2 à 3,5°C de plus. C’est ce que prévoient, pour la fin du 21ème siècle, les experts du GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Et ce quels que soient les efforts de réduction des émissions de gaz à effets de serre qui seront déployés ! « On ne connaît pas l’ampleur avec certitude mais on sait que c’est inévitable », a renchéri mercredi 20 juillet, en conférence de presse, Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre de l’Écologie.
Face à cet avenir brûlant, l’Hexagone pourrait pourtant suer un peu moins que ses voisins avec son plan national d’adaptation au changement climatique présenté ce mercredi. Programmé de 2011 à 2015, celui-ci couvre aussi bien les domaines de l’agriculture que de la pêche, du tourisme, de la santé ou encore l’aménagement du territoire et les forêts. En 80 actions, quelques 230 mesures et 171 millions d’euros tout spécialement dédiés, auxquels s’ajouteront plusieurs autres centaines de millions d’euros via d’autres plans, les équipes du super ministère tentent de dessiner un autre futur. Prêts à embarquer ?
La tuyauterie réparée
Nous sommes en 2050 (1). Les précipitations se font rares. En moyenne, elles ont baissé de 10%, tout comme les écoulements des cours d’eau. Mais dans le sud-est de la France, le manque d’eau frôle le symptôme chronique. Au printemps et en été, on ne compte plus les jours sans pluie. Et les températures n’arrangent rien. En 2011, près de vingt jours par an dépassaient de 5°C la moyenne. Désormais, on en compte presque 40 !
Dans ces conditions, une ressource à choyer : l’eau. Jadis, l’Hexagone... était un panier percé. En 2011, son réseau de distribution d’eau potable laissait filer 25% du précieux liquide dans la nature. A ce train-là, l’industrie, l’agriculture et le réseau en eau potable auraient dû être assoiffés en 2050, manquant de quelques deux milliards de m3 par an ! Pour éviter un tel dénouement, le plan d’adaptation au changement climatique a sauvé 20% de l’eau prélevée dès 2020. La tuyauterie a été sondée, les fuites identifiées et les réseaux réparés. La France est aussi devenue une immense cuve à eau. Partout, les collectivités ont été chargées de récupérer l’eau de pluie. Et pour arroser vos fraisiers, les eaux usées ont été mises à contribution. Traitées, elles irriguent les espaces verts et les cultures. Dans ces champs, le maïs n’est d’ailleurs plus si courant : des plantes moins gourmandes en eau, comme le sorgho ou le soja, ont été implantées.
A la chasse aux moustiques
Comme les végétaux, d’autres se délectent des adoucissements climatiques : ce sont les micro-organismes et les moustiques. Ils grouillent dans nos écosystèmes, notamment aquatiques. Pas de bol pour l’homme : certains micro-organismes produisent des toxines nocives pour la santé. Une tasse lors d’une baignade maritime ou un plat de crustacé souillé, et c’est la contamination qui guette. Les moustiques, quant à eux, ont une particularité : fuyant les contrées trop étouffantes, ils ont migré vers le nord ou en altitude, amenant avec eux leurs parasites ou leurs virus. A la clé ? Des maladies, comme le chikungunya, la dengue ou le paludisme. Les plantes se défendent aussi très bien niveau invasion : leurs graines, emportées par les animaux migrateurs ou les avions, s’implantent désormais parfaitement sous nos latitudes et n’ont aucun mal à répandre leurs pollens allergisants. Ces envahisseurs n’agissent toutefois pas en toute impunité : depuis 2011, un groupe de veille santé-climat, créé au sein du Haut conseil de la santé publique, surveille l’évolution des ces potentiels fléaux sanitaires afin d’alerter les pouvoirs publics.
De nouvelles espèces à la rescousse des forêts
Nos forêts ont changé de tête. Gavées de CO2 et boostées par la douceur des températures, elles ont tout d’abord explosées, bourgeonnant à tout va. Mais l’emballement climatique a fini par les rattraper : les sols se sont asséchés, les feux de forêts se sont multipliés, même dans le nord de la France... Imaginez donc : avec un réchauffement de 2°C d’ici la fin du siècle, les écosystèmes forestiers auraient dû migrer de 360 km vers le nord, soit à une vitesse virtuelle de 10 cm par jour ! Mais pour conserver sa couverture d’arbres et sauver son industrie forestière, la France a fouillé dans ses banques génétiques. « On revisite toutes nos collections pour retrouver les espèces qui sont adaptées au changement climatiques », expliquait déjà en 2011 Jean-Marc Michel, directeur de la nature et des paysages au ministère de l’Écologie.
Les routes sauvées de la noyade
Rappelez-vous : en 2003, pendant la canicule, les trains avaient dû ralentir, certains rails ayant été déformés ! En cette année 2050, le décor est bien pire. L’augmentation des cycles de gel et de dégel en hiver fait craquer les routes. Les sécheresses plus fréquentes déforment les remblais, qui endommagent chaussées et voies ferrées. Avec une hausse du niveau des mers d’1 mètre, la perte patrimoniale de routes nationales aurait dû couter milliards d’euros ! Mais des actions visant à adapter les constructions aux climats régionaux et aux conditions extrêmes qui pourraient les affecter ont été menées. « On construit pour longtemps. On se préoccupe aujourd’hui, par exemple, du fait que les revêtements des routes restent valables dans des environnements plus chauds », expliquait déjà en 2011 la ministre de l’Ecologie.
Plein de bonnes intentions, ce plan trébuchera-t-il moins dans sa mise en oeuvre que les lois du Grenelle ? « La plupart des mesures ici ne sont pas législatives, mais réglementaires. Ce qui veut dire que nous sommes dans des modifications de normes dans un cadre existant. On peut les faire nous-mêmes. Et on va les faire nous-mêmes », a voulu rassuré la ministre. Rendez-vous pour le premier bilan de mi-parcours fin 2013.
(1) Prévisions basées sur le scénario A2 du GIEC
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