Mise à jour du 28 juin 2011 : Banques, hôpitaux, journaux... La Grèce s’est mise en grève générale pour 48 heures en prévision d’un vote sur le nouveau plan d’austérité qui doit être examiné mercredi et jeudi au Parlement. Celui-ci prévoit de nouveaux sacrifices pour les Grecs notamment en matière d’impôts |
Jacques le Cacheux est directeur du département des études à l’OFCE, le centre de recherche en économie de Sciences Po
Terra eco : Les pays européens et notamment l’Allemagne accusent la Grèce d’avoir bénéficié des largesses de l’Union pendant des années sans redresser son économie. Est-ce une réalité ?
Jacques Le Cacheux : C’est partiellement vrai. La Grèce a fait partie depuis le début des années 90 des « pays de la cohésion » avec le Portugal, l’Irlande et l’Espagne. Ce programme, conçu au moment de Maastricht, était destiné aux Etats dont le PIB était inférieur à 90% de la moyenne européenne. L’idée était de leur donner un petit coup de pouce pour faciliter leur rattrapage. Ces pays ont bénéficié de fonds structurels équivalent à 1,5% ou même à 3% de leur PIB pendant des années. Ces aides devaient servir à financer des infrastructures, la modernisation de l’économie...Mais les effets ont été très différents selon les pays. Certes la Grèce a renouvelé ses infrastructures en partie, notamment au moment de la préparation des Jeux Olympiques d’Athènes (en 2004, ndlr). Elle a rénové son aéroport, construit un métro... Mais seules l’Irlande et l’Espagne ont affiché de bonnes performances de croissance.
Pourquoi la Grèce n’a-t-elle pas réussi de la même manière ?
Pour toutes sortes de raisons. D’abord parce que les politiques menées ont été assez mal conçues. Et aussi à cause de certains problèmes spécifiques à la Grèce : fraude fiscale, corruption, mauvaise gouvernance, système public pléthorique... Par ailleurs, on sait bien qu’il y a eu, au départ, une falsification des comptes publics. En 2002, quand la Grèce est entrée dans l’euro, elle a procédé à des manipulations comptables pour satisfaire les critères de Maastricht qui exigeaient un déficit public inférieur à 3% du PIB. On s’est aperçu après coup de ces manipulations...Après coup ? Certaines voix affirment que la Grèce a bénéficié d’une certaine complaisance à l’époque...
Disons qu’Eurostat (chargée d’agréger les statistiques des pays de l’UE, ndlr) qui était censée vérifier les comptes des pays n’a pas été très scrupuleuse. Les agences de notation de la même manière n’ont pas été très regardantes. Il y a eu sans doute, oui, une sorte de complaisance vis-à-vis de la Grèce pendant des années. Même quand la dette publique du pays a dépassé 100% du PIB, les agences de notation n’ont émis aucune réserve.Et la situation ne s’est pas améliorée. Pendant la crise, il y a eu, en Grèce, des élections législatives. Durant la campagne, le gouvernement sortant a imaginé un méga-plan de relance pour acheter des électeurs. Il a ainsi fait exploser le déficit public sans le faire apparaître dans les comptes. Quand Geórgios Papandréou (Premier ministre depuis octobre 2009, ndlr) est arrivé au pouvoir, il a été confronté à une situation beaucoup plus dégradée que celle à laquelle il s’attendait. Or, dans une grande opération de vérité, le nouveau gouvernement a décidé de publier les vrais chiffres du budget. C’est là que tout s’est enclenché.
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