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Climat : quand le ciel nous tombera sur la tête
jeudi, 8 décembre 2005
/ Walter Bouvais / Cofondateur et directeur de la publication du magazine Terra eco et du quotidien électronique Terraeco.net Suivez-moi sur twitter : @dobelioubi Mon blog Media Circus : Tant que dureront les médias jetables , / Collectif Argos (Photo) |
Le changement climatique, ce sont peut-être quelques palmiers à Lille et la plage à Paris... C’est aussi et surtout le bouleversement annoncé de nos modes de vie, de nos emplois, de nos loisirs. Pour mieux saisir cette réalité et ses enjeux économiques, sociaux et humains, Terra Economica a fait pour vous un saut dans l’avenir. Bienvenue dans le monde tel qu’il pourrait être en 2043. Accrochez vos ceintures.
Cette fiction s’appuie sur des études scientifiques, des rapports de compagnies d’assurance, des discussions avec des spécialistes du changement climatique. L’approche ne consiste pas à noircir le trait mais à proposer un enchaînement de faits possibles à partir d’une situation réelle : le changement climatique est en marche. Si la mobilisation autour de cette question reste timide, une réaction franche de la communauté internationale n’est pas exclue et peut permettre de contenir les effets du changement climatique. |
Londres, Royaume-Uni. 23 décembre. "... température agréable aujourd’hui... Nous avons 10 degrés ce matin et le thermomètre affichera 16 degrés à l’ombre dans l’après-midi... Tout de suite, les informations de 7 heures...". Sara est à la bourre, comme chaque matin.
"Veuillez présenter votre carte", nasille Nestor, à l’entrée de la cabine de douche. Nestor, c’est le sobriquet dont Sara a affublé la voix qui rythme son quotidien : en fait, un ordinateur à synthèse vocale qui contrôle en permanence le niveau d’émissions de gaz à effet de serre - on les appelle "les gaz" - de l’appartement de Sara, un coquet 25 mètres carrés perché au 25e étage d’une tour qui en compte 40.
L’idée de ce barème date de Mathusalem. Elle fut imposée par le Parlement européen en 2019 et mise au point, bon gré mal gré, par les résidents de la Tour 34, puis par ceux d’autres tours, d’autres quartiers, d’autres villes, après plusieurs mois d’âpres discussions.
Après des années d’inertie, après l’échec des négociations internationales pour le troisième volet du protocole de Kyoto (2015), le Vieux continent réclamait une action vigoureuse de la part des élus. Celle-ci ne se fit pas attendre... Paralysés par l’enjeu, la totalité des parlements nationaux européens remirent leur mandat et leurs pleins pouvoirs au Parlement européen. Une période tendue, durant laquelle resurgirent les tentatives de repli nationaliste. A quoi bon ? Il ne pouvait y avoir de solution que globale.
La taxe sur les gaz envahit les vies, même les plus misérables. Pas pour renflouer les caisses des Etats, mais pour dissuader les comportements les plus "polluants". Vingt-cinq ans plus tard, le système fonctionne. A tort ou à raison, plus personne n’y voit à redire. Des historiens ont même baptisé les années 2019 et suivantes les "10 dernières" : les dix années de la dernière chance pour contenir la dérive climatique.
Les résidents de la Tour 34 n’échappent, donc, pas à la règle. Selon le barème établi par le PURE annuel et mis en place par le département londonien de la planification décentralisée, l’immeuble où vit Sara ne peut émettre plus de 1000 tonnes de gaz à effet de serre cette année. Et ses habitants sont tenus de négocier ensemble un compromis équilibré, au sein de ce "quota". Exemple : en hiver, la centrale électrique de l’ascenseur est désactivée aux heures de pointe. Les panneaux photovoltaïques de la Tour 34 ne fournissent pas d’électricité en quantité suffisante pour le bâtiment. Les résidents ont dû choisir : douche tiède ou ascenseurs. Personne n’ayant envisagé de renoncer au confort de l’eau tiède dans des appartements "chauffé" à 16 degrés, Sara dévale donc quotidiennement les 25 étages qui séparent son appartement de la rue, à pied. 512 marches. 15 minutes de descente.
En quittant la Tour 34, l’une des cents tours (re)construites sur pilotis - caprices de la Tamise obligent -, Sara songe à sa famille, restée à Marseille, qu’elle n’a pas revue depuis cinq ans. Les retrouvailles ne seront pas pour cette année. Il y a belle lurette que les avions ne volent plus en Europe. Sous la pression des industries et des rares transporteurs routiers encore en exercice sur le continent, le transport aérien a été mis au banc des accusés pour son incapacité à réduire significativement ses émissions de gaz. Assommées par "la" taxe, les compagnies aériennes ont fait faillite les unes après les autres : le prix d’un billet Genève-New York avait bondi de 300 à 2000 euros. L’Union européenne a mis la main sur les derniers coucous en état de marche, pour les affecter aux services d’urgence et aux armées.
C’est le prix à payer pour une agriculture 100% biologique. Car l’utilisation des engrais a été proscrite - leur fabrication nécessitait trop d’énergie - et celle des pesticides est contingentée. Des armées d’ouvriers agricoles et d’ingénieurs agronomes ont été affectées aux champs, tant la tâche est complexe : il faut surveiller en permanence tous les indicateurs, l’évolution des parasites. Et quand l’un d’entre eux prolifère, c’est le branle-bas de combat (...) Lire la suite
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