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Climat : quand la politique devient sceptique
vendredi, 7 janvier 2011 / Yves Mathieu /

Yves Mathieu est directeur de Missions Publiques, spécialisée dans l’accompagnement de programmes de démocratie participative et d’amélioration des politiques publiques . Il est depuis janvier 2007 volontaire dans l’organisation The Climate Project fondée par Al Gore.

Etats pétroliers, pays producteurs de charbon, industriels : tous font comme si le changement climatique n’était pas déjà en marche. Pourtant, il faut réagir vite.

Le camp des sceptiques s’est profondément modifié : il n’est plus du côté des climato-sceptiques, il est du côté des politico-sceptiques. L’année 2010 a été l’année la plus chaude enregistrée depuis la révolution industrielle. Les catastrophes climatiques ont été des prémices de ce que les scientifiques nous annoncent pour la fin du siècle. Nous sommes indiscutablement sur la bonne trajectoire pour atteindre les +4°C d’ici 2100, et nous commençons à déguster ce que cela signifie dans nos vies quotidiennes.

Mais on voit bien que le scepticisme touche de plein fouet la sphère politique. Après Cancún, quelles sont les chances de prendre collectivement la bonne direction pour disposer d’un accord d’ici 2012, moment où le traité de Kyoto viendra à échéance ? J’aurais tendance à dire zéro au niveau des Etats.

Le lobby des Etats pétroliers est redevenu très puissant – leurs services secrets ont lancé le « Climategate » –, les Etats producteurs de charbon comme les Etats-Unis et l’Australie, le lobby des industriels est sans contrepartie (n’oublions pas que depuis la fin 2009, la Cour suprême américaine a permis le financement sans limite des campagnes politique par les entreprises), et aucun nouveau rapport du Giec (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat) n’est attendu d’ici 2013.

Où se trouve alors la capacité d’agir ? Pour moi, elle est triple :

1/ Les villes, les régions et les Etats fédérés qui ont un intérêt politique direct à la création d’emplois générés par la production locale d’énergie (sous toutes ses formes, y compris alimentaire), par le développement de l’agriculture et des filières de proximité et et par la recherche d’économies et d’efficacité énergétique. Chaque litre ou chaque kilo de carburant fossile qui n’est pas consommé ou qui est remplacé par une source locale, et chaque calorie alimentaire produite localement, chaque photon capté utilement sur leur territoire contribue à la création nette d’emplois locaux et de nouvelles filières économiques.

2/ Les filières du bâtiment, de l’énergie renouvelable, de la consommation de proximité et du traitement local des déchets disposent d’un potentiel de développement à deux chiffres sur les vingt prochaines années si elles s’engagent pleinement dans l’offre de services nouveaux aux particuliers et aux acteurs des territoires.

3/ Les citoyens actifs et activés, le mouvement associatif et l’économie solidaire qui ont des capacités de conscientisation et d’action qui, additionnées, souvent dépassent celles des gouvernements nationaux.

Mon pari ? Qu’on ait diminué de 30% à 40% les émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2025 sur la planète par la combinaison de l’action de ces trois acteurs.