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Redonnons des couleurs à l’argent
jeudi, 23 février 2012 / Walter Bouvais /

Cofondateur et directeur de la publication du magazine Terra eco et du quotidien électronique Terraeco.net

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« Au lieu d’aller dans la rue… Faire des kilomètres avec sa voiture… Tu vas dans dans la banque de ton village et tu retires ton argent (…) Et là, on va nous écouter autrement. » En octobre 2010, l’ex-vedette du foot Eric Cantona incitait les Français à retirer leurs bas de laines des banques pour provoquer la révolution (1). Quelques mois plus tard, alors que les nuages de la crise financière demeurent au-dessus de nos têtes, les Français gardent une mauvaise image « des » banques. Nous ne sommes pas dupes de la responsabilité du système bancaire dans la crise qui secoue notre époque. Mais quand il s’agit de « leur » banque, les Français font preuve de jugements beaucoup plus modérés. Comme si la défiance s’émoussait au contact de notre banquie(è)r(e). Et qu’attendons-nous de lui ou d’elle ? Les mêmes réponses reviennent : en priorité, une baisse des tarifs, des prêts plus accessibles, etc. (2) Nous sommes très loin de la révolution de « Canto ». Mais dans la plupart des enquêtes, rien n’est dit – ou si peu – sur ce que nous pourrions attendre des banques concernant l’usage qu’elles font de notre argent. Celui que nous gagnons et plaçons chez elles.

C’est le nœud du problème : le système bancaire n’est, à nos yeux, qu’un grand « machin » dont les rouages nous échappent. Et nous vivons cela comme une fatalité. Difficile de percer la complexité du système. Il suffirait pourtant de si peu. Ne sommes-nous pas disposés à scruter les étiquettes alimentaires : local ou pas ? Bio ou pas (même si cela n’intéresse pas Marine Le Pen) ? Alors pourquoi ne pas appliquer le même raisonnement quand il s’agit des euros que nous gagnons et que nous plaçons ? Financent-ils des HLM, des éoliennes (même si cela n’intéresse pas non plus Marine Le Pen), des entreprises écologiquement et socialement responsables, des projets d’insertion, des investissements d’avenir ? Ou, a contrario, des centrales à charbon, des marchands d’armes ou des entreprises indifférentes ?

Pot de confiture

Il est temps de demander à nos banques de nous expliquer ce qu’elles font des euros que nous leur confions. Et, puisque la finance aime la libre circulation des capitaux, n’hésitons pas à voter avec nos pieds. Les banques l’ont déjà anticipé. Prises les mains dans le pot de confiture, elles cherchent aujourd’hui à se racheter – au moins une image – en nous abreuvant de jolies campagnes publicitaires aux allures de grandes causes. Alors, prenons-les au mot. Demandons-leur des comptes. Et s’il le faut, changeons de banque pour changer les banques. —

(1) L’interview mémorable d’Eric Cantona

(2) Enquêtes Ifop de février 2011 et OpinionWay/« Terra eco »