Copenhague a t-il le pouvoir de redistribuer les cartes dans le monde des ONG chnoises ? Le 17 novembre dernier, au terme d’un travail de consultation de la société civile entamé en deux ans plus tôt, 8 ONG dont Greenpeace Chine et Global Village Beijing, regroupées en une "Société civile chinoise sur le changement climatique", ont publié leurs recommandations en 12 points. Les six premiers à l’intention des négociateurs de Copenhague, les autres servant de guide d’action pour les politiques nationales.
La démarche est relativement inédite pour la Chine, où les ONG ne sont pas vues du meilleur œil. Certes, les recommandations effectuées vont dans le sens de la politique menée par Pékin, mais on y trouve aussi une invitation à "encourager le public et les ONG à participer au processus d’élaboration des décisions politiques et à contrôler l’application des lois", ce qui est déjà plus audacieux. Pour ces 8 ONG, il s’agit moins de peser sur les politiques centrales, que de faire naitre un débat public dans la population, peu familière, jusqu’à récemment, de ces thématiques. C’est l’argument d’un article du South China Morning Post,, selon lequel Copenhague a permis de faire sortir la question du changement climatique du cercle scientifique où il se trouvait confiné. Alors que leur audience n’était pas très forte, les ONG vertes se sont retrouvées propulsées en 2009 sur le devant de la scène médiatique.
Signe de l’intérêt croissant de la société chinoise, vingt d’entre elles ont envoyé un délégué à Copenhague, ainsi que cinquante organes de presse. Résultat de plusieurs mois de lobbying vert, à la veille du sommet, les Chinois semblaient avoir pris conscience de l’enjeu des débats, en particulier les jeunes, dont les plus actifs se sont mobilisés pour envoyer 40 étudiants à Copenhague. Selon un récent sondage réalisé par la Banque mondiale, 70% des Chinois se disent aujourd’hui prêts à payer plus cher l’énergie qu’ils consomment pour lutter contre le réchauffement. Reste que le changement climatique ne constitue pas encore la préoccupation numéro 1 des Chinois. Selon le même sondage de la Banque mondiale, seuls 3 Chinois sur 10 estiment que c’est un « problème sérieux », dans un pays sujet de multiples et graves problèmes environnementaux.
Campagnes d’envergure
Si l’arrivée de Copenhague a focalisé l’attention sur la question climatique et le discours des ONG, elle a aussi accentué la pression internationale sur la Chine, autre sujet de réflexion, même si les positions défendues dans les journaux reflètent surtout la voix officielle. "Pour un sujet aussi lourd que le changement climatique, il est assez difficile pour des ONG d’offrir un point de vue indépendant", confiait Liang Xiaoyan, fondateur de Friends of Nature, au SCMP.Au fil des années, le poids des ONG vertes s’est légèrement accru. Leur nombre est d’abord passé de quelques dizaines il y a 10 ans à plus de 3 500 fin 2008. Elles ont également élargi leur domaine d’action et mené des campagnes d’envergure qui ont accru leur légitimité aux yeux du public, comme par exemple la lutte contre les barrages sur le fleuve Nu. En mai 2008, une réglementation a par ailleurs favorisé la transparence de l’information gouvernementale, élément majeur sur lequel les ONG peuvent désormais s’appuyer pour mener à bien leurs combats. Mais les choses prennent du temps. Selon He Ping, président du Fond international pour l’environnement en Chine, ONG basée à Washington, il faudra encore quelques années pour que les ONG s’emparent réellement de leurs nouveaux droits. Par ailleurs, elles sont encore souvent entravées dans leur action, et leurs moyens humains et financiers restent malgré tout limités. Ainsi, les plus grosses ONG ne dépassent pas les 10 000 membres et les plus nanties n’ont pas plus d’un million de dollars dans leurs coffres.
A l’avenir, les choses pourraient encore évoluer. Pékin s’étant engagé à réduire son intensité carbone, les ONG ont une mission toute tracée d’éducation et de sensibilisation de la population. Copenhague aura aussi servi à ça.
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