Terra eco : que pensez-vous de cette décision chinoise ?
Jean-Louis Borloo : "En décembre, nous avions décidé avec le Paquet climat-énergie européen de réduire de 20 à 30% les émissions de gaz à effet de serre en 2020 par rapport à 1990. Comme à 27 c’était déjà difficile, nous avons pensé qu’il y avait un risque pour Copenhague et depuis, nous sommes allés voir tous les pays du monde pour essayer de comprendre les inquiétudes de chacun."
"La position chinoise est évidemment très importante, il faut que la Chine soit dans le mouvement, mais pas de la même manière que les pays sous Protocole de Kyoto ou industrialisés. Pour les grands émergents, la question n’est pas la réduction de leurs émissions aujourd’hui, parce qu’ils ont encore un besoin de croissance, mais c’est la réduction de l’intensité de leur croissance."
"Le 22 septembre à l’ONU, Hu Jintao a fait un geste très significatif indiquant que la Chine réduirait l’intensité carbone de sa croissance. Aujourd’hui, le vice- premier ministre Li Keqiang nous a annoncé une réduction en 2020 de 40 à 45 % de l’intensité carbone du point de croissance versus 2005, ce qui est une étape complémentaire très significative de la Chine."
Cette décision va t-elle assez loin selon vous ?
"La Chine, par habitant, représente 4,4 tonnes de CO2 émis, l’Union européenne c’est près de 12 et les États-Unis c’est 23,5. L’objectif commun en 2050 c’est un moyenne de 2 tonnes par habitant. On peut toujours faire mieux que décarboner de 45%, mais le tout est de savoir à quel moment un grand émergent comme la Chine va continuer à augmenter puis va réussir à maitriser ses émissions en réduisant l’intensité carbone de sa croissance pour arriver à 2 tonnes en 2050. Pour l’instant l’effort principal doit porter sur les pays industrialisés. Par ailleurs pour son prochain plan quinquennal, la Chine va annoncer des mesures extrêmement fortes de réduction de l’intensité carbone par secteur."
Est-ce qu’il y a encore des marges de négociation avec la présence d’Obama à Copenhague ?
"Il sera là le 9 décembre et les discussions se tiendront les 17 et 18, mais je ne désespère pas qu’il soit là aussi les 17 et 18. Si on considère que Copenhague est un succès parce que l’intégralité des modalités contraignantes y serait arrêtée, ce n’est pas la peine d’y aller. Un bon accord doit être précis pays par pays dans les pays industrialisés au titre de la réduction, avec des objectifs intermédiaires en 2020, 2030, 2040 et 2050. il doit être précis sur les financements publics internationaux pour les pays très vulnérables et précis sur la réduction de l’intensité carbone, donc le pic, pour les grands émergents. Il n’y a pas de raison de différer des prises de décision politiques et précises à Copenhague."
Est-ce que la France et la Chine se comprennent bien sur ces questions ?
"Oui parce que ce sont deux pays qui ont clairement en tête que la réduction des gaz à effet de serre n’est pas un fardeau mais un axe stratégique de compétition de demain. Je suis convaincu que la compétition par les bas coûts a une limite en Chine, en revanche devenir les leaders mondiaux de l’économie sobre, c’est un axe stratégique majeur. Je pense que nous voyons les choses de la même manière."
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