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Dilemme : Swatch ou Rolex ?
lundi, 25 avril 2011 / Stéphanie Senet

Pour les fabricants de montres, il n’y a pas urgence à passer à l’heure écolo. Pourtant, entre la tocante à quartz, celle en plastique et celle à remonter… certaines tirent mieux leurs aiguilles du jeu que d’autres.

Avant d’arborer une montre écologique, il va falloir être patient. Car nos préoccupations environnementales ne trouvent pas (encore ?) d’écho chez les fabricants, qu’ils s’appellent Swatch ou Rolex (1). Ceux-ci préfèrent choyer leur image à coups de publicités glamour et une étude de l’Ifop, fin 2010, les conforte : les Français choisissent avant tout leur tocante en fonction de l’esthétique. En attendant, tous les produits sur le marché n’affichent pas le même impact. Alors, remettons les montres à l’heure.

Matières premières : avantage au plastique

Une montre comporte de nombreux composants. Le boîtier en constitue la pièce maîtresse. Les consommateurs, enfin ceux qui en ont les moyens, éviteront l’or, l’argent et le platine, dont l’extraction et la transformation sont énergivores et sources de pollutions. Il faut une tonne de roche pour extraire 2 à 3 g de platine ! Seuls quelques fabricants d’objets de luxe, comme Cartier, ont obtenu la certification éthique de l’ONG Council for Responsible Jewellery Practices (2). Reste l’acier inoxydable ou le plastique. Ce dernier gagne sur les émissions de gaz à effet de serre : la fabrication d’un kg de PVC produit 3,3 kg de CO2 eq. contre 4,5 kg de CO2 eq. pour un kg d’acier inoxydable, selon l’Ademe, l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie.

Fabrication : avantage au produit suisse

Après l’extraction des matières premières, l’assemblage de la montre représente le maillon le plus polluant de la production, d’après l’étude d’un universitaire suisse (3). Où est-il réalisé ? Sur les 13 millions de montres vendues en France l’an dernier, les trois quarts provenaient de Chine. Pour alléger l’impact environnemental, on préfèrera un produit français ou suisse. Plus courant, ce dernier se reconnaît au label « Swiss made » qui n’apporte aucun bonus environnemental mais assure le respect de normes plus strictes qu’en Chine et un transport moins néfaste (assemblage et mise en boîte du mécanisme sur le sol helvète).

Energie : avantage à la montre mécanique

Apparue dans les années 1970, la montre à quartz demeure la plus répandue sur le marché, avec 80 % de la production, selon la Fédération de l’industrie horlogère suisse. Munie d’une pile bouton (une batterie au lithium ou à l’oxyde d’argent), elle est pourtant gourmande en énergie. Certes, il existe quelques modèles à énergie solaire mais, sur le plan énergétique, la montre mécanique remporte le match. On la choisit automatique, c’est-à-dire alimentée par le mouvement du poignet, ou à remontage manuel. Deux bémols s’imposent : son prix est plus élevé et sa précision serait moins bonne que celle de la montre à quartz.

Recyclage : match nul

En la matière, le retard est important. Sur le papier, il existe une filière de recyclage des piles grâce aux éco-organismes Corepile et Screlec. Mais seulement 18 tonnes de piles boutons ont été traitées en 2009 alors que 238 tonnes de pièces neuves ont été mises sur le marché, d’après l’Ademe. Quant à l’essentiel de l’accessoire, c’est au bon vouloir des fabricants. Eux avancent que les montres restent dans les placards, valeur affective oblige. —

L’heure du Bilan a sonné

Pour limiter les dégâts, on achète une montre mécanique en plastique. Si on est à cheval sur la précision, on la choisit à énergie solaire. Et en attendant le modèle de nos rêves écolos, on peut aussi demander l’heure à son voisin, comme le font les 10 % de Français qui n’ont pas de montre.

(1) Peu d’études ont été menées sur le sujet. Le WWF a toutefois classé, en 2007, les dix plus grands groupes du luxe, tous produits confondus, selon leurs performances sociales et environnementales. Swatch arrive à la 6e place.

(2) La certification en détail et la liste des fabricants certifiés à cette adresse

(3) « La gestion environnementale d’entreprise : Etat des lieux et perspectives de l’horlogerie de luxe en Suisse », Sven Aubert, Université de Lausanne, 2009.