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Pas bête, la blette
jeudi, 22 mars 2012 / Miss Bouffe

La blette se nomme tout autant bette et vient de Babylone. C’est sa lettre de noblesse. Que lui arriva-t-il, à cette plante potagère, pour qu’on l’appelât, un jour, légume du pauvre ? C’est qu’elle pousse, dès le printemps, sur toutes plates-bandes, même les plus vilaines. Sans tracas au jardin, l’amateur de potage la cultivait en masse. Surtout au Moyen Âge. Cette herbe à pot figurait au firmament des tambouilles : « Bettes semez en mars ; et, quand elles sont bonnes à mengier, soient coupées près de la racine, car tousjours rejettent et recroissent et deviennent porées », dit le traité – de morale et d’économie domestique – Ménagier (XIVe siècle). Son compère poireau la côtoyait en potage, jadis « porée ». Si bien qu’on la nomma aussi « poirée ». Puis, la fortune tourna. Quand sa parente betterave connut prospérité, la blette souffrit de désamour.

La betterave n’est pourtant qu’une blette rave, racine de celle-ci. Et pourtant son sucre eut du succès, dès le XIXe siècle, quand la blette pâlissait. Mais celle-ci a de la ressource. Feuilles, dites vert, et côtes, dites cardes, la composent, soit deux repas en une botte. Deux familles fréquentent aujourd’hui les étals, la Blonde à carde verte et la Verte à carde blanche. Ne les confondons point avec le cardon, cousin de l’artichaut. La Verte est de Nice. La Blonde vient de Lyon. Les cardes amères finiront en gratin, quand le vert délicat fourrera des chaussons. Alors, elle est pas belle, ma blette ? —