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La France n’a pas d’énergie à revendre
jeudi, 27 mars 2008
/ Toad
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/ Simon Barthélémy
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L’Hexagone est accro à l’atome. Mais le nucléaire, qui représente la moitié de la production énergétique nationale, ne nous a pas rendus indépendants du pétrole et des vendeurs d’uranium.
En France, on n’a pas de pétrole, mais une idée fixe : dépasser la barre symbolique de 50 % d’indépendance énergétique. C’est-à-dire couvrir plus de la moitié de nos besoins en énergie. L’électrochoc (pétrolier) date de 1973. A l’époque, la hausse des prix du baril décrétée par l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep) sonne le glas des Trente Glorieuses. Après l’indépendance de l’Algérie et de ses réserves d’hydrocarbures, et en pleine guerre froide, les dés sont jetés. Des réacteurs électronucléaires doivent épauler les barrages hydroélectriques, ainsi que les gisements de gaz et de charbon moribonds. Dans la série « rayonnement de la France », l’indépendance énergétique correspondait alors au volet civil de l’arme atomique.
Trente-cinq ans plus tard, alors que le prix du pétrole bat tous les records et que la guerre est devenue économique, l’argument revient en force : l’électricité nucléaire, c’est de la bombe. Lors de la campagne présidentielle, Nicolas Sarkozy assurait que le futur réacteur EPR, de troisième génération, serait « la garantie de l’indépendance énergétique de notre pays ». De la Libye à la Chine, le président français est désormais le meilleur VRP de son fabricant Areva, dont l’Etat est l’actionnaire majoritaire. « Grâce notamment au progra mme électronucléaire », le baril de brut est presque « has been », s’emballe La Tribune, le 19 novembre 2007. Pour le journal financier, « la quantité de pétrole nécessaire à la croissance ne cesse de diminuer grâce au développement des activités de service, aux économies d’énergie et aux énergies nouvelles. Le taux d’indépendance énergétique de la France est ainsi passé de 23 % en 1973 à 50 % » aujourd’hui. Cocorico ? Bof.
Voici trois raisons de ne pas se réjouir trop tôt :
A l’arrivée, notre consommation d’énergie par habitant – 4,2 tonnes équivalent pétrole par an – est supérieure à la moyenne européenne (3,6). Bruxelles veut inverser la tendance, alarmée par sa dépendance énergétique, qui pourrait atteindre 80 %, et par sa position de faiblesse envers des pays fournisseurs comme la Russie. L’Union mise notamment sur les énergies renouvelables. Pas besoin en effet d’importer du soleil ou du vent qui, c’est bien connu, ne s’arrêtent pas aux frontières. —
Retour vers le futur
Pour être moins dépendante, la France mise sur deux idées dans le vent (contraire) de l’histoire. Premièrement, la renaissance de Superphénix. Cher et souvent en panne, le surgénérateur – enterré par la gauche en 1998 – fonctionne avec du combustible retraité : il pourrait prolonger la durée des gisements de deux mille cinq cent ans, contre quelques décennies actuellement. Deuxièmement, l’envolée des agrocarburants qui devraient passer de 3,5 % des ventes de carburant en 2007 à 10 % en 2015. Selon un sondage Ipsos réalisée en février, 83 % des Français pensent « que le bioéthanol permet à la France de réduire sa dépendance vis-à-vis du pétrole ». A peu près autant s’indignent de l’augmentation des prix alimentaires. Or c’est en partie la production de céréales pour le bioéthanol qui fait flamber les cours.
La Direction générale de l’énergie et des matières premières : www.industrie. gouv.fr/energie/ sommaire.htm
L’association negaWatt
La revue EcoRev’ (n°10 et 20) :
So watt ?, l’énergie : une affaire de citoyens, Benjamin Dessus et Hélène Gassin (éditions de l’Aube, 2005).
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