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J’ai testé la désobéissance civile
mercredi, 29 juin 2011
/ Laure Noualhat / Journaliste errant dans les sujets environnementaux depuis treize ans. A Libération, mais de plus en plus ailleurs, s’essayant à d’autres modes d’écriture (Arte, France Inter, Terra of course, ...). Il y a deux ans, elle a donné naissance (avec Eric Blanchet) à Bridget Kyoto, un double déjanté qui offre chaque semaine une Minute nécessaire sur Internet. |
Ma mission : apprendre en deux jours à bloquer des trains de déchets nucléaires et à investir un lieu public. Ou comment devenir un militant inébranlable, non-violent et efficace en quarante-huit heures chrono.
Toute petite déjà, j’aimais désobéir. Mais ce que je savourais le plus, c’était la certitude, qui pointait parfois, d’avoir eu raison. En France, et malgré son étendard démocratique, beaucoup d’actes, de paroles, de prises de position s’apparentent à de la désobéissance. A l’heure où quelques dirigeants imposent des choix sans retour, sous surveillance techno-assistée, ce qui est illégal se révèle parfois légitime. En ces temps d’indignation collective, il est bon de se rassembler, tente et brasero sous le bras, sur les places des centres-villes. Mais il est aussi couru d’avance que l’on s’en fera déloger. Alors, histoire de ne pas faire que de la figuration, pourquoi ne pas prendre des cours d’action non-violente. Eh oui, désobéir ne s’improvise pas.
Depuis 2007, Xavier Renou, ancien de Greenpeace, et le collectif Les Désobéissants organisent des stages de désobéissance civile à travers toute la France. Deux jours durant, les stagiaires apprennent les rudiments de la contestation non-violente, inventent des actions, se frottent à l’art de gérer les médias, se glissent dans la peau de fonctionnaires de police et se préparent à d’éventuelles gardes à vue.
Mon stage a eu lieu en Lorraine, à Bure, bien connu des militants antinucléaires car il s’agit du coin pressenti pour stocker des déchets hautement radioactifs français. Dans ce village perdu entre deux vallons, on trouve une mairie, un monument aux morts et une Maison de la résistance, Bure Zone Libre, retapée pour accueillir les volontaires, stagiaires, militants en tous genres… On peut rappliquer avec sa tente ou crécher dans le dortoir. La cuisine, plutôt « veggie », est commune, tout comme les toilettes sèches, au centre du jardin.
Si on parle d’action concrète, on évoque aussi ses limites. Avant toute chose, la désobéissance civile se veut non-violente. « Qu’est-ce qui est violent, l’action ou le ressenti ? », interroge un stagiaire. « Humiliation, séquestration des patrons… Certains d’entre nous ne veulent pas exercer de violences psychiques », remarque Xavier Renou. « Où sont les violences psychiques ? Du côté de l’Etat et des problèmes que nous dénonçons ou du côté de ceux qui résistent ? », se défend Bénédicte. Bonne question. Faudrait demander à Stéphane Hessel. —
Le site du collectif Les Désobéissants avec les dates des prochains stages (environ un par semaine en France). Avant de vous inscrire, vérifiez bien que vous adhérez au « Manifeste des Désobéissants ».
A lire : Petit manuel de désobéissance civile, de Xavier Renou (éditions Syllepse, 2009).