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4-01-2013
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France
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Rien ne va plus ? Alors faites vos jeux…

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Rien ne va plus ? Alors faites vos jeux…
(Crédit photo : IanMurphy - flickr)
 
L'homme est un être paradoxal : c'est quand il a le moins de sous en poche qu'il en dépense le plus en jeux d'argent en tous genres. Un comportement irrationnel en temps de crise ? Pas pour les Etats, qui raflent la mise.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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L’espoir de toucher le gros lot n’est jamais aussi puissant qu’en temps de crise. Le chiffre d’affaires de la Française des jeux (FDJ), en 2012, en atteste. L’an dernier, la FDJ a vendu pour 12,1 milliards d’euros de tickets de grattage, de Loto ou de paris, à comparer avec les 11,4 milliards d’euros de 2011. Une progression de 6,1% en un an. « Les mises de jeux de loterie ont atteint 10,7 milliards d’euros de ventes (+3,7%) et les paris sportifs ont dépassé 1,4 milliard d’euros (+ 27%) », indique un communiqué de la loterie hexagonale, publié le 3 janvier.

Les résultats du PMU pour 2012, dont la publication est imminente, pourraient être tout aussi impressionnants qu’en 2011, quand l’opérateur de jeux avait pour la première fois dépassé les 10 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

La magie de la numérologie boostée par la crise

La magie des chiffres est venue entretenir cette espérance de devenir, un jour, millionnaire, avec trois vendredis 13 et plusieurs dates symboliques : 10/11/12, 12/12/12, 21/12/12 (date par ailleurs prévue pour une fin du monde… qui n’a pas eu lieu). Mais, au-delà de la seule numérologie, c’est bien la crise économique qui, paradoxalement, dope les ventes des jeux d’argent et de hasard. Et le phénomène n’est pas propre à la France. Il est mondial.

On le constate notamment en Italie, pays le plus joueur de l’Union européenne. « Selon le ministère du Trésor, le chiffre d’affaires des jeux de hasard était de 76,1 milliards d’euros en 2011 contre 61,5 milliards d’euros en 2010. Soit une augmentation de 23,9% », relève le site Myeurop.info.

« El Gordo » espagnol s’est bien gavé sur les chômeurs

En Espagne, malgré le chômage qui affecte 25% de la population, les mises pour El Gordo, jeu qui se déroule tous les 22 décembre et qui fêtait cette année ses 200 ans, se sont élevées à 73 euros par habitant ! En tout, la tombola nationale a récolté, rien que pour ce jeu, 3,6 milliards d’euros. C’est certes 8% de moins qu’en 2011, mais cela reste l’une des meilleures années du « Gros ». Avec 15 300 tickets gagnants, permettant de rafler entre 100 euros et 4 millions d’euros pour un montant total de 2,6 milliards d’euros redistribués, le rêve de richesse semblait accessible à beaucoup.

Au niveau mondial, d’après le cabinet H2 Gambling capital, les joueurs ont misé en 2012 pas moins de 321 milliards d’euros, soit 5,6% de plus que l’année précédente. A titre de comparaison, l’aide publique au développement a atteint, au niveau mondial, 102 milliards d’euros en 2011... Et le marché des jeux d’argent – dont ceux en ligne – devrait même atteindre les 351 milliards d’euros d’ici à 2015.

Les Américains, flambeurs de première

Les Américains demeurent le peuple le plus flambeur, car ils déposent à eux seuls un quart de la mise mondiale. Mais Macau, seule ville de Chine – avec Hong Kong – où il est légal de jouer de l’argent, vient de voler la vedette à Las Vegas. Les casinos de cette ancienne colonie portugaise ont enregistré un chiffre d’affaires de 304,14 millions de patacas (28,67 milliards d’euros) contre 267,87 milliards en 2011. Un rythme de croissance qui s’est à peine ralenti avec la crise.

Les dix nations qui misent le plus aux jeux d’argent

« Le jeu, dernier bastion de la démocratie économique »

Mais qu’est-ce qui pousse les centaines de millions de joueurs à ces dépenses irrationnelles – à part pour de très rares chanceux ? « Jouer permet de se réconforter, de se consoler pendant une période de souffrance. C’est une sorte de thérapie. Ainsi, ce qui compte, ce n’est pas tant de gagner que de participer », estime le sociologue Denis Muzet, président de l’Institut Médiascopie. Il relève que « dans une société à deux vitesses, divisée entre ceux qui travaillent durement et ceux qui vivent du capital, le hasard des jeux d’argent apparaît comme l’un des derniers bastions de la démocratie économique ».

