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J’ai testé la ville en transition
vendredi, 28 octobre 2011
/ Laure Noualhat / Journaliste errant dans les sujets environnementaux depuis treize ans. A Libération, mais de plus en plus ailleurs, s’essayant à d’autres modes d’écriture (Arte, France Inter, Terra of course, ...). Il y a deux ans, elle a donné naissance (avec Eric Blanchet) à Bridget Kyoto, un double déjanté qui offre chaque semaine une Minute nécessaire sur Internet. |
Jardins partagés, économies d’énergie et produits locaux : me voici au cœur des territoires durables. Les initiatives sont sincères et les promoteurs enthousiastes. Mais contre le roi-pétrole, le mouvement semble bien diplomatique.
L’écologie ne peut se nourrir perpétuellement de mauvais songes. Et l’écologiste doit régulièrement s’injecter une dose d’optimisme. Dans la ribambelle d’initiatives que l’on qualifiera d’enthousiastes, il en est une qui mérite qu’on la teste : la transition.
La transition est un mouvement né en Grande-Bretagne en 2006, sous la férule de Rob Hopkins, jeune prof de permaculture, la science des sociétés écologiquement soutenables. L’idée est bête comme chou : le pic de production pétrolier est dépassé, l’énergie va se raréfier, son prix se renchérir, il faut donc d’ores et déjà se passer d’or noir. Cela commence comme une revue de détail : où sont les postes énergivores ? Habitat, transports, alimentation. Il faut donc réduire la part de pétrole dans chacun d’entre eux. Sur le papier, ça donne envie. Il n’y a plus qu’à !
C’est dans la ville de Totnes, en Angleterre, que Rob Hopkins met en pratique la résilience. J’y suis allée en 2009 et j’en étais revenue dubitative. Outre une monnaie locale – la « Totnes pound », acceptée par une trentaine de commerçants –, la liste des actions locales semble bien légère : plantation d’arbres à noix (noisetiers, noyers, amandiers…), utilisation de friches pour des jardins partagés, taxis alternatifs gratuits, micro-barrage hydraulique, etc. Face au parking gavé du supermarché, force est de reconnaître qu’une poignée de convaincus bataille pour la transition au sein de cette bourgade de 7 000 âmes. Auréolés de la casquette de pionniers, les fameux « transitioners » peinent à élargir leurs initiatives à l’ensemble de la population. Seraient-ils lost in transition ?
Même effet, le mois dernier, quand je suis allée me promener du côté du Trièves (Isère), territoire agricole situé au sud de Grenoble. On qualifie cet endroit de « labo de la transition » français et ça laisse songeur. Se rendre dans le Trièves sans pétrole est une tannée : TGV jusqu’à Grenoble, puis TER jusqu’à Clelles, puis bus, si possible, jusqu’à Mens. Une fois débarquée à Clelles, j’ai appelé Olivier, un gentil automobiliste qui loue sa voiture via le service Cityzencar. On m’a aussi parlé de l’autostop solidaire, qui garantit aux mères inquiètes que le conducteur n’est pas un violeur. Les inscrits au service se dotent d’un autocollant et les stoppeurs envoient un SMS une fois dans la voiture. Pas bête mais un peu longuet pour un reportage.