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Ma supérette bio a neuf milliards de clients
jeudi, 19 avril 2012
/ Arnaud Gonzague
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L’agriculture biologique pour nourrir l’humanité, de Jacques Caplat, Actes sud, 480 p., 24 euros.
La planète sera peuplée de quelque 9 milliards d’habitants en 2050. Comment les nourrir tous ? Premier mouvement, le plus évident : exporter partout dans le monde les méthodes intensives de l’agriculture occidentale. Après tout, en une poignée de décennies, elles ont sorti le Vieux Continent de la faim qui la hantait depuis le Moyen Age. Ce serait donc formidable que l’Afrique et l’Amérique latine en bénéficient aussi. Mais vous connaissez ces casse-pieds d’écolos : il est bien rare que le premier mouvement trouve grâce à leurs yeux. Car que voient-ils dans l’agriculture dite « conventionnelle » ? La surmécanisation, les engrais chimiques, les tombereaux de pesticides déversés – qu’un tour de passe-passe sémantique nomme « produits phytosanitaires » – et tout ce qui s’ensuit : appauvrissement de la diversité agricole, destruction du sol, augmentation de l’érosion, pollution des nappes phréatiques. Sans parler du bilan carbone !
« Baignoire percée »
Car le bio – ou plutôt « la » bio, comme le souligne l’auteur, en recentrant le vocabulaire sur l’agriculture – ne se contente pas de faire l’impasse sur les boosteurs chimiques : c’est une pratique globale qui respecte les cycles naturels, pense le rapport entre la plante et son sol, entre le sol et le climat, etc. Au contraire, insiste Caplat, l’agriculture conventionnelle s’apparente au « remplissage d’une baignoire percée » : on peut augmenter, encore et encore, le débit du robinet, mais cette démarche n’a pas d’avenir. Voilà pourquoi, selon l’auteur, on n’exportera jamais notre modèle agricole tel quel, et pourquoi, même chez nous, il est amené à disparaître. On aimerait le croire. Mais depuis un siècle, tant de livres sont parus pour démontrer, rationnellement, que le système actuel vivait, lui aussi, ses dernières années qu’on est forcément un peu réservé. Disons au moins qu’on sait où doit se mener le vrai combat. —