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16-06-2009

La taxe carbone fait débat

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La taxe carbone fait débat
 
En 2007, à la veille de l'élection présidentielle, Nicolas Hulot a remis la taxe carbone au goût du jour avec son Pacte écologique. Reprise sous l'appellation de "Contribution Climat-Énergie" (CCE) dans le Grenelle de l'environnement, elle est aujourd'hui résumée dans un Livre blanc ouvert à la consultation. Si son objectif est partagé par tous (ou presque), son champ d'application, son mode de calcul et ses outils de compensation sont encore largement débattus.
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Le principe de base

Il s’agit, à travers une fiscalité incitative, de contribuer à diviser par quatre les émissions de dioxyde de carbone (CO2), principal gaz à effet de serre, à l’horizon 2050.

Que va-t-on taxer ?

Deux options apparaissent possible. Dans le Livre Blanc, le gouvernement évoque la possibilité d’une CCE qui taxerait les biens et les services en fonction de leur contenu énergétique. Celui-ci serait calculé en fonction des émissions entraînées par l’utilisation de combustibles fossiles lors de la fabrication, le transport et la consommation d’un produit ou la délivrance d’un service. La Fondation Nicolas Hulot préfère une taxe prélevée sur les consommations d’énergie (électricité, gaz, charbon, fuel, essence ou diesel...) en fonction de leur contenu en carbone. L’augmentation du prix de l’énergie devrait encourager la baisse des consommations.

Qui peut-elle concerner ?

Dans les deux cas, les particuliers, les administrations et les entreprises. Sauf que certaines entreprises sont déjà soumises au système de quotas d’émissions européen : les producteurs d’électricité et de chaleur ainsi que les industries les plus consommatrices d’énergie. Faut-il ou non les soumettre à une nouvelle taxation ? La Livre Blanc laisse aux experts le soin de trancher. Pour la Fondation Nicolas Hulot, il faut exempter les entreprises déjà soumises au système de quotas. "Plutôt que de tenter d’étendre la CCE a toutes les entreprises, nous préférons nous battre pour un renforcement du système des quotas, trop laxiste. Aujourd’hui, il est très peu contraignant pour les entreprises. Elles reçoivent les quotas gratuitement et ne sont taxées que très partiellement : sur le surplus de CO2 qu’elles émettent si jamais elles dépassent le quota", souligne Alain Grandjean, co-fondateur de Carbone 4, un cabinet d’audit et de conseil en carbone, et membre du Comité stratégique de la Fondation Nicolas Hulot.

Comment la calculera-t-on ?

Tout dépend du mode de taxe retenu. Dans le cas d’une taxation sur les produits évoqué dans le Livre Blanc, il faudra déterminer le poids en carbone de chacun de ces produits. Pour cela, il faudra inclure l’énergie utilisée pour réaliser chacune des pièces du produit, l’acheminement de ces pièces, leur transformation en usine, le transport vers les lieux de distribution et pourquoi pas, le processus recyclage une fois le produit usagé. Un véritable casse-tête pour Alain Grandjean de la Fondation Hulot. "Le calcul change terriblement d’un produit à l’autre. Le bilan carbone d’une tonne d’aluminium peut varier d’un rapport de 1 à 10 selon qu’elle est produit dans un pays utilisant du charbon et ayant une très mauvaise productivité et un autre avec des moyens de production plus efficaces. Les choses varient aussi selon les saisons. Une fraise n’a pas le même bilan carbone d’un mois à l’autre. Et puis, une entreprise peut changer ses modes de production. Si Saint-Gobain améliore ses méthodes, son m2 de vitre n’aura plus le même bilan d’une année sur l’autre ! Bref, c’est extrêmement difficile à réaliser, d’autant que nous manquons cruellement de données. Qu’une telle option soit évoquée dans le Livre Blanc pourquoi pas ? Mais il ne faut pas que les décisions durent des années parce qu’elles achoppent sur ce point. Il y a urgence à agir !". Aussi, la Fondation Nicolas Hulot, préfère-t-elle préconiser une taxe sur l’énergie, plus aisée à appliquer. Chaque fois qu’une entreprise ou un particulier achètera de l’énergie, une somme correspondant à la quantité de CO2 émise par l’énergie consommée sera prélevée. Le prix du CO2 sera fixé par avance par l’État. En 2010, ce prix devrait s’élever à 32 euros par tonne de CO2, comme le prévoit un rapport réalisé en 2008 par le Conseil d’Analyse Stratégique (CAS). Appliqué aux différentes sources, ce prix du carbone correspondra à une hausse d’environ 7 centimes du prix du litre d’essence ou de 1 centime du Kwh de gaz.

Qui percevra la taxe ?

Tout dépend là encore du mode de taxation. Une taxe sur l’énergie sera prélevée directement auprès des fournisseurs qui la reverseront à l’État. Une taxation sur les produits, quant à elle, pourrait être lisiblement ajoutée au prix de l’étiquette dans un effort de pédagogie.

Peut-elle se limiter à la France ?

