Le monde a rendez-vous dans un peu moins d’un mois à Hong-Kong. C’est là que se tiendra le prochain sommet de l’OMC. Difficile de pronostiquer qui l’emportera. Une chose est certaine : du sommet, on risque fort de retomber au ras des pâquerettes.
Pour schématiser, nous avons d’un côté l’Union européenne et les Etats-Unis. De l’autre, les pays émergents emmenés par le Brésil de Lula. L’un des enjeux, c’est l’agriculture. Voici comment ça fonctionne : l’Europe subventionne les exportations de ses agriculteurs ; les Etats-Unis font la même chose. Conséquence : les produits européens et américains inondent le marché des pays du Sud. Lesquels peinent à placer leurs propres produits chez eux, en Europe ou aux Etats-Unis.
L’OMC est un ring de boxe
Exemple concret : le coton. Des tonnes de cette culture - subventionnée aux Etats-Unis et en Europe - alimentent le marché international. Comme ce dernier ne fait pas de cadeau et que l’offre est supérieure à la demande, le prix de la livre de coton se traîne depuis des années autour de 30 à 60 cents de dollar. C’est suffisant pour faire vivre le cultivateur américain (qui produit à grande échelle et touche les subventions). C’est trop peu pour le paysan du Burkina Faso, qui arrive à peine à joindre les deux bouts, alors que son « coton pluie », récolté à la main, est reconnu d’excellente qualité. Or au Burkina, 200000 paysans (sur)vivent du coton et 2 millions de personnes - 20% de la population - sont directement dépendantes de ce commerce pour leur survie.Alors, faut-il arrêter de subventionner les cultivateurs européens et américains, ce qui ne manquerait pas de les mettre en difficulté ? Ou faut-il laisser les producteurs de coton que sont le Burkina et le Mali, à leur sort peu enviable ? Pour des raisons sociales mais aussi électorales, ni la France ni les Etats-Unis n’iraient dire à leurs agriculteurs (ou à d’autres producteurs) qu’ils vont devoir renoncer à leur métier. Et cette non décision empêche bel et bien d’autres pays - souvent des pays pauvres - de se développer.
C’est un peu ce qui se joue à Hong-Kong : les pays riches sont-ils prêts à laisser une place à des pays moins développés ? Avancer dans cette direction supposerait - au moins à court terme - que les pays du nord souffrent un peu, pour que ceux du sud se développent enfin. Mais ne rêvons pas : nous préférons imposer aux pays du Sud d’ouvrir leurs marchés à nos grandes entreprises de services (Veolia et Suez pour l’eau, par exemple). Tout en traînant des pieds quand il s’agit de s’ouvrir aux produits des pays du sud. Dans ces conditions, l’OMC n’a rien d’une instance de régulation. Elle s’apparente plutôt à un ring de boxe sur lequel les « super-lourds » continuent de distribuer des uppercuts aux poids-plumes. Triste spectacle.
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