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Terre mère
jeudi, 23 février 2012 / Anne de Malleray

Terraferma, d’Emanuele Crialese, en salles le 14 mars.

Plus de 1 500 personnes se sont noyées ou ont disparu en tentant de traverser la Méditerranée en 2011, la plus meurtrière des mers pour les immigrants clandestins l’an dernier, selon le Haut Commissariat de l’ONU pour les réfugiés. Dix ans après Respiro, Emanuele Crialese retourne sur l’île de Lampedusa, rocher perdu au large de la Sicile, devenue terre frontalière où s’échouent les embarcations précaires de ceux qui tentent la traversée. Le film est construit comme un triptyque sur des mondes qui se heurtent : Filippo et son grand-père, pêcheurs à l’ancienne sur un rafiot pourri, s’accrochent à un temps révolu où l’on obéissait encore aux lois de la mer.

Mais la pêche n’est plus rentable et les habitants de Lampedusa se recyclent dans un tourisme « bling-bling », sur fond de pop italienne, lorsque les citadins débarquent pour les vacances. Ce décor de carte postale est troublé par les vagues d’immigrés clandestins qui échouent sur l’île, cul-de-sac qu’ils ne quitteront que pour retourner à leur point de départ. Même si la loi interdit de secourir les naufragés en mer, le vieux pêcheur recueille une femme sur le point d’accoucher avec son petit garçon et les cache chez Filippo et sa mère, obligeant tout ce petit monde à entrer en résistance. Le film fonctionne par oppositions, misère et divertissement, valeurs traditionnelles et modernité sans repères, révolte face à la règle, quitte à verser parfois dans l’excès. Mais cette stratégie du choc se révèle payante. Ainsi, face à une scène montrant des grappes de touristes se déhanchant sur un bateau de plaisance, on a la sensation de les voir danser sur les ruines d’un monde qui tangue sérieusement. 


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