Les entreprises s’inquiètent : en faisant peser une nouvelle charge sur les entreprises, la CCE risque-t-elle de plomber leur compétitivité ? Non, assurent en cœur le gouvernement et la Fondation Hulot. Car elle pourra être compensée par la baisse de certaines charges. Mieux, "avec la Contribution Climat-Énergie, la France et ses entreprises seront plus compétitives car plus économes en énergie (…) De plus, la Contribution Climat-Energie permettra de réduire la facture énergétique. (…) En réduisant la consommation de 10%, la France économiserait environ 6 milliards d’euros, qui pourraient être utilisés pour soutenir les économies d’énergie, et rendre les entreprises françaises encore plus compétitives, souligne la Fondation Nicolas Hulot. Pour autant, il ne faut pas abandonner l’idée du CCE au niveau européen permettant de réduire les émissions de gaz à effet de serre à plus grande échelle. Un chantier sur lequel la Suède, future présidente de l’UE, promet de se pencher.

Comment compenser cette nouvelle charge fiscale ?

Jean-Louis Borloo, Christine Lagarde et Michel Rocard ont tous trois insisté sur le fait que "cette taxe ne serait pas un prélèvement supplémentaire". En clair, elle ne doit pas avoir d’impact sur le pouvoir d’achat des consommateurs ou la compétitivité des entreprises. La solution ? Supprimer d’autres prélèvements comme la taxe professionnelle sur les entreprises (à l’étude en ce moment à Bercy). Pour les entreprises, la Fondation Nicolas Hulot propose la baisse d’un demi-point des cotisations sociales patronales. Du côté, des ménages on pourrait imaginer une baisse des impôts directs ou indirects. A la fondation Nicolas Hulot, on propose de redistribuer le produit de la taxe aux consommateurs sous la forme d’une "allocation universelle climat" identique pour tous les ménages (et qui s’élèverait à environ 130 euros selon les estimations). Ceux qui ont déjà fait des efforts d’économies d’énergie, ou qui ont par exemple choisi des énergies renouvelables seront donc avantagés, car ils paieront moins de Contribution Climat-Énergie mais recevront le même montant d’allocation. L’association UFC-Que choisir précise, elle, qu’il sera " nécessaire d’accorder une plus grande compensation aux ménages ruraux qui sont particulièrement captifs des déplacements routiers et dont la surtaxation serait fort injuste"."C’est un système encore peu affiné et nous sommes ouverts à toutes les suggestions pour l’améliorer, concède Alain Grandjean. Mais nous n’en sommes pas encore là. Il faut d’abord régler les premiers principes d’applications de la taxe."

Combien va-t-elle rapporter ?

Aujourd’hui, on estime que la CCE pourrait rapporter entre 8 et 12 milliards d’euros par an lors des premières années. Qui seront redistribués aux entreprises et aux particuliers par une réduction d’autres impôts comme par exemple, les charges sur le travail. Problème : "Moins on va polluer, ce qui est en soi l’objectif, moins la taxe carbone va rapporter", remarquait récemment la dirigeante socialiste Martine Aubry. Cette nouvelle ressource fiscale souffrirait donc d’abord d’un problème de pérennité.

Quelle sera son évolution ?

Concrètement, l’idée serait de partir d’un niveau assez bas, acceptable économiquement et socialement, tout en indiquant clairement que le taux est appelé à croître dans le temps avec le prix des énergies fossiles. Il faut "prévoir une imposition qui doit être faible, très faible au départ, puis de plus en plus forte", a souligné Michel Rocard dans le Nouvel Observateur.

Quel calendrier ?

"Le processus est lancé mais il prendra du temps", ont souligné début juin Jean-Louis Borloo et Michel Rocard, président de la conférence du consensus sur la contribution Climat-Énergie. Un Livre blanc sur le sujet est ouvert à la consultation jusqu’au 24 juin. Celui-ci devrait aider deux groupes d’une dizaine d’experts chacun à rédiger une trame de propositions lors d’une conférence dite "du consensus" les 2 et 3 juillet. Celle-ci sera suivie une semaine plus tard par une réunion à huis clos de personnalités qualifiées sous la direction de Michel Rocard dont pourraient sortir les premières propositions. Si tout va bien, la CCE devrait faire partie de la loi sur les Finances de 2011.

A ne pas confondre avec :

- La taxe aux frontières

Aussi baptisée taxe Cambridge (car elle trouve sa source dans une étude économique diffusée par Cambridge et le MIT). Contrairement à la CCE, nationale, elle relève cette fois-ci de la compétence de l’UE. La taxe au frontières consiste à imposer une taxe sur les importations de produits industriels en provenance des pays qui ne respecteraient pas les contraintes écologiques imposées aux entreprises européennes. Son objectif est double : éviter le dumping environnemental et encourager les pays émergents à se mettre au vert.

- Les quotas de CO2

Depuis 2005, l’UE a mis en place un système d’échange de quotas d’émission de CO2. Il concerne en premier lieu les producteurs d’électricité et de chaleur ainsi que les industries les plus consommatrices d’énergie (sidérurgie, ciment, verre, tuiles briques, papier carton, raffinage...). Les industriels doivent émettre chaque année dans la limite d’un quota alloué et peuvent si nécessaire acheter des quotas aux exploitants excédentaires. L’actuel ETS ne couvre que 40% des émissions européennes.

- La compensation carbone

Dans ce système, le climat mondial est appréhendé dans sa globalité. Un volume de gaz à effet de serre (GES) émis dans un pays peut être "compensé" par une action qui permet de réduire un volume équivalent de GES ailleurs. Une action qui peut consister par exemple à améliorer l’efficacité énergétique ou à troquer une énergie fossile pour une renouvelable...

A lire aussi dans Terra eco :
- Pour ou contre la compensation carbone ?
- Nicolas Sarkozy pour la taxe Cambridge
- Le carbone en quête d’étiquette

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