https://www.terraeco.net/spip.php?article3567
Les Chinois bien dans leur assiette
mercredi, 31 octobre 2007 / Philippe Charles

Avec 7 % des terres cultivables, Pékin nourrit 22 % de la population mondiale.

Comment nourrir 1,3 milliard de bouches, ne pas dépendre des importations de céréales américaines et évacuer la cicatrice psychologique des grandes famines du passé ? La Chine n’a eu d’autre choix que de viser l’autosuffisance alimentaire. Pendant la période de collectivisation des terres, le gouvernement maintenait déjà les prix à la production à un niveau artificiellement bas pour que l’ouvrier puisse manger à sa faim. Aujourd’hui, le géant asiatique a atteint le rang de premier producteur de blé devant les Etats-Unis (97,1 millions de tonnes en 2005).

Il est aussi premier producteur de riz paddy et de viande de porc. Même surestimés, ses rendements céréaliers ne sont pas négligeables  : 3,93 tonnes de blé par hectare récolté en 2003, contre 6,25 en France et 2,62 en Inde, selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et le China Statistical Yearbook. La consommation alimentaire de la population n’a cessé d’augmenter, avec 2 950 kcal/personne/jour contre 2 460 en Inde, et évolue vers des produits plus élaborés comme la viande ou les fruits.

Le revers du miracle

Résultat : 12 % seulement de la population chinoise est considérée comme sousalimentée par la FAO. « Cette malnutrition est liée à la pauvreté de certaines régions de l’Ouest de la Chine. Il ne s’agit pas de famines  », analyse Claude Aubert, directeur de recherche à l’Institut national de la recherche agronomique. En dépit du solde négatif de sa balance agricole, qui compte des produits non alimentaires comme le coton, l’autosuffisance alimentaire de la Chine est donc assurée : avec seulement 7 % des terres cultivables et 9 % des ressources en eau douce, la Chine nourrit 1,3 milliard de personnes, soit 22 % de la population mondiale.

Ce succès s’explique notamment par le modèle d’agriculture intensive. Avec près de 300 kg d’engrais par hectare récolté, l’utilisation de semences améliorées (riz hybride) et le recours massif à l’irrigation (67 % des ressources en eau vont à l’agriculture), la productivité par unité de surface est satisfaisante. La productivité par personne, elle, ne l’est pas, un agriculteur nourrissant 3 à 4 personnes en Chine contre 75 aux Etats-Unis.

Le modèle agricole chinois repose sur une main-d’oeuvre abondante, qui représente encore 40 % des actifs et compense la faible mécanisation de l’agriculture. Les parcelles de terre sont très petites – en moyenne de 0,65 ha – et l’exploitation se fait en famille. L’autosuffisance alimentaire chinoise passe en réalité par le sacrifice des agriculteurs. Ceux-ci ne subviennent à leurs besoins que grâce à leurs revenus non agricoles. Autre revers du « miracle chinois », le caractère peu soutenable du modèle sur le long terme. La pénurie des terres arables, et celle d’eau liée à la pollution des nappes phréatiques, préoccupent beaucoup les autorités. —

A LIRE AUSSI

- Demain, 9 milliards de bouches à nourrir : Comment faire ?

- L’Autriche, paradis du bio

- Encore très loin du miracle OGM

- Le Brésil, zéro pointé

- "Le marché ne peut pas, seul, nourrir la planète"


AUTRES IMAGES

GIF - 47.8 ko
300 x 201 pixels