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Pétrole cher : qui va régler la douloureuse ?
mardi, 1er mars 2011 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

Le pétrole pas cher, c’est fini. Les experts le disent. Mais qui va en payer le prix fort ? Les compagnies aériennes, sans doute. Mais aussi quelques Etats très dépendants de l’or noir. Pendant que d’autres s’en mettront plein les fouilles.

Le pétrole grimpe. Boosté par la chute de la production en Libye, le baril de Brent s’échangeait ce mardi à 112 dollars (81 euros) sur le marché de Londres. Une mauvaise passe causée par les révolutions arabes ? Morgan Stanley semble en douter. Dans un document publié en novembre 2010, la banque d’investissement estime que la demande en or noir devrait atteindre 88,5 millions de barils par jour, porté par les pays émergents, Chine et Inde en tête. Du coup, dès 2013, finis les surplus égarés dans le système. Le marché devrait fonctionner à flux tendu : tout ce qui sera produit sera consommé, voire davantage si l’on en croit le graphique de Morgan Stanley.

Les Saoudiens devraient peiner à répondre à l’offre très rapidement. Et plus encore, si l’on n’estime qu’ils gonflent leurs chiffres. L’hypothèse, évoquée par un diplomate américain en poste à Riyad, a fuité sur Wikileaks avant d’être reprise par le quotidien britannique The Guardian. A en croire l’échange entre le diplomate et Washington, les réserves du royaume pourraient avoir été artificiellement gonflées de près de 40%. Jim Rogers, président d’une holding américaine opine sur Bloomberg. Non, « les Saoudiens ne peuvent pas compenser l’insuffisance de la production libyenne. Ils ont dit dans le passé qu’ils pouvaient augmenter la production, mais ils ne peuvent pas ».

Alors qui va payer la facture engendrée par l’augmentation du prix du baril ? Certains tremblent déjà. C’est le cas de l’Association internationale du transport aérien (IATA). Certes, le nombre des passagers continue de progresser : +8,2% en janvier dernier par rapport à l’année précédente, souligne un communiqué. Mais le groupement d’industriels regarde les événements du Moyen-Orient d’un mauvais œil. « A chaque dollar d’augmentation, l’industrie doit compenser 1,6 milliard de dollars [1,2 milliard d’euros] de coûts additionnels », souligne Iata. Or, les compagnies affichent un profit de « seulement » 9,1 milliards de dollars (6,6 milliards d’euros) et une marge de 1,5%. « Même avec les bonnes nouvelles concernant l’augmentation du trafic, 2011 s’annonce comme une année difficile pour les compagnies aériennes », a déclaré Giovanni Bisignani, PDG de Iata.

La Russie : très gourmande en énergie

Au delà des compagnies privées, les nations risquent d’encaisser la douloureuse. Le Business insider, un site américain participatif dédié à la finance, s’est fendu d’un diaporama des pays les plus vulnérables à l’augmentation du prix du baril. En troisième position, l’Indonésie. Gros acteur sur le marché des minerais, la nation est aussi très gourmande en pétrole. Pour produire 1 million de dollars (720 millions d’euros) de PIB, l’économie a besoin d’avaler 817 tonnes de liquide noir. Pire encore : le Vietnam. Dans ce pays fortement industrialisé et dopé par une forte croissance, il faut 1 062 tonnes de pétrole pour produire un million de dollars de PIB. A la première place du classement, on trouve la Russie. Certes, le pays extrait du brut mais ses températures extrêmes et l’étendue de son territoire le rende très gourmand en énergie. Résultat : pour qu’elle fonctionne 1952 tonnes de pétrole doivent couler dans les veines de l’économie russe.

Mais pendant que certains pensent à se serrer la ceinture, d’autres prévoient déjà de s’en mettre plein les fouilles, raconte encore le Business Insider. Parmi eux, l’Arabie Saoudite qui peut afficher un PIB à 519 milliards de dollars quand le baril atteint 100 dollars (contre 376 à 60 dollars le baril, soit une augmentation de près de 38%), l’Iran (+18,7% de PIB) ou encore les Emirats arabes Unis (+18,3%).

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