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Jadot : « Le programme de gauche le plus écolo »
mercredi, 16 novembre 2011 / Thibaut Schepman /

Non, nous n’avons pas à « sauver la planète ». Elle s’en sort très bien toute seule. C’est nous qui avons besoin d’elle pour nous en sortir.

Malgré les différends, le PS et EELV ont trouvé un accord sur un programme pour les législatives de 2012. Yannick Jadot revient sur cette négociation.

Un accord avec beaucoup de désaccords. Le Parti socialiste et Europe Ecologie - Les Verts (EELV) se sont accordés ce mardi 15 novembre sur un « contrat de mandature ». Ce texte fixe un cap pour le programme de la majorité en cas de victoire de la gauche aux législatives, et garantit un groupe parlementaire aux écologistes à l’Assemblée nationale après les élections législatives de 2012.

Il prévoit, entre autres, une réduction de la part du nucléaire dans la production électrique de 75% aujourd’hui à 50% en 2025 et une réforme fiscale. Restent plusieurs points de conflits, notamment sur la poursuite ou non du chantier de Flamanville et la construction de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes, près de Nantes.

Yannick Jadot, porte-parole de la candidate Eva Joly et député européen EELV revient, pour Terra eco, sur les enjeux de cet accord.

Terra eco : Vous vous êtes mis d’accord sur une réduction de la part du nucléaire dans la production électrique, de 75% aujourd’hui à 50% en 2025. Êtes-vous aussi en harmonie sur le moyen d’y parvenir ?

Yannick Jadot : Nous avons des points d’accord sur les moyens progressifs d’y parvenir, comme la fermeture de 24 tranches (nom donné à une unité de production d’électricité nucléaire composée notamment d’un réacteur et d’éléments de production, ndlr) d’ici 2025, le financement d’une filière de démantèlement et l’arrêt de la filière MOX (cette dernière mention a été supprimée de l’accord final, mais personne n’était disponible chez EELV pour la commenter, ndlr). Nous partageons aussi des vues sur les moyens de compenser ces fermetures, à savoir miser sur les économies d’énergies grâce à un vaste plan d’isolation des bâtiments, et surtout le développement de la filière des énergies renouvelables. C’est une vraie rupture dans la politique énergétique française du tout nucléaire.

Même avec un cap à 50% et non une sortie du nucléaire comme souhaité initialement ?

L’important, c’est d’envoyer un signal fort de rupture. Il faut absolument booster la filière de l’industrie du renouvelable en France. Aujourd’hui les industriels du secteur ne peuvent se développer facilement à cause des incertitudes sur la filière en France. Or, on a encore une chance incroyable parce que le marché mondial du renouvelable est en pleine expansion et qu’il reste de la place pour de nouveaux entrants. Il faut faire vite et envoyer ce signal dès 2012, pour booster notre production, sinon, à l’avenir, notre secteur du renouvelable reposera uniquement sur des importations. Dans ce cas, cela peut aller très vite et dépasser les attentes. Quand ils ont opté pour une sortie du nucléaire, les Allemands espéraient arriver à 10% d’énergies renouvelables dans leur mix énergétique, et ils en sont déjà à 15%.

Pourquoi souhaitez-vous l’arrêt du chantier de Flamanville, au point de faire de ce sujet l’un des désaccords majeurs ? Des sommes énormes ont été consacrées à ce projet, et cet EPR pourrait de toute façon être l’un des derniers construits dans le monde. Est-ce un symbole pour vous ?

C’est bien plus qu’un symbole. Oui on a déjà dépensé beaucoup, mais on risque de dépenser encore plus pour terminer le projet, probablement 3 ou 4 milliards d’euros supplémentaires. C’est trop. Par ailleurs, construire l’EPR, c’est reprendre du nucléaire pour cinquante à soixante ans en France, cela risque de contredire notre message de rupture qui, je le répète, est essentiel.

Malgré les concessions, il reste de nombreux points de désaccords. Est-il vraiment possible pour EELV de ne pas participer à un gouvernement ?

Nous avons en effet des désaccords -qui ont d’ailleurs été couchés sur le papier- mais aussi beaucoup de points de convergence, notamment sur la fiscalité écologique ou l’agriculture. C’est le programme de mandature de gauche le plus écologique de l’Histoire de France. Nous partageons donc une volonté commune pour former ensemble une majorité parlementaire alternative. Toutefois notre participation à un gouvernement n’est pas acquise aujourd’hui, parce que la réalité aujourd’hui c’est que nous sommes différents.

Quelle est pour vous la prochaine échéance de décisions sur ce point ?

Il faudra débattre de ces points après le premier tour de la présidentielle. Il reste de nombreux mois de campagne et les sujets risquent de beaucoup évoluer. On n’avait jamais eu de débats sur l’énergie en France et on commence enfin à en parler. Cela va être l’un des thèmes de la campagne, avec en particulier le nucléaire. C’est un secteur en crise au niveau technique et financier ; nous sommes à une époque charnière, les mentalités vont changer. C’est l’un des objectifs de campagne d’Eva Joly que d’aller à la rencontre des Français sur ce thème.