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Desertec réussira-t-il à exploiter l’énergie du désert ?
jeudi, 19 janvier 2012
/ Novethic / Le média expert du développement durable |
La « Révolution du solaire » est en marche, mais beaucoup de questions se posent sur la viabilité du projet.
En moins de six heures, les zones désertiques du globe reçoivent la quantité d’énergie que l’humanité consomme en une année. Rien qu’en utilisant 0,3% des surfaces désertiques de la région sud méditerranéenne pour installer des champs de collecteurs solaires, on pourrait ainsi satisfaire à l’augmentation des besoins en électricité et eau douce de ces pays et de l’Europe. C’est sur la base de ces résultats, publiés à la fin des années 1980 par le Centre allemand de recherche aérospatiale (DLR), que s’est en partie monté le projet Desertec. Une utopie, un pari un peu fou pour certains. Mais qui commence aujourd’hui à prendre corps avec le projet pilote de Ouarzazate, au Maroc.
Sans compter qu’il reste l’un des plus stables du Maghreb et qu’il est le seul a être relié à l’Europe via 2 câbles marins, un atout de poids pour tester l’exportation du courant vers l’Europe qui doit, en 2050, consommer quelque 15% de l’électricité produite par le projet Desertec pour en assurer la rentabilité. Mais déjà le « projet de référence » comme le qualifie Francis Petitjean, est confronté à des difficultés que l’on ne soupçonnait pas à l’origine : la défection de l’allemand Solar Millenium, l’un des industriels du consortium, qui a annoncé sa faillite le 5 janvier dernier…De quoi affecter le calendrier ?
« Le calcul viendra à partir du moment où les énergies fossiles et nucléaires seront évaluées à leur juste prix, veut croire Francis Petitjean. En Italie, le photovoltaïque atteindra la parité réseau vers 2013 et en France, ce sera vers 2017. La technologie des centrales solaires thermodynamiques (CSP) va progressivement baisser. » La Desertec Industrial Initiative table ainsi sur le fait que les économies d’échelle et autres permettront de faire baisser le coût de production de 16/30 centimes d’euros aujourd’hui à 4/5 centimes d’euros en 2040.
Pour Francis Petitjean d’ailleurs, le printemps arabe est « une chance ». « Même si nous avons perdu quelques mois, il faut replacer les choses dans le contexte d’un projet qui s’étale sur quarante ans. Et nous préférons parler à des démocraties plutôt qu’à des dictatures », tient à préciser le cofondateur de Desertec. L’occasion aussi pour lui de dénoncer les accusations de manque de concertation avec les pays du Maghreb et du Machreck voire de « néocolonialisme ». « L’électricité produite bénéficiera en premier lieu aux pays producteurs et nous insistons bien sur la dimension gagnant-gagnant du projet qui devra notamment permettre l’industrialisation de l’Afrique du nord avec la création à terme de centaines de milliers d’emplois et le transfert du savoir-faire », souligne Francis Petitjean.
Reste aussi à résoudre « l’équation environnementale », comme l’appelle Bearing Point. Car si le solaire thermodynamique (1) – la solution non unique mais privilégiée du projet - émet très peu de carbone, « cette technologie nécessite deux à trois fois plus d’eau qu’une centrale à charbon » pour le système de refroidissement, prévient BearingPoint. Ce qui est plus que problématique dans une région telle que le Sahara… « Nous ne pourrons pas nous passer d’eau pour nettoyer les miroirs ainsi que les panneaux photovoltaïques, reconnaît Francis Petitjean. Cependant, la technologie que nous testons au Maroc utilisera un système de refroidissement à sec. Certes, il est plus cher et moins performant mais nous investissons beaucoup dans la recherche sur ce système, ainsi que sur les installations de dessalement qui pourraient en plus produire de l’eau pure pour les populations. » Autant de points qui font du parc de Ouarzazate un projet-test dont les résultats sont particulièrement attendus.
(1) Le solaire thermodynamique se décompose en plusieurs technologies (miroirs paraboliques, centrales à tours solaires, etc). Le rayonnement solaire est concentré grâce à des miroirs pour faire chauffer un liquide calorifuge. Celui-ci, porté à près de 400°C est destiné à alimenter une turbine thermique qui produit de l’électricité.
Cet article de Béatrice Héraud a été initialement publié le 13 janvier 2012 sur Novethic, le média expert du développement durable.
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