https://www.terraeco.net/spip.php?article40166
« Eva Joly est déterminée, je ne crois pas à un abandon »
jeudi, 1er décembre 2011 / Thibaut Schepman /

Non, nous n’avons pas à « sauver la planète ». Elle s’en sort très bien toute seule. C’est nous qui avons besoin d’elle pour nous en sortir.

L’objectif de la candidature de Joly est de faire pression sur l’allié socialiste au second tour, selon Daniel Boy, spécialiste des mouvements écologistes.

Faut-il un candidat écolo pour 2012 ? Vous vous êtes écharpés sur la question. Nous avons interrogé Daniel Boy, directeur de recherche au Centre de recherches politiques de Sciences Po (Cevipof) et spécialiste des mouvements écologistes, sur les conséquences d’un maintien ou d’un retrait d’Europe Ecologie - Les Verts (EELV) à l’élection présidentielle.

Terra eco : Eva Joly est contestée au sein même d’Europe Ecologie - Les Verts (EELV). Certains proposent de mettre fin à sa candidature pour faire front commun avec le PS. Pensez-vous que cela soit une bonne solution pour ce parti ?

Daniel Boy : Je souhaiterais rappeler quelques éléments historiques sur les candidatures écologistes à la présidentielle. Depuis 1974, et la campagne de René Dumont, les écologistes ont toujours présenté un candidat. Non pas dans le but d’être élus, mais parce qu’une présidentielle est un formidable porte-voix, alors que leurs valeurs ne sont pas portées dans le paysage politique. Aujourd’hui, un candidat écologiste n’a de toute façon aucune chance d’arriver au second tour, donc ce but reste le même. Mais le parti a fait de bons scores aux élections intermédiaires, notamment européennes et régionales et a un nouvel objectif : celui de faire pression sur l’allié socialiste pour le second tour. C’est dans ce cadre que se pose la question de la candidature ou non d’Eva Joly.

Et, selon vous, quelle solution serait la plus profitable pour les écologistes ?

C’est dans tous les cas un pari sur l’avenir. Pour que le Parti socialiste tienne compte du courant écologiste lors du second tour et, en cas de victoire, au-delà, il faut un bon score du candidat écologiste. Pour moi, le chiffre minimum est de 7% des voix au premier tour. Meilleur sera ce score, plus les écologistes auront de poids, mais à l’inverse si ce score est décevant les marges d’EELV seront faibles. L’idée de certains écologistes, dont Daniel Cohn-Bendit, c’est qu’il vaut mieux négocier un ralliement immédiat avec les socialistes en échange d’accords sur des thèmes clés, car les bons scores récents aux élections intermédiaires sont déjà un énorme atout dans la négociation. Difficile de dire qui a raison sur le meilleur moyen de faire avancer des mesures du programme écologiste. En tout cas, au niveau strictement politique, les Verts ont déjà bien capitalisé sur ces bons résultats, en obtenant déjà un groupe parlementaire à l’Assemblée. C’est énorme. Imaginez un Parlement en 2012 où le PS a besoin des Verts pour obtenir la majorité des voix, le gain politique serait immense pour les écologistes.

Eva Joly est-elle la bonne candidate pour obtenir ce bon score ? Sa stratégie est-elle adaptée à une campagne présidentielle ?

Tout dépend de ce que l’on attend du candidat ! Pour certains, le but est d’avoir quelqu’un qui sorte des chemins battus, qui tienne une position radicale, afin d’incarner la différence de l’offre écolo. C’est l’avis par exemple d’un Jean-Vincent Placé, qui à ce titre doit être satisfait. Mais nous avons réalisé au Cevipof des enquêtes auprès des électeurs sur les qualités et les défauts d’Eva Joly. Les résultats nous montrent qu’ils la perçoivent plus comme quelqu’un de fermé que comme quelqu’un qui a des convictions. C’est là le problème avec cette candidature.

Faut-il revenir sur sa candidature et présenter un autre candidat, comme ce fut le cas pour Alain Lipietz en 2001 jugé trop radical lui aussi et remplacé par Noël Mamère ?

Effectivement, Noël Mamère a fait le meilleur score de l’histoire politique écologiste, après avoir remplacé Alain Lipietz. Mais la comparaison est impossible. Personne ne peut savoir quel score aurait fait Lipietz et si son retrait a fait gagner des voix. Par ailleurs, il est beaucoup plus compliqué de destituer aujourd’hui une candidate qui a été choisie par une primaire ouverte, que de remplacer le candidat Lipietz en 2001 élu par quelques milliers de personnes à l’époque. Pour changer de candidat, il faudrait faire une nouvelle primaire. Cela me semble très compliqué, ne serait-ce que sur le plan financier. Enfin, je ne crois pas à un abandon d’Eva Joly, qui me semble déterminée. Elle n’arrêtera pas.

A lire aussi sur terraeco.net :

- Vos avis à la question : Faut-il un candidat écolo pour 2012 ?


AUTRES IMAGES

JPEG - 23.6 ko
144 x 164 pixels