Ce n’est pas tout à fait une surprise. Mais il est toujours détestable de voir confirmées ses pires craintes. L’an dernier, les émissions mondiales de CO2 énergétiques ont bondi de 5 % par rapport à 2009, a révélé l’Agence internationale de l’énergie (AIE). Collectivement, nous avons rejeté 30,6 milliards de tonnes de CO2. De quoi augmenter de près de 4 ppm la concentration en dioxyde de carbone de l’atmosphère, laquelle s’élève désormais à 393 ppm. Or, les climatologues estiment qu’au-delà de 400 ppm, le système climatique peut s’emballer. Au rythme dicté par la sacro-sainte relance économique, nous y sommes dans... trois ans. Le tocsin sonné par l’AIE a-t-il été suivi d’effets ? Oui, mais pas de ceux que l’on pouvait espérer. En se privant de son énergie nucléaire et en accroissant son parc de centrales à gaz, l’Allemagne va alourdir son bilan carbone. Elle sera suivie par la Pologne qui se voit bien compléter son parc de production électrique (au charbon à 94 %) par des centrales consommant du... gaz de schiste. Sous la houlette de son gouverneur républicain et climato-sceptique, le New Jersey va quitter la RGGI, seul marché nord-américain de quotas de CO2. À l’autre bout du pays, la Californie se voit interdire d’ouvrir le sien par la justice. Pour ne pas obérer les chances de réélection de Barak Obama, l’administration américaine a renoncé à faire voter une loi sur le climat et à faire diminuer les émissions industrielles par sa puissante agence de protection de l’environnement. À Deauville, lors du sommet du G8-G20, le Japon, la Russie, les États-Unis et le Canada (28 % des émissions mondiales à eux quatre) ont réaffirmé leur opposition à toute prorogation du protocole de Kyoto. Nous voilà donc avec des émissions qui ne vont plus cesser de grimper et des gouvernements qui, pour plaire à une frange de leur électorat, font n’importe quoi. Le résultat de cette addition est simple. La limitation à 2 °C de la montée de la température n’est plus à notre portée. Mais nous pouvons encore choisir de la limiter à 3,5 °C. Ce sera cher, douloureux et nécessite un départ immédiat. Vous y croyez vraiment ?
Cet édito a initialement été publié dans la lettre mensuelle de l’Usine à GES.
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