui, le monde a inversé sa course. Les plus jeunes s’en sortent souvent plus mal que leurs aînés... qui n’hésitent pas à leur donner un petit coup de pouce. En fait, cette réalité – qui s’accélère - ne date pas vraiment d’hier. Déjà en 1996, les plus de 60 ans versaient 20 milliards de francs (3,85 milliards d’euros) annuellement aux 40-60 ans et 30 milliards (5,76 milliards d’euros) au moins de 40 ans, pointait l’Insee. A cette époque, un ménage sexagénaire consacrait environ 6% de son revenu à ses descendants, un octogénaire, 12%.

- A partir en vacances

S’ils refusent de militer ou de garder la marmaille en pension, les retraités peuvent encore voyager. Et ils sont nombreux à le faire. Les agences de voyage, les hôtels, les organisateurs s’en frottent déjà les mains. Selon les prévisions du cabinet Xerfi, le tourisme pour les plus de 55 ans représentera 40% du marché total à l’horizon 2012. Evidemment, les plus de 55 ans ne sont pas tous retraités. Mais une fois passé le seuil de la retraite, les Français partent en moyenne 10% de plus qu’avant.

Mise à jour d’un article publié en avril 2010 à l’occasion de la publication du rapport du Conseil d’orientation des retraites.