WWF Belgique : "Les décideurs doivent agir"

Pourquoi publier cette "contre-synthèse" ?

Les discussions des différents volets en février à Paris, en avril à Bruxelles et en mai à Bangkok ont abouti à des différences importantes entre les rapports techniques émis par les groupes de travail et les résumés négociés par les gouvernements. Même si les négociateurs ne peuvent pas modifier les conclusions des scientifiques, ce sont eux qui font le sommaire. Dans les précédentes synthèses des éléments importants ont été omis. Nous craignions que la même chose se produise en Espagne. Or, cette synthèse doit être un signal fort. La situation est urgente mais pas catastrophique. Il est encore temps de dégager des solutions pour diminuer de façon ambitieuse nos émissions de gaz à effet de serre. Les décideurs doivent agir.

Pour quelles "raisons politiques" les gouvernements "édulcorent" les rapports du Giec ?

Ce sont essentiellement des craintes économiques. Les gouvernements redoutent que des mesures visant à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre leur coûtent trop cher ou freinent leur croissance. Aujourd’hui, il n’y a pas ou peu de dirigeants internationaux qui doutent encore de la réalité du réchauffement climatique. Mais, ils s’inquiètent du montant de la facture. Seulement, il faut qu’ils comprennent qu’investir dans des techniques propres dès maintenant coûtera beaucoup moins cher que les conséquences du réchauffement climatique. En 2006, le rapport Stern a établi qu’il pourrait avoir des répercussions économiques aussi dévastatrices que les deux guerres mondiales ou la crise de 1929 si l’on ne fait rien pour l’endiguer. Lutter contre le changement climatique nécessite d’avoir une vision sur le long terme. Les gouvernants ont des vues à court terme, basées sur la durée d’un mandat électoral. C’est là toute la difficulté.

À qui pensez-vous quand vous dîtes que le Giec subit des pressions ?

Le WWF est un observateur extérieur, nous ne sommes pas dans le secret de négociations qui se déroulent à huis clos. Au-delà des pressions, ce sont les intérêts divergents des pays qui posent problème. Les Etats-Unis s’inquiètent de leur croissance. L’Arabie Saoudite veut vendre son pétrole. La Chine veut qu’on reconnaisse la responsabilité des occidentaux... etc. Et pendant ce temps, les émissions augmentent. On ne peut pas continuer comme ça. Dans le cas des Etats-Unis, s’ils attendent un changement de gouvernement pour agir, il sera trop tard. L’après Kyoto doit être prêt dès 2009. Pour nous, c’est la deadline.

Qu’attendez-vous du sommet de Bali ?

Il est important qu’un objectif de 50 à 85 % de réduction des émissions de gaz à effet de serre d’ici à 2050 soit posé. Bali doit aussi insister sur la déforestation qui est responsable d’une importante partie des émissions anthropiques (à origine humaine). La biodiversité est un autre enjeu important. Des mesures doivent être prises sur le transport international aérien et maritime qui, jusqu’ici, n’étaient pas inclus dans le protocole. Aujourd’hui, il n’y a aucune taxe sur l’utilisation du kérosène, et les émissions liées à ce secteur augmentent fortement. D’une façon générale, il faudra défendre des objectifs à long terme.