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Matières en voie d’extinction
mercredi, 26 janvier 2011 / Karen Bastien /

Rédactrice en chef du magazine et des éditions papier de "Terra eco"

Palladium, zinc, étain, or, argent, cuivre, uranium, platine… C’est la panique sur les minerais dont les réserves s’épuisent. Cette pénurie pourrait affecter toute l’économie et notre vie.

Quel âge avez-vous ? La vingtaine ? Vous verrez peut-être la fin de l’uranium. La quarantaine ? Vous vivrez l’extinction du nickel et de l’étain ? La soixantaine ? Vous découvrirez une vie sans plomb ni zinc. Le scénario dessiné dans les infographies ci-dessus est basé sur les estimations de l’US Geological Survey, référence mondiale des sciences de la terre. Il projette les estimations des réserves de ces matières et les compare à leur niveau de consommation actuelle. Industrie, électronique, informatique, télécommunications, énergie, agriculture… Tous les pans de l’économie – et de notre vie quotidienne – pourraient, à terme, souffrir de ces pénuries de matières. Certains pays producteurs se frottent les mains, d’autres cherchent des parades. Etat des lieux d’un monde qui découvre que la Terre n’est pas une mine sans fond.

Comment en est-on arrivé là ?

Au cœur de nombreux équipements technologiques – téléphone, ordinateur, aéronautique, automobile… –, ces matières ont connu une exploitation exponentielle ces dernières décennies. Dans les pays occidentaux, la demande s’est nourrie du boom de l’équipement des ménages et de la réduction de la durée de vie de ces objets : un ordinateur « vivait » six ans en moyenne en 1997, deux ans seulement en 2005. De leur côté, les pays émergents, en changeant de mode de vie et de consommation, ont exercé une pression supplémentaire sur ces ressources. Enfin, dernier coup de massue : les technologies vertes – panneaux photovoltaïques, éoliennes, batteries de moteurs électriques, pots catalytiques… – sont, paradoxalement, extrêmement gourmandes en minerais.

Peut-on se fier aux projections ?

C’est LA question qui agite les spécialistes. Pour Lluís Fontboté, responsable du groupe des gisements métallifères à la section des sciences de la terre de l’université de Genève (1), l’annonce d’un « pic minier » reste « totalement erronée ». Car selon lui, ces réserves alarmistes « reflètent en réalité les limites des mesures effectuées par les compagnies minières. Cotées en Bourse, ces sociétés n’ont aucun intérêt à dépenser des dizaines ou centaines de millions de dollars en forages et études géologiques, simplement pour prouver l’existence de réserves plus profondes, moins accessibles, qui seront extraites dans plusieurs décennies ». Plusieurs experts pensent ainsi que la hausse des cours va favoriser la reprise de l’exploration de sites dans le monde.

Des alternatives sont-elles en cours ?

Dans son rapport « Les 14 matières critiques pour l’Europe », l’Union insiste fortement sur le recyclage pour tenter de sortir de ce piège. D’autres pays, comme le Japon, se sont lancés dans la recherche et développement. Ainsi, l’université de Tokyo serait sur la voie d’un matériau alternatif au palladium. —

(1) Interview dans Le Temps du 21 juillet 2009.


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