La circulation alternée est dans le collimateur de l’Automobile club association (ACA), peu contente de devoir laisser ses tutures au garage. « Dans tous les pays où cette mesure a été prise, elle n’a eu aucun effet », a déclaré Didier Bollecker, son président. Et l’association d’ « admettre que la part routière représente près de 18% des émissions de particules dans l’air » avant de se demander : « Qu’en est-il des 82% restant ? Des mesures sont-elles prises dans les secteurs résidentiels, tertiaires, industriels, agricoles, etc. (…) Une fois de plus l’automobiliste est une cible facile. » Décryptage.
La circulation alternée n’a eu aucun effet
FAUX. A court terme. Rien qu’en France, la mesure avait été testée en 1997 et avait porté ses fruits. Selon des documents d’Airparif, l’association de surveillance de la qualité de l’air en Ile-de-France, elle avait eu des effets positifs sur la pollution : on avait notamment observé des « réductions de concentrations de NOx (oxyde d’azote) pouvant atteindre sur certaines zones jusqu’à 20% ». Et ailleurs ? En Grèce et en Italie, selon le site du Figaro, cette mesure a certes « montré ses limites ». Mais si c’est le cas, c’est surtout parce que les Grecs ont appris à contourner l’interdiction en « achetant une seconde voiture dont la plaque de circulation leur permet de circuler, au final, tous les jours » ou que les Italiens se sont mis aux deux-roues.
Les autos ne sont responsables que de 18% des émissions de particules
FAUX. D’abord, l’association fait une drôle de manip’ puisqu’elle cite, en bas de page, des chiffres légèrement différents du 18% mis en avant : « La part routière dans les émissions de particules est de 14% pour les particules PM10, et 17% pour les particules PM2,5 et 1,0 », peut-on lire en note. Peut-être s’est-elle fendue d’une moyenne ? Admettons. Le Centre interprofessionnel technique d’études de la pollution atmosphérique (Citepa) donne bien grosso modo des chiffres similaires : 15% pour les PM10 émis en 2011 attribuables au transport routier, 18% pour les PM2,5. Mais il s’agit là d’une moyenne pour la France entière. Or, la circulation alternée n’a été appliquée qu’à Paris. Si l’on considère les émissions enregistrées en Ile-de-France, la part attribuable à la circulation automobile grimpe à 25% pour les PM10 et à 30% pour les PM2,5 (les plus nocives), selon les chiffres d’Airparif.
« L’automobiliste est une cible facile »
FAUX. Mais surtout, l’Automobile club oublie un détail important. « Dans l’épisode actuel de pollution, il y a eu aussi des émissions d’oxyde d’azote, souligne Laurence Rouil, responsable du pôle modélisation environnementale et décision à l’Ineris (Institut national de l’environnement industriel et des risques). Cet oxyde d’azote se combine à d’autres gaz pour former des particules secondaires. Or, le principal contributeur de l’émission d’oxyde d’azote, c’est le trafic routier ! » En clair, même si les voitures en circulation sur les routes n’émettent directement qu’une partie des particules pointées du doigt depuis une semaine, elles participent à leur création de manière indirecte. « La ligne de défense [de l’ACA] n’est donc pas recevable », estime l’experte.
« Les industriels ont été approchés pour voir s’ils pouvaient réduire leurs activités. Dans le secteur agricole, on a invité les exploitants a diminuer les épandages quand c’était possible. Car les épandages d’engrais azotés entraînent des émissions d’ammoniaque qui, avec l’oxyde d’azote, se combinent pour former des particules secondaires. Enfin, on a demandé aux citoyens de limiter le chauffage au bois », conclut Laurence Rouil.
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