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Les mules d’Afrique
mercredi, 9 novembre 2005
/ Toad
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/ Sylviane Bourgeteau
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Produire, transformer la coca, c’est bien, encore faut-il la transporter. Ceux qu’on les appelle "les mules" s’en chargent. Ambiance salaire de la peur.
Ils ont fui le Nigeria et la répression avec leurs parents alors qu’ils n’étaient que petits garçons. Jamais ils ne se sont séparés, ni sur les bancs du lycée à Dakar, ni pour faire des bêtises ou fumer leur premier joint. Gidéon, l’aîné de Ben, a toujours été plus tête brûlée, cumulant les boulots pour finir petit dealer d’herbe. C’est lui aussi qui le premier a accepté de faire la mule pour rapporter de la cocaïne de Colombie.Pour le "big boss", un narcotrafiquant d’origine nigériane.
Après la première livraison, son niveau de vie a changé. Son frère Ben a suivi le même chemin, comme une vingtaine d’autres recrutés par le Big Boss. Un séjour en Amérique du Sud et un pactole de 3 000 euros ne se refusent pas.
Pas d’alternative, il faut masser la mule, lui malaxer l’estomac, la poitrine puis les intestins et faire graduellement descendre les capsules. En quelques heures, Gidéon en a gobées 120. Plus d’un kilo de cocaïne. Dans la soirée, les hommes sont conduits à l’aéroport. Des membres des douanes et de la police, soudoyés, laissent passer le groupe. Direction l’Afrique. Les passagers doivent changer à Rio, puis au Cap-Vert avant de poser le pied à Dakar.
Pour ralentir leur transit intestinal et ne pas risquer d’expulser des capsules, ils doivent prendre des médicaments et éviter de manger pour ne pas sécréter trop de sucs intestinaux, qui provoqueraient l’overdose. 8 à 10 grammes de cocaïne pure à 98% subitement lâchés dans l’organisme déclencheraient une mort assurée. Ce que les mules redoutent le plus.
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