Les pompiers ne sont pas des ânes. Ce serait même l’inverse : Nicolas Turiaf, volontaire dans les Alpes-Maritimes depuis 20 ans, a fait des équidés aux grandes oreilles une arme précieuse contre les incendies. Ânestérel, l’association qu’il a créé, loue en effet des ânes qui font office de débroussailleuse, dans cette région où des milliers d’hectares partent chaque année en fumée. Le débroussaillage y est d’ailleurs obligatoire depuis 2003 dans un rayon de 50 mètres autour des habitations.
Dans les médias et sur son site, Nicolas Turiaf met en avant le côté écologique de sa méthode. On aurait pourtant tort de ne voir en Ânestérel qu’une initiative folklorique qui consisterait à remplacer les machines polluantes et bruyantes par des animaux. "Au fur et à mesure que les étés passent, j’assiste dans mon travail à de plus en plus de drames, raconte-t-il. La meilleure solution pour protéger les habitations, c’est le débroussaillage. Mais beaucoup de gens ne le font pas car c’est trop coûteux."
Difficile à supporter pour ce Niçois de 35 ans, qui est parti s’installer dans le Var il y a dix ans "pour être plus près de la nature". "Je vis en plein milieu du massif de l’Estérel, un des derniers ici qui n’est pas complètement ravagé par le feu", indique-t-il. Il a donc pensé à utiliser des animaux, moins cher que les hommes et moins polluants.
L’âne, débroussailleuse idéale
Au rayon des quadrupèdes voraces, le choix était large : chèvres, moutons, lamas etc. "J’ai retenu l’âne car il mange 80% des végétaux qui poussent dans notre région, il respecte les clôtures, il ne s’attaque pas aux arbres et il peut passer quasiment partout, là où on ne tiendrait pas debout avec une débroussailleuse", détaille-t-il. Au final, dix baudets, qui passent 12 à 16 heures par jour à manger, viennent à bout d’un hectare en une vingtaine de jours. Le couple est loué 380 euros le mois, contre plusieurs milliers d’euros par hectare pour un débroussaillage classique.Et puis l’âne c’est un peu Bourriquet, l’ami des enfants. "C’est le petit côté en plus. A Nice, dans une copropriété de 200 logements, cela a rapproché les gens. La plupart nous ont dit qu’ils ne connaissaient même pas leur voisins de palier", se réjouit-il.
"Au début j’ai fait rire tout le monde"
Après un an et demi, son association possède 17 ânes, tous loués actuellement, et l’idée est prise au sérieux. "Au début, c’était le grand sourire à la caserne, j’ai un peu amusé tout le monde. Maintenant, tous les membres de l’association qui m’aident sont des pompiers", se réjouit-il. Mais il est loin de s’en satisfaire : son objectif, c’est surtout de convaincre les communes. Le week-end du 20 juin dernier, Marseille a connu à elle seule 70 départs de feux, dont certains ont nécessité l’évacuation d’écoles. "Je ne comprends pas pourquoi une mairie comme celle là ne peut pas acquérir dix ânes", soupire Nicolas Turiaf.De temps à autre, il quitte sa retraite varoise pour conseiller des éleveurs qui souhaitent proposer le même type de service. "Mon but, c’est que cela se répande dans toute la France", assure-t-il. Le premier pas a été franchi le mois dernier avec l’élevage Boulz-ânes, situé dans les Pyrénées-Orientales.
A lire aussi dans Terra eco :
Profession éleveuse de tondeuses
Affichage : Voir tout | Réduire les discussions