Février 2009, dans l’Etat de Victoria, Australie. Après trois jours de chaleur record à plus de 43°C, de violents feux de brousse se déclenchent, les pires que l’Etat ait jamais connu. Bilan : 173 morts et plus de 2000 maisons dévastées. « La tempête de feu est venue sans prévenir. (…) Certaines familles ont été tellement traumatisées qu’elles ne s’en remettront jamais complétement », témoigne Daryl Taylor, un survivant, dans un article de l’Institut du climat australien publié le 26 août dernier. Dans ce rapport intitulé « Un climat de souffrance : les coûts réels de l’inaction face au changement climatique », l’organisme de recherche s’inquiète des conséquences des événements météorologiques extrêmes sur la santé mentale des populations.
Certes, il est difficile d’établir un lien direct entre un phénomène météorologique exceptionnel et la poussée de fièvre de la planète. Cependant plusieurs études récentes montrent que la multiplication et l’augmentation de l’intensité de ces événements sont liés au changement climatique. L’énergie totale produite par les ouragans de l’Atlantique Nord et du Pacifique Ouest aurait augmenté de 70% depuis 30 ans selon une étude publiée en 2005 par la revue Nature rapporte le blog Eco(lo) du Monde.fr. Deux études parues en février 2011 ont également mis en lumière la responsabilité des émissions de gaz à effet de serre d’origine anthropique dans certaines inondations qui ont frappé la planète, comme l’expliquait le météorologue Serge Planton dans une chronique à Terra eco en avril dernier.
La climatopsychopathologie débarque à l’université
« Les conséquences économiques, les risques pour l’emploi, le logement ou les exportations ont légitimement reçu beaucoup d’intérêt, mais il y a un manque de débat sur les conséquences du changement climatique pour le bien-être et la santé humaine », regrette Tony McMicheal, professeur de santé publique à l’Australian National University et principal coordinateur de cette étude. En France, l’Institut de veille sanitaire (InVS) a notamment publié en avril 2010 un rapport sur les enjeux sanitaires du changement climatique. Mais si l’agence publique rattachée au ministère de la Santé dit « suivre de près ces sujets », aucun travaux n’a été effectué sur la santé mentale en particulier.
« Jusqu’à une date récente, on se préoccupait peu de l’impact des changements climatiques sur la santé », souligne Jean-Pierre Besancenot, ancien chercheur au CNRS, l’un des premiers et rares scientifiques à avoir consacré sa carrière aux effets du climat sur la santé. Outre-Atlantique, une chaire consacrée à la « climatopsychopathologie » sera lancée le 7 octobre prochain à l’Université de Montréal. « On y évoquera notamment l’importance de sensibiliser, éduquer, faire du transfert de connaissances pour apprendre à s’adapter aux changements climatiques », explique Véronique Lapaige, professeur agrégé au département de psychiatrie.
Une personne sur 5 traumatisée
L’Australie a été durement touchée par des événements météorologiques extrêmes ces dernières années, sécheresses ou inondations massives telles que celles qui ont touché le Queensland en janvier 2011. Selon cette étude, une personne sur cinq souffrira à long terme des effets du stress et d’angoisse liés à ces épisodes traumatiques. Les vagues de chaleur et de sécheresse conduiraient même à des taux de suicide plus élevés de 8%. La publication de ce rapport alarmiste intervient alors qu’on débat justement à Canberra de l’instauration d’une taxe carbone sur les plus gros pollueurs.
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