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24-02-2009
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Interview

Jean-Marc Jancovici : "C’est maintenant !" (3)

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- Concrètement, quels domaines ces mesures toucheraient-elles ?

Tout cela signifie qu’il a beaucoup de choses à faire dans le domaine du bâtiment et des infrastructures. Du coup, il va aussi falloir toucher aux métiers, et mettre des dizaines de milliards sur la table pour qu’une partie des employés urbains deviennent plombiers, maçons, forestiers, artisans vanniers, agriculteurs, éleveurs de chèvres, bref ce qu’on veut pourvu que ce ne soit pas un emploi où l’on manipule juste de l’information. Il va donc falloir changer tout le système éducatif conçu pour garantir l’université pour tous dans un monde à l’énergie facile, parce que les machines ont supprimé les emplois d’artisan, d’ouvrier et d’agriculteur. Aujourd’hui, être maçon, c’est la honte, il faut au moins avoir fait Sciences-Po ! Sauf qu’avec une énergie devenue plus difficile d’accès, il y aura de moins en moins de jobs à donner à ceux qui ont fait des études universitaires pour occuper un emploi de bureau. Et il va bien falloir qu’ils fassent autre chose. Nous proposons aussi de mettre, dans tous les endroits où se prennent des décisions, des conseillers aux affaires physiques. Ils auraient un solide bagage physique et seraient capables de dire : "nous sommes désolés, mais votre plan, il ne passe pas faute de ressources suffisantes. Il ferait faillite." C’est une réforme qui peut paraître anodine, mais qui est majeure à nos yeux.

- Tout casser, tout reconstruire, tout réduire, les politiques doivent bondir quand ils entendent des choses comme ça...

Ça dépend. Ce que nous proposons aujourd’hui peut paraître étonnant à certaines personnes, mais, quand on y réfléchit bien, nous ne faisons qu’aller au bout de la logique. Une bonne partie des gens que nous connaissons dans le monde de l’entreprise et qui s’intéressent à la question énergie-climat sont loin de nous traiter de fous. Il y a même des directeurs du développement durable de sociétés du CAC 40 qui nous disent le plus grand bien de notre livre ! Les gens qui sont les plus militants sur le sujet ne sont pas nécessairement les mieux informés. Et ceux qui sont le plus exposés dans les journaux ne sont pas nécessairement ceux qui ont les idées les plus constructives.

- Justement, venons-en à la presse. Vous égratignez largement les médias dans votre livre. Ils traitent les sujets "avec peu de recul et beaucoup d’ignorance". Sommes-nous vraiment si mauvais ?

Hélas oui, même si c’est à votre corps défendant. Il y a trop d’approximations et d’inexactitudes dans la présentation des problèmes, et le simple fait de résumer mène souvent à des inexactitudes. Ce dernier point est un problème structurel, qui demande beaucoup d’expérience et de talent pour être contourné. Nos critiques les plus fortes sont essentiellement pour les raccourcis qui induisent de terribles erreurs de jugement, comme : « on a encore quarante ans de pétrole devant nous ». Cette affirmation confond la date du maximum de production et le stock restant. Cela ne prendrait pas de place de rectifier cette erreur répandue et qui va se payer très cher puisque nous avons en pratique 35 ans de moins que ce que nous croyons pour nous préparer à un immense chambardement. La responsabilité des médias sur ce point précis est donc très forte, et elle est essentiellement le résultat d’un manque de curiosité face aux affirmations faites, et non d’un défaut d’information.

- Je n’ai pas trouvé de mention "papier recyclé" sur le livre. "L’énarque pascuan qui ne sait pas compter" que vous mettez en scène n’aurait-il pas préconisé ce type de méthode pour ne pas gaspiller la ressource bois ?

Ça dépend beaucoup de ce qui va advenir du livre. S’il est, ce que nous espérons, religieusement stocké sur une étagère pendant des siècles et des siècles, cela aura soustrait du carbone à l’atmosphère via la croissance du bois. Etre bibliophile avec des livres en papier vierge est donc contribuer utilement à retirer du carbone de l’atmosphère ! Si le livre part à l’incinérateur, cela revient au pire à remettre le carbone soustrait dans l’atmosphère. Donc c’est neutre. Et si, en plus, l’incinérateur alimente un réseau de chauffage urbain, c’est de l’énergie qui se substitue à du gaz ou du charbon, et c’est plutôt positif. Par contre, si notre œuvre part en décharge, le papier méthanise, et c’est plutôt mauvais pour le changement climatique. Enfin si tout le monde utilise du papier recyclé, il n’est plus possible de stocker le livre sur l’étagère : il faut le mettre à la poubelle pour obtenir le papier à recycler ! Vous voyez, c’est un très bon exemple du fait que les choses ne sont jamais très simples et qu’il n’y a pas de solutions presse-bouton.
Sources de cet article

Recueilli le 5 février par Louise Allavoine

"C’est maintenant !" Éditions du Seuil, 279 p. 19,50 €

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