A force de fouiller dans les centaines de documents diplomatiques révélés par WikiLeaks, il était évident que la question climatique apparaîtrait. C’est le New York Times qui s’y est collé le premier, en relayant un article de Climate Wire. Et on apprend quelques trucs assez croustillants.
En novembre 2009, à quelques semaines de la conférence de Copenhague, un câble de l’ambassadeur américain à Paris relatait le scepticisme français vis-à-vis des propositions américaines, et notamment celle de réduire de 17% les émissions de gaz à effet de serre, mais calculées non pas par rapport à 1990 (année de référence pour le protocole de Kyoto), mais par rapport à 2005. Selon l’ambassadeur, les officiels français étaient partagés sur la réponse à apporter à cette maigre proposition. Borloo, alors ministre du toutim écologique, avait été critique, mais rapidement démenti par des huiles du ministère des Affaires étrangères, qui mettaient l’accent sur les efforts à obtenir de la Chine et l’Inde, sans doute pour éviter de fâcher Hillary Clinton. Face aux doutes français, Washington avait tenté d’expliquer que les lois américaines sont bien appliquées, notamment au travers de la loi sur l’air. Une manière de dire que la loi sur le climat n’était pas forcément nécessaire pour que les Etats-Unis évoluent sur le dossier climatique.
L’Allemagne avait aussi baissé la garde avant le sommet de Copenhague, selon les documents étudiés par Climate Wire. Alors que Clinton se rendait à Berlin pour commémorer le XXe anniversaire de la chute du Mur, l’ambassade américaine informait Washington de la volonté allemande d’un fort leadership américain à Copenhague, et d’un consensus occidental face aux pays émergents, Chine et Inde en tête. « L’Allemagne a commencé à évoquer le Sommet comme une étape dans un processus plus large – un cadre juridique contraignant – et semble préparer l’opinion publique à une issue moins ambitieuse », explique le document mentionné par le New York Times.
Mais le plus intéressant est sans doute ailleurs. Car Washington semble avoir lourdement pesé sur l’Arabie Saoudite, pour qu’elle cesse de faire de l’obstruction dans les négociations sur le climat. Apparemment, le pays tentait d’obtenir le droit de bénéficier du fonds d’adaptation – prévu pour les pays pauvres – parce que la montée des océans menace des puits de pétrole offshore…
« Vous avez la possibilité d’éviter un clash, avait écrit l’ambassadeur US à Hillary Clinton avant une visite dans le royaume pétrolier. Les officiels saoudiens sont inquiets parce qu’un traité sur le changement climatique pourrait réduire les revenus du pays (et les leurs ?, ndlr) au moment où ils doivent faire face à d’importantes dépenses pour diversifier leur économie. Le roi ne veut pas que l’Arabie Saoudite ait le méchant rôle, tout particulièrement sur les questions environnementales. » Un autre mémo précise que « les Etats-Unis ont pressé l’Arabie Saoudite pour qu’elle adresse un engagement formel aux Nations unies à accepter le Pacte climatique [de Copenhague]. »
Quelques mois avant le sommet, les diplomates américains avaient été sollicités pour évaluer la position des uns et des autres. Par exemple pour tenter de comprendre la perception qu’ont les autres pays de la position américaine dans les négociations environnementales. Mais aussi de vérifier si les pays respectent vraiment les politiques qu’ils ont mises en place, histoire d’avoir des arguments à opposer aux beaux parleurs.
Cet article a été à l’origine publié sur le blog de Denis Delbecq, Effets de Terre
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