Nicolas Sarkozy se félicite de l’augmentation de la taille du gâteau sans tenir compte de la hausse du nombre de convives. Déchiffrage par Captain’ Economics.

Au micro de BFM et d’Europe 1, comme d’ailleurs sur le plateau de Capital dimanche dernier, Nicolas Sarkozy a affirmé que « la France est le seul pays d’Europe où, en moyenne, le pouvoir d’achat a augmenté de 1,4% tous les ans pendant la crise. Et ces chiffres sont vérifiables ». Se présentant comme le Président du pouvoir d’achat, voilà un argument de campagne implacable ! Enfin implacable, à condition de savoir ce qu’est le pouvoir d’achat et d’utiliser le bon indicateur....

Alors qu’en est-il en réalité ? Si l’on regarde les chiffres de l’Insee, il y a en effet une variable qui a augmenté en moyenne de 1,4% par an depuis 2007, c’est le Pouvoir d’achat du revenu disponible brut (RDB). Une hausse de 3% en 2007, puis 0,4% en 2008, 1,3% en 2009 et 0,8% en 2010 ; le compte est bon (petite flèche verte dans le tableau ci-dessous).

Le compte est moyennement bon en fait… En effet, le pouvoir achat du RDB représente l’évolution du revenu disponible brut (première ligne du tableau ci-dessous), déflatée de l’inflation ( traduction = en prenant en compte la hausse des prix). Sauf que la ligne pouvoir d’achat du RDB prend simplement en compte l’évolution de la somme des revenus disponibles bruts de tous les Français, mais sans considérer l’évolution de la population. Il peut donc très bien y avoir une évolution positive du pouvoir d’achat du RDB, et évolution négative du pouvoir d’achat du RDB par personne, si la population a augmenté. Et c’est exactement ce qu’il s’est passé en France.

Le Captain’ se permet de reprendre une citation d’un article paru dans Libération sur ce sujet « Nicolas Sarkozy se félicite de l’augmentation de la taille du gâteau sans tenir compte de l’augmentation des convives ». En effet, si l’on prend en compte cette augmentation du nombre de convives, ce n’est plus vraiment la même histoire (troisième ligne du tableau, flèche orange). Le pouvoir d’achat par personne (il est aussi possible de voir le pouvoir d’achat par unité de consommation, il n’y a pas de grande différence) a augmenté en moyenne d’environ 0,7% par an. Si l’on ajoute 2011, dont les données ne sont pas encore disponibles pour le dernier trimestre, l’évolution sur le quinquennat devrait être de l’ordre de 3% à 3,5% (en cing ans). On est donc bien loin du 1,4% par an annoncé !

Une tendance à la diminution de la taille des ménages

Pourquoi le pouvoir d’achat par personne est supérieur au pouvoir d’achat par ménage ? Car il y a une tendance en France à la diminution de la taille des ménages (augmentation du nombre de divorces, mariages plus tardifs qu’auparavant...) et le pouvoir d’achat d’un couple (= un ménage) gagnant 4 000 euros à 2 est bien supérieur au pouvoir d’achat après divorce de chacun (= 2 personnes) avec un salaire de 2 000 euros.

Maintenant, comparons la situation française, afin de voir si en effet l’Hexagone est le seul pays en Europe a avoir vu une augmentation de son pouvoir d’achat durant la crise. Pour cela, le Captain’ a extrait de la base de donnée de la Commission européenne un indicateur de pouvoir d’achat, qui permet une comparaison internationale. On retombe à peu près sur nos pieds en ce qui concerne la France avec les données de la Commission européenne (croissance du pouvoir d’achat de 3% entre 2007 et 2011). Mais, ô surprise, la France n’est absolument pas le seul pays en Europe a avoir eu une évolution positive du pouvoir d’achat.

Conclusion : Après Marine Le Pen qui ne sait pas faire une pondération de dette, Nicolas Sarkozy a séché ses cours d’économie en ne prenant pas en compte l’évolution démographique dans le calcul de l’évolution du pouvoir d’achat. Allez la doublette de François (Hollande / Bayrou), à votre tour maintenant de sortir une belle connerie. Le Captain’ compte sur vous pour buzzer de nouveau la semaine prochaine.

Cet article a été initialement publié le 23 mars 2012 sur le blog de Captain’ Economics.