https://www.terraeco.net/spip.php?article17650
Eau en bouteille ou du robinet : quelle est la plus polluée ?
jeudi, 26 mai 2011 / Angela Bolis /

Journaliste

19 substances dans l’eau du robinet, 4 micro-polluants dans l’eau de bouteille... WWF a passé au crible notre boisson quotidienne, et alerte sur sa dégradation croissante.

Etes-vous plutôt eau en bouteille ou eau du robinet ? Dans les deux cas, des polluants stagnent au fond de votre verre. WWF a mené l’enquête, traquant 180 molécules – des PCB au Bisphénol A en passant par les pesticides – potentiellement nocives pour notre santé. Rassurons-nous, les normes qui définissent une eau potable sont tout à fait respectées. Moins rassurant : ces normes ne tiennent pas compte de l’effet à long terme de ces substances consommées à faible dose, ni de leur « effet cocktail » (réaction spécifique lors de l’exposition à plusieurs substances). Des effets particulièrement pressentis dans le cas des perturbateurs endocriniens.

Source : Rapport 2011 « Eau de boisson » WWF

Côté robinet

Question préliminaire : d’où vient l’eau qui coule sans fin de notre robinet ? 2/3 est puisé dans les nappes souterraines, 1/3 à la surface, dans les lacs et les rivières. Au total, 30 000 points de captage d’eau produisent chaque jour 18,5 millions de m3 du précieux liquide. Une quantité digne d’un tsunami... qui équivaut, grosso modo, à 189 bouteilles d’eau par jour et par habitant.

Pour traiter cette eau, on y ajoute (entre autres) systématiquement du chlore. On cherche ainsi à éliminer une cinquantaine de « familles » de contaminants, et en premier lieu les microbes, les germes indicateurs de pollution fécale, les pesticides, les nitrates, etc.

Malgré ces précautions, quelques substances peu ragoûtantes demeurent. Ainsi, WWF a détecté, dans la cinquantaine de villes analysées :

Dans certains cas, les doses de polluants sont tellement élevées que l’eau est coupée, note WWF : « Des interdictions de distribution d’eau potable, à cause des teneurs en nitrates et en pesticides trop élevées, ont lieu. » Et les Français ne sont pas égaux face à ces contaminations. Les villes les plus impactées sont Marignane (13) et Villefranche-sur-Saône (69). Paris n’est pas très loin derrière. Toutefois, de manière générale, les grandes villes bénéficient de contrôles importants, alors que les communes rurales sont plus exposées aux pollutions d’origine agricole et disposent de moins de moyens pour contrôler et traiter leurs eaux. Résultat : « Près de 80 % des prélèvements non conformes concernent les réseaux les plus petits (moins de 500 habitants). »

Côté bouteille

Même question pour l’eau en bouteille : d’où vient-elle ? Cette fois, la réponse est simple : à 100% de gisements souterrains profonds. L’eau de source ou minérale ne subit aucun traitement de désinfection biologique, mais d’autres traitements (notamment avec de l’air enrichi en ozone) induisent également des « sous-produits de désinfection ».

Résultats de l’enquête : sur une quinzaine de bouteilles, on trouve 4 micro-polluants. Au menu, des nitrates, de l’aluminium, de l’antimoine, et du plomb.

Source : Rapport 2011 « Eau de boisson » WWF

Malgré le plastique de la bouteille, on ne déguste pas - bonne nouvelle - de Bisphénol A. En revanche, ce plastique, produit à base de pétrole, n’est pas toujours recyclé et met des siècles à disparaître de la nature. A compter aussi dans le bilan carbone des bouteilles : le transport. 25% d’entre elles ne sont pas consommées dans leur pays de production.

La « pollution croissante des eaux brutes »

Bouteille ou robinet, « le vrai problème est la dégradation sans fin de la qualité des eaux brutes, à laquelle il faudra bien répondre durablement », souligne Serge Orru, directeur général de WWF France, cité dans le rapport.

Pour l’ONG, la principale source de pollution de l’eau est l’agriculture intensive. Les conséquences sont patentes : 443 points de captage d’eau ont dû être abandonnés entre 1989 et 2000. Au rayon nitrates, 75% des points de mesure sont classés en niveau moyen ou mauvais. Des normes de qualité environnementale (NQE) existent pourtant. Mais certains produits comme les « polluants émergents » (phtalates, substances pharmaceutiques...) sont tout simplement absents de la liste des 33 « substances prioritaires » de la Directive cadre sur l’eau de 2000.

Bref, reste un problème de fond, soulève WWF : « Jusqu’à quel point pourra-t-on potabiliser de l’eau brute de plus en plus polluée ? »


AUTRES IMAGES

PNG - 123.6 ko
558 x 802 pixels

PNG - 268.1 ko
700 x 867 pixels