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L’Unesco génétiquement durable
jeudi, 4 décembre 2008 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

On a retrouvé l’ancêtre du développement durable. Depuis 63 ans, l’institution onusienne protège en effet cultures, sociétés et environnement à travers le monde.

Dans le froid arctique du grand Nord canadien, de vieux indiens Cris mènent les plus jeunes vers les profondeurs de la brousse. Là, sur les bords de la baie James, ils apprennent la vie en groupe et s’essaient à la chasse ou au canotage, comme leurs ancêtres autrefois. L’objectif est double. Il s’agit de mettre fin à la délinquance juvénile tout en préservant les richesses et le savoir de la culture Cri.

Lancée par des acteurs locaux, l’initiative est chapotée par l’Unesco dans le cadre de son programme pour l’éducation au développement durable. Car, le développement durable, ce ne sont pas seulement des problèmes de protection des forêts, d’alimentation bio ou de bridage des voitures. Mais aussi des questions d’éducation et de culture. Et c’est là, qu’entre en piste la « vieille » institution des Nations unies. L’Organisation pour l’éducation, la science et la culture, qui a pour mission de « contribuer au maintien de la paix et de la sécurité dans le monde en resserrant, par l’éducation, la science, la culture et la communication, la collaboration entre les nations », s’est réveillé, il y a une vingtaine d’années, au son des cloches du développement durable.

Depuis, le message s’est gravé dans son cahier des charges. « Nous n’avons plus le choix. Soit l’humanité adapte ses comportements, c’est-à-dire cesser de polluer l’environnement, permettre le renouvellement des ressources naturelles et contribuer à l’amélioration du bien-être de tous, soit elle signe, à plus ou moins brève échéance, son propre arrêt de mort », écrivait, en 2005, Koïchiro Matsuura, son directeur général. Portée par l’urgence, l’institution a décidé d’attaquer le chantier en quatre volets.

L’environnement en laboratoires grandeur nature. Partout, l’Unesco mène des actions régionales, travaille ici à la réduction des risques de catastrophes naturelles – en supervisant, par exemple, l’instauration d’un système d’alerte contre les tsunamis sur les rives de l’océan Indien –, soutient là des villages qui s’équipent en panneaux photovoltaïques. Publie encore, cet automne, la première carte mondiale des ressources en eau transfrontalières. Mieux, aux quatre coins du globe, elle appose son label bleu sur 459 « réserves de biosphère » réparties dans 97 pays. Des « laboratoires grandeur nature de développement durable » où elle assure le développement des activités humaines en harmonie avec dame Nature.

La culture sous cloche. Pour assurer à l’homme une vie future enrichie des leçons du passé, l’organisation s’attache, depuis 1972, à la protection du Patrimoine mondial et, depuis 2003, à celui, plus volatil, du patrimoine culturel immatériel, aujourd’hui fort de 47 chefs-d’oeuvre. Parmi eux, la Hikaye, récit populaire palestinien, le Kabuki, théâtre japonais traditionnel ou encore les processions de Géants dans le nord de la France et en Flandre. Car, « la diversité culturelle est aussi nécessaire pour le genre humain que la biodiversité dans l’ordre du vivant », assurait l’Unesco dans sa déclaration universelle de 2001.

L’information de bas en haut. Reste à donner les moyens aux populations de se faire une place sur l’échiquier du développement durable. A grands coups de CD-ROMs et de bibliothèque en ligne, l’Unesco fonce sur la modernité et livre à tous des pans entiers du savoir mondial… Mieux, l’organisation confie çà et là des micros et des caméras aux populations locales afin de les transformer en relais d’information. Par exemple, au Népal, Radio Lumbini, créée en 2000, est devenue l’une des premières radios communautaires du pays.

L’éducation en chaire et en os. Car à quoi bon informer sans au préalable éduquer ? Aussi en 2005, l’institution est-elle devenue chef de file de la Décennie pour l’éducation au développement durable. Le chantier est gigantesque, mais la mission très variable selon les régions. « Chaque pays définit ce qui est le plus important en fonction de ses préoccupations », souligne Aline Bory Adams, en charge de cette section à l’Unesco. Côté pratique, l’Unesco a mis sur son site un cours en 25 modules pour aider les enseignants à se former au développement durable.

Ailleurs, elle travaille à consolider des projets établis dans 7 650 écoles associées ou ses chaires « développement durable » plantées au coeur des universités. Ainsi, sur les rivages de la mer Baltique, les enfants de 300 écoles d’Allemagne, du Danemark, de Pologne ou de Suède jouent, depuis 1989, les observateurs de l’environnement, analysant la qualité de l’eau, des côtes et de l’air de leur région. Plus loin, en Chine, 200 000 établissements déclinent le développement durable en petites expériences : confection d’objets en vieux journaux ou tissus, filtration des eaux polluées… « C’est une incroyable opportunité de revisiter l’éducation, souligne Aline Bory Adams. A l’Unesco, on travaille depuis plusieurs années à l’éducation pour tous. Mais dans quel but ? Pour réaliser quoi ? Avec la Décennie, on peut se demander : “ A quoi voulons-nous que ressemblent les citoyens de demain ? ” »


Fiche d’identité Création : 1945. Budget : 631 millions de dollars pour deux ans (2008-2009), soit 495 millions d’euros. Directeur général : Koïchiro Matsuura. Salariés : 1 671 permanents. Membres : 193 Etats et 6 membres associés. Activités : éducation, culture, science, communication.

- L’Unesco

Le site du patrimoine mondial

- La décennie de l’éducation pour le développement durable


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