Volontaire je suis.Volontaire je resterai.

J’ai toujours eu une propension incroyable à me persuader que les choses peuvent changer. Je me lève tôt, je passe ensommeillée devant la baie vitrée. Dans le jardin, l’herbe est gelée et se dégourdit les brins aux premiers rayons de l’aube. C’est à ce moment précis que les choses apparaissent possibles. Ce n’est rien d’autre qu’une impression tenace, je n’ai pas de preuve que le monde ira mieux. Mais j’y crois. Je ne peux pas savoir tout ce qui reste à raser, puis à reconstruire. Je ne peux même pas le mesurer. Mais j’y crois. Je suis seule face à ce que beaucoup considèrent déjà comme irrémédiablement perdu.

On m’accuse du crime d’utopie. Mais j’y crois. Je sais que la renaissance quotidienne de la pelouse de mon jardin n’influera que modérément sur la crise économique mondiale. Et que le timide soleil que je trouve rassurant ne réchauffe pas tout le monde. Mais j’y crois. Dieu n’existe pas. Mais j’ai la foi.

Je suis volontaire de cohésion sociale et de solidarité depuis bientôt neuf mois. Je fais partie d’une équipe de sept personnes âgées de 18 à 24 ans que je ne connaissais pas. Et que, pour la plupart, je n’aurais pas pu connaître en dehors de cet engagement. Nous ne nous ressemblons pas, nous sommes tellement différents que nous pourrions nous détester. Personne ne peut nous interdire l’incompréhension, la colère ou la haine. Seulement, nous devons travailler ensemble sur des projets communs. Pas les mêmes passés, les mêmes origines, pas les mêmes expériences, les mêmes motivations, ni les mêmes intolérances.

Mais notre objectif professionnel, sur chaque projet, est unique. C’était en soi notre seul ciment, le seul alibi qui pouvait, au tout début, légitimer notre appellation d’« équipe ». Nous avons travaillé dans plusieurs structures sociales ; les rencontres auprès de différents publics se sont succédé : personnes âgées, anciens SDF, bénéficiaires d’aide d’urgence,... et tous les acteurs des associations qui luttent à rééquilibrer un système global complètement irrationnel.

Neuf mois qui ressemblent à une petite vie : un dédale de dynamisme, de misère et d’enthousiasme dans tous les sens. Dans l’équipe, dans les projets, dans le monde associatif et dans ce que donne à voir le monde en général. Neuf mois dans l’oscillation permanente, entre confiance et désespérance. Mais avec la certitude de ne pas être seule.

Je sais maintenant. Je sais que rien ne sert de courir, et que rien ne sert non plus de partir à point, puisque la misère me survivra. Et qu’avec ou sans moi, elle sera toujours là. Je la prendrai en plein visage, chaque jour qui passe. Je reste quand même. Quitte à lever la couverture, autant se coucher dans le lit. Quitte à voir, autant regarder. Quitte à être en vie, autant exister.

J’y crois. C’est comme ça.
Volontaire je suis, volontaire je resterai.

29.06 à 00h48 - Répondre - Alerter