Bastion bien gardé par les moins fortunés puisque, comme l’explique Jean-Pierre Martignoni, sociologue spécialiste des jeux, « plus on est pauvre, plus on joue ». Sa « théorie de la pauvreté », développée dans on livre Faites vos jeux (L’Harmattan, 2000) se traduit dans les faits.

Dans une expertise collective de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale de 2008 intitulée Jeux de hasard et d’argent. Contexte et addictions et dont nous avions déjà fait état (ici), il est précisé que « les habitués des casinos sont à 41% des inactifs sans emploi ou retraités. Les 6 millions de parieurs du PMU sont à 65% des hommes âgés de 35 à 49 ans issus de milieux socioprofessionnels généralement modestes. [...] Les joueurs de la Française des Jeux présentent à peu près les mêmes caractéristiques socioprofessionnelles que la population générale avec une légère surreprésentation des ouvriers et des employés. »

Dans une autre étude, menée en 2010 (soit avant l’ouverture du marché des jeux en ligne) et publiée l’année suivante par l’Inpes (Institut national de prévention et d’éducation à la santé) et l’OFDT (Observatoire français des drogues et des toxicomanies), la moitié des quelque 200 000 joueurs dits « excessifs » dépensent plus de 1 500 euros par an en jeux alors que 57,8% déclarent un revenu mensuel inférieur à 1 100 euros.

Le jeu dans la crise : un moment convivial...

Mais en cette période de crise, un jeu d’argent représente davantage que l’espoir fragile d’accéder à la richesse. Il est, pour certains, un moyen de préserver des relations sociales. « Le fait de pouvoir faire une grille à plusieurs ou en famille, et de jouer dans des points de vente physiques, où l’on boit un verre et on partage un moment à plusieurs, est très important », poursuit Denis Muzet.

Le jeu d’argent sur Internet a toutefois lui aussi de beaux jours devant lui. Le marché des jeux en ligne (paris sportifs, poker, casino et loteries) représente actuellement 11% du marché global des jeux d’argent de l’UE, avec 6,8 millions d’adeptes. « Avec un taux de croissance annuel proche de 15% et un chiffre d’affaires annuel attendu de 13 milliards d’euros en 2015, les jeux de hasard en ligne s’inscrivent parmi les activités de service enregistrant la plus forte expansion dans l’Union européenne », notait la Commission européenne en octobre dernier.

Vous n’avez plus d’argent ? La loterie vous le rendra !

Et ce sont les Etats qui vont se frotter les mains. Car plus les citoyens dépensent aux jeux – et particulièrement à ceux des loteries nationales –, plus les finances publiques en profitent. Prenons l’exemple de la Française des Jeux, possédée à 72% par l’Etat français. Elle a reversé à Bercy en 2012 3 milliards d’euros, soit un quart des mises des joueurs perçues. Une sorte d’impôt démocratique et volontaire, mais qui touche davantage les foyers modestes...

« Mais c’est pour la bonne cause ! », disent en substance les loteries nationales d’Europe, rassemblées en association. Dans un livre blanc « Pour une politique responsable et durable en matière de jeux d’argent dans l’intérêt de la société », paru en juillet 2012, elles expliquent apporter une véritable contribution au développement des sociétés européennes.

En 2011, elles ont, ensemble, reversé « plus de 25 milliards d’euros aux budgets des Etats et au financement de projets sportifs, culturels et sociaux, à la recherche et à d’autres causes d’intérêt général ». « Près de 70% du produit brut des jeux (total des mises moins les gains) généré par les membres d’European Lotteries ont été reversés à la société, soit en moyenne 46 euros par habitant. »

Car, au cas où on ne s’en serait pas aperçu, « les loteries publiques exploitent les jeux d’argent et de hasard dans l’intérêt public » et elles reversent « des montants si conséquents que les dons ou le mécénat ne sauraient les remplacer ». Alors continuons à dilapider notre argent aux jeux, surtout en temps de crise. Puisque, si on les croit, on est forcément gagnant... même très indirectement !

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- L’Etat, croupier des pauvres ?

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