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Bruxelles riche de ruines
jeudi, 29 mars 2007
/ Anne Daubrée
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Des châteaux baroques aux usines de sucre, l’Europe participe à la restauration de patrimoines architecturaux. Oubliant du coup la création culturelle.
Des vandales avaient saccagé les vastes salons du château de Venaria, à l’abandon depuis les années1940. Trois siècles plus tôt, la noblesse piémontaise s’y pressait, soucieuse de faire sa cour aux ducs de Savoie et de chasser dans les 125 hectares du parc situé à quelques kilomètres de Turin en Italie. Depuis quelques mois, habitants de la ville voisine et touristes ont succédé aux courtisans sous les fresques du XVIIIe siècle parfaitement restaurées. Mieux, le réalisateur britannique Peter Greenaway est attendu pour un spectacle à l’automne prochain. Et, à quelques pas du château, un atelier de restauration de biens anciens a vu le jour. « En 1998, l’Europe nous a accordé un financement important. Sans sa contribution, cette opération n’aurait pas pu avoir lieu. En Italie, aucune instance nationale ou régionale n’avait les moyens de porter ce projet seule », raconte Alberto Vanelli, directeur des Affaires culturelles de la région Piémont. De fait, l’Union a versé près de 62 millions d’euros, soit le tiers environ du budget.
Les chefs d’œuvre d’architecture baroque ne sont pas seuls à bénéficier des subsides européens. En Guadeloupe, le site de l’usine de sucre Beauport a été réinvesti en partie grâce au financement européen, explique le Relais Culture Europe, l’organisme qui assure l’interface entre l’Union européenne et la France, dans le domaine de la culture. Dans la région de Nord Grand Terre, jusqu’en 1990, la vie tournait autour de cet établissement qui produisait le tiers du sucre de l’île.
Seul hic, le financement de la préservation de ces patrimoines locaux pourrait bien se faire au détriment de la création. Michel Quévit, dans son analyse de « l’enjeu de la culture dans la future programmation des fonds structurels » de 2005, est inquiet. Il craint qu’Etats et autorités régionales ne soient tentés de « faire financer leurs investissements infrastructurels, qui sont les plus coûteux, par la solidarité communautaire ». Pis, les orientations des programmes européens semblent aller dans ce sens.
Ainsi, le programme Culture 2000, consacré aux créations culturelles nouvelles, ne disposait que de 236 millions d’euros annuels entre 2000 et 2006. Or, ce fonds dote des projets tels Theorem, qui promeut l’avant-garde du spectacle vivant est-européen. C’est dans ce cadre qu’un metteur en scène hongrois a monté des pièces avec des acteurs londoniens, ou que des artistes de l’Est ont bénéficié de formations d’éclairagistes. Le projet a reçu 800 000 euros, environ la même somme que Trans Danse Europe, qui soutient des compagnies de danse contemporaine du Danemark, de la Pologne ou de la Slovénie. Reste donc à concilier restauration des patrimoines et impulsions culturelles novatrices. Pour éviter une Europe culturelle fossilisée.
Le site de Relais Culture Europe
A Marrakech, au Maroc, le palais Glaoui a réouvert ses portes en partie grâce au programme « Euromed héritage » de l’UE. © Nicolas Gausse JPEG - 27.6 ko 300 x 225 pixels |