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La fin des illusions
jeudi, 25 août 2011 / Walter Bouvais /

Cofondateur et directeur de la publication du magazine Terra eco et du quotidien électronique Terraeco.net

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Le piège ouvert par la crise des « subprimes » en 2007 vient de se refermer sur les Etats. C’est-à-dire sur nous. Soumis aux injonctions d’une frange de l’industrie financière, nous voici sommés de courir à la fois après l’austérité budgétaire et la croissance du PIB. Funambulisme ou schizophrénie ?

L’austérité, ce sont des coupes spectaculaires dans des dépenses supposées superflues : éducation, culture, accompagnement des personnes socialement fragilisées, préservation des ressources de la planète, aide au développement. On s’apprête ainsi à assécher l’humus de notre civilisation.

La croissance, aucun gouvernement ne peut la décréter. Du reste, elle s’entretient à coup de plans de relance passéistes (industrie automobile) et elle épuise nos ressources naturelles. Alors que la dette financière engloutit les Etats, la planète croule sous la dette écologique. Notre budget « ressources naturelles » pour 2011 est déjà épuisé. Nous retrouverons sur notre chemin des émeutes de la faim, un choc pétrolier, la course aux minerais précieux. Parier sur une croissance matérielle infinie est économiquement illusoire et socialement dangereux. Cela revient à compter sur des revenus que nous ne percevrons jamais.

La crise des « subprimes », devenue crise de la dette publique, a démontré que l’humanité – et notamment ses ressortissants les mieux lotis – devrait cesser de vivre au-dessus des moyens dont elle dispose collectivement. Dans le cas contraire, elle lèguera à ses enfants un fardeau qui rendra leur horizon humainement inacceptable.

Sortir de ce grand bazar

Pour sortir vivants de ce grand bazar, la clé consiste à organiser dès maintenant la transition vers un autre modèle de civilisation. Bonne nouvelle : des solutions sont là. La taxe sur les transactions financières, autrefois raillée, est aujourd’hui récupérée par tous nos partis. Tant mieux. Son produit pourrait être affecté au désendettement des Etats et au financement de grands projets écoresponsables. La lutte – réelle – contre les paradis fiscaux permettrait de faire de même. Un programme européen massif d’économies d’énergie doperait l’innovation et multiplierait les emplois non délocalisables.

Si la crise a quelque vertu, ce qui nous est proposé, c’est de choisir entre l’illusion d’un système économique destructeur et l’espoir d’un nouveau projet de société inspirant. Faute d’anticipation, bien des peuples ont disparu plutôt que de changer de civilisation (1). Il ne suffit pas d’en avoir conscience pour éviter de commettre la même erreur. —

(1) A lire Effondrement. Comment les sociétés décident de leur disparition ou de leur survie, de Jared Diamond (Gallimard, 2006).