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Eh bien, troquez maintenant
mardi, 28 février 2012
/ Antonin Léonard / De la voiture partagée au booksurfing, Antonin observe et dissèque les nouveaux modèles de consommation de l’ère numérique. Il anime le blog de la consommation collaborative. , / Edwin Mootoosamy /Passionné par les nouveaux usages d’Internet, Edwin Mootoosamy s’intéresse aux mutations socio-économiques en général et à l’économie collaborative en particulier. Il a toujours été intrigué par les modèles culturels différents qui nous font prendre du recul par rapport à nos choix quotidiens. |
Internet rend le troc plus facile que jamais. Une manière de consommer sans accumuler qui dépasse désormais le cercle des militants.
Vous n’avez que faire de la fourrure héritée de votre grand-mère qui encombre votre penderie, mais auriez bien besoin d’une bonne tronçonneuse pour élaguer le sapin de votre jardin. Ne désespérez pas, une solution s’offre à vous : le troc.
Internet donne aujourd’hui un nouvel essor à cette technique d’échange millénaire. Les acteurs se multiplient, les business models aussi. « L’Internet en tant que réseau permet de multiplier les contacts entre personnes, génère la confiance plus rapidement et facilite la prise de décision entre inconnus. Une fois la prise de contact et la négociation effectuées, l’échange peut avoir lieu dans la vraie vie », explique ainsi Vincent de Montalivet, co-fondateur de Myrecyclestuff.com.
Sa start-up tente de s’imposer en France, en misant sur la communauté et la rencontre. « Nous avons une vraie vision communautaire du troc : le système et l’algorithme ont été conçus pour permettre aux utilisateurs d’échanger avec des personnes à proximité. Sur notre site, dans 80% des cas, le troc est permis par la rencontre. »
Concrètement, comment cela se passe-t-il ? Au moment de l’inscription, on est amenés à renseigner les vêtements qui nous intéressent et à proposer les siens. Dès qu’une boucle de troqueurs est obtenue – en clair que les besoins et propositions de plusieurs personne se complètent – l’échange est réalisé.
Le système de points rentre également dans le business model : « A terme, une petite fraction des GuestPoints seront vendus. Ainsi, si vous accueillez autant que vous partez, vous n’achèterez jamais de GuestPoints, mais si vous partez plus que vous n’accueillez, vous aurez besoin d’acheter des GuestPoints. »
Dans le cas de Kiditroc et de GuestToGuest, la valeur des biens proposés étant connue à l’avance et les points d’échange cumulables, la négociation n’a plus lieu d’être. Le système de points fait donc office de « tiers homogénéisant ». Dans le cas de Pretachanger.fr, l’ingéniosité vient des boucles d’échange. Sans compter que l’offre de troc s’est considérablement élargie avec le développement d’Internet : on trouve aujourd’hui plus facilement ce que l’on cherche sans avoir à négocier.
Justement, les nouveaux modèles mis en place (boucle de troqueurs, unité de compte) seraient-ils la solution ? Une évidence même pour Marina Calmes, responsable marketing et communication de Pretachanger : « Chez nous, l’algorithme est le cœur du service, c’est ce qui permet d’organiser des boucles d’échange et de les démultiplier. C’est l’efficacité et la simplicité qui sont recherchées et l’assurance de trouver quelque chose en échange de ce qu’on propose : nous permettons cela. »
Après six mois d’activité, Pretachanger compte aujourd’hui 8 000 inscrits et 32 000 articles disponibles et envisage de se développer sur d’autres univers : « Nous allons rapidement proposer des articles de puériculture et high-tech notamment. »
Une aubaine pour des marques et des distributeurs en quête de nouvelles relations de confiance. Decathlon avec son Trocathlon, les accorderies soutenues par la fondation Macif, Castorama et lestrocheures (qui propose du troc de compétences en partageant des heures de bricolage) ou encore Intermarché avec sa plateforme sur Facebook Family Troc, les exemples se multiplient. Récupération ? Pas nécessairement, estime Vincent de Montalivet : « Pour les distributeurs, le troc est un moyen de se différencier , et de renforcer la “fidélisation”. »
Qu’il soit utilisé comme levier marketing ou comme alternative aux modes de consommation actuels, le troc redevient un comportement de consommation légitime et une pratique commerciale à part entière. Cette résurgence du troc est sans conteste un de ces signaux faibles de notre monde en transition. A surveiller donc…
Cet article d’Edwin Mootoosamy et d’Antonin Léonard a été initialement publié le 28 février 2012 sur le blog de la consommation collaborative. Un média collaboratif sera créé dans le prolongement de ce blog dans le courant 2012 par la communauté OuiShare.