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Paulette, 74 ans : « Je suis loin d’avoir assez de trimestres »
mardi, 25 mai 2010 / Karine Le Loët /

Rédactrice en chef à « Terra eco ».

Alors que le gouvernement engage sa réforme, Terra eco part à la rencontre des « petites retraites ». Mère de trois enfants, Paulette a peu travaillé. Aujourd’hui séparée de son mari, elle touche le minimum retraite. Comment s’en sort-elle ? En faisant très attention et grâce à l’aide de ses enfants. Témoignage.

9 heures du matin. Devant le local des Petits frères des pauvres à Champigny-sur-Marne, il fait déjà une chaleur étouffante. Paulette, bénévole depuis deux ans, fume une cigarette. « Je crois que la vie m’a quand même donné beaucoup de choses. Je me dis qu’il faut que je rende ça aujourd’hui », confie-t-elle. Paulette a l’accent du Sud et la peau tannée par le soleil. A 74 ans, elle vit avec le revenu minimum vieillesse, soit environ 709 euros par mois. Simplement parce que Paulette, mère de trois enfants et longtemps femme au foyer, a peu ou pas travaillé. Pourtant, elle a commencé tôt le turbin. A la mort de son père, alors qu’elle a quinze ans, sa mère l’enrôle dans le commerce familial, en Algérie. Premier boulot mais pas de points retraite. « Je n’étais pas une employée, j’étais la fille du patron et c’est tout. Quand j’ai demandé ma retraite, j’ai marqué cette expérience sur la fiche. On m’a répondu que les patrons de ce commerce n’avaient jamais fait de déclaration », souligne-t-elle.

En 1961, Paulette débarque en France avec sa mère. Elle a 25 ans et « un bébé dans le ventre ». Pendant que sa mère déprime, bouleversée par le changement de décor, Paulette se met à travailler chez Flammarion. Avant de filer vers le Sud pour faire des ménages dans une famille de médecins et travailler dans un hôtel. Cinq ans de labeur en discontinu. Rien ou presque en points retraite.

Arrivée à Marseille pour trouver du boulot, Paulette rencontre son mari, cadre dans un cabinet d’architecte. Et met fin à ses velléités de carrière. Elle a trente ans. « Mon mari avait une mentalité très méditerranéenne, soupire Paulette Chez nous, les femmes, elles travaillent pas, il disait ». Elle élève son aîné et ses jumeaux, joue les femmes au foyer.

Vingt ans plus tard, elle se remet à travailler : quelques menus travaux dans les différentes affaires de son fils. Avant de renoncer, usée par un gros mal de dos et la fatigue. « En tout et pour tout, je suis loin d’avoir assez de trimestres. Du coup, j’ai le minimum. » 709 euros de pension auxquels il faut soustraire l’assurance et l’électricité, les impôts d’un petit studio qu’elle conserve encore à Marseille.

Mais Paulette sait faire des économies. « J’ai appris avec mes parents. » Jamais de cinéma, ni de théâtre. Quelques vêtements, achetés d’occasion sur les marchés. De la nourriture bien choisie. « Les pêches ? Je prends toujours les petites et pas les grosses, qui sont trop chères. L’autre fois j’ai quand même vu des cerises à 5,50 euros le kilos. Je me suis dit : “Paulette c’est un caprice”. Mais j’en ai quand même acheté 100 grammes. Et c’était drôlement bon… » « Je ne suis jamais à découvert », ajoute encore fièrement Paulette.

Son équilibre financier, elle le doit surtout à ses trois enfants. Qui se cotisent pour compléter sa maigre retraite chaque mois ou lui payer les courses de la semaine. Qui l’envoient en vacances aussi. Les années précédentes, ce fut la Tunisie et le Maroc. Cette année c’était l’Indonésie où son fils se fait construire une maison. « Je suis très entourée par mes enfants », sourit simplement Paulette.

Cliquez ici pour écouter le témoignage de Paulette (1 min 41 sec)

MP3 - 1.9 Mo

LE PORTE-MONNAIE DE PAULETTE

- Retraite : 709 euros
- Loyer : 420 euros (APL déduits)
- Son petit « luxe » : des vacances annuelles payées par ses enfants.

Retrouvez le palmarès des plus petites retraites de France ici


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