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L’écologie a son directeur de collection
vendredi, 1er octobre 2010 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

Depuis quarante ans, Roland de Miller collectionne livres et revues sur l’écologie. A la tête d’une bibliothèque de 60 000 références, il cherche aujourd’hui un toit pour ses bouquins.

« Je suis entré en écologie comme on entre en religion. Corps et âme. » C’est ainsi que Roland de Miller débute la conversation. Ecrivain et chercheur, l’homme est à la tête de la bibliothèque de l’écologie soit « près de 60 000 ouvrages, d’un millier de collections de périodiques et de volumes gigantesques d’archives uniques en France », détaille-t-il. Des bouquins sur la nature mais aussi sur la santé, la géographie, la philosophie. « Tout ce qui concerne de près ou de loin l’écologie », résume-t-il. Une collection gigantesque aujourd’hui remisée dans un hangar, au fond de cartons.

La passion de Roland de Miller a pointé son nez il y a des lustres. « Dès l’âge de 16 ans, j’étais engagé dans la protection de la nature , raconte-t-il. L’homme s’enrôle dans différentes associations, croise la route du naturaliste Théodore Monod, fréquente les congrès. En 1970, il pose ses valises au service de conservation de la nature du muséum d’Histoire naturelle. « C’est là que j’ai fait mes premières armes en tant que documentaliste », se souvient-il. Avant de devenir secrétaire personnel d’un autre naturaliste et écrivain, Robert Hainard, qu’il suit entre Paris et Genève pendant quinze ans.

« La bibliothèque comme un conservatoire »

A mesure que passent les années, Roland de Miller amasse des ouvrages : livres envoyés par les services de presse des maisons d’édition, documentation transmise par des gens croisés en chemin, « surtout de la littérature grise à faible diffusion », précise-t-il. En 1977, il attrape le « virus du livre d’occasion », s’attarde devant les stands des bouquinistes parisiens. « Dans les livres anciens, il y a plus de sagesse. En fait, on se rend compte que les modernes ont tout repompé. » Il acquiert des œuvres rares. Comme ce Cosmos d’Alexandre von Humboldt, un essai du XIXe siècle, dont il détient l’unique édition française en quatre volumes. « J’ai conçu la bibliothèque comme un conservatoire. Beaucoup de gens jettent des livres, même anciens, parce qu’ils les considèrent comme des ouvrages mineurs. Mais simplement parce qu’ils existent, ils méritent d’être consultés. »

Au fil des ans, Roland de Miller se mue en écureuil et sa maison en réserve à grains. « Peu à peu, c’est devenu encombrant. Les gens avec qui je vivais supportaient mal cet envahissement de piles de bouquins. J’ai décidé d’installer une bibliothèque à la campagne. » Roland lève donc le camp et part pour Sisteron (Alpes-de-Haute-Provence), en Provence. Pour gagner sa croûte, il vend… des livres sur l’écologie. Moins précieux ceux-là. La librairie de l’écologie est née. Soit 9 000 références dont il fait la promotion dans les foires et salons du pays.

Quatre murs et des étagères ne peuvent suffire

Mais de bibliothèque point. Pendant qu’il écume les salons, ses livres se couvrent de poussière. En 2002, le maire de Gap (Hautes-Alpes) lui demande de faire escale chez lui. Pendant deux ans et demi, Roland de Miller est salarié de la mairie. Quelques visiteurs se succèdent, pas très nombreux. Quelques chercheurs aussi. Puis les relations avec la municipalité s’étiolent et la ville change de maire. En 2009, la bibliothèque doit plier bagage et va s’entasser dans un hangar de stockage. Elle n’est aujourd’hui plus visible.

Pourtant Roland de Miller ne manque pas d’ambition. Pour ses livres chéris, quatre murs froids et des étagères ne pourraient suffire. « Il faut que la bibliothèque soit intégrée dans un projet culturel plus vaste, souligne-t-il. Un lieu où il y ait aussi une salle de lecture, d’exposition, de conférence, des animations et qu’on fasse de la promotion en France et à l’étranger. » « Une fois un fonctionnaire m’a dit “vous aurez deux personnes mais pas sept”. Mais il faut mettre ça en rapport avec la masse de documentation. Moi, je demande des moyens conséquents. A notre époque, si on n’est pas prêt à investir dans des emplois écologiques et culturels, c’est ridicule. », conclut-il.

- Le site (pas encore à jour) de la bibliothèque de l’écologie


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