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19-11-2010
Mots clés
Energies
France
Chronique

Pourquoi la France va succomber aux énergies renouvelables

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Pourquoi la France va succomber aux énergies renouvelables
(Crédit photo : Jean-Paul Gueutier)
 
L'Hexagone a beau faire de la résistance avec sa chère énergie nucléaire, c'est écrit : nous allons nous mettre à l'éolien et au solaire. Et les doutes d'aujourd'hui seront relégués au rang des fantasmes « anti-chemin de fer » du XIXe siècle.
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ÉCOLOGIE SOCIÉTÉ ÉCONOMIE
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Les énergies renouvelables connaissent un véritable boom en Europe et dans le reste du monde. La France reste à la traîne par rapport à de nombreux pays voisins. Le Grenelle de l’environnement n’a, à cet égard, pas eu l’effet multiplicateur espéré. On peut s’interroger sur les causes de cette lenteur de notre pays à prendre des voies qui sont, de toute évidence, celles de l’avenir. Le pétrole et l’uranium sont des ressources en voie de disparition. Comment développer les énergies renouvelables en France ? Quels obstacles faut-il dépasser ?

Le premier frein s’appelle le nucléaire. Son poids dans la production électrique, l’importance stratégiques des entreprises de ce secteur, le faible coût auprès du consommateur donne à l’électricité nucléaire une importance qui occulte le développement d’autres énergies. Mais l’obstacle principal se situe plutôt dans la mauvaise image des énergies renouvelables auprès des Français. Faisons un tour de table des représentations négatives sur ces énergies.

Le principal argument des détracteurs de ces énergies est le suivant : ces énergies, soumises à la météorologie, sont intermittentes. Elles ont donc besoin, en complément, de centrales à gaz qui vont compenser les creux de production dus à l’absence de soleil ou de vent. Les coûts et les dégagements de gaz carbonique sont importants.

Cet argumentaire ne résiste pas à l’analyse pour deux raisons : d’abord l’interconnexion des réseaux électriques européens rend ce problème facilement surmontable car les creux éventuels pourront être compensés par des régions en excédent. Le mistral méditerranéen, les passages de dépression sur l’Irlande ou sur le golfe de Gascogne se compléteront pour constituer une offre stable.

Ensuite, le développement de l’éolien et du solaire va se faire en parallèle au développement d’une offre de stockage électrique en plein essor. Deux exemples : la voiture électrique va constituer par l’intermédiaire de ses batteries un moyen de stockage ; l’installation de système hydraulique de pompage-turbinage va permettre de gérer les à-coups de production.

Le système de production et de distribution électrique sera complètement différent de celui que nous connaissons : il était centralisé, nous allons vers des réseaux décentralisés disposant d’outils de régulation démultipliés autour des « smart grids », les réseaux de distribution électrique « intelligents ». Le problème de l’intermittence sera donc résolu.

A ce propos, un autre argument est utilisé : le pompage-turbinage ne pourra pas se développer car le potentiel hydroélectrique a déjà été épuisé, tous les sites étant équipés. Cet argument provient d’une vision fausse du pompage-turbinage que l’on imagine comme un décalque de barrages qui utilise l’eau accumulée pendant une saison entière. Un bassin de stockage pour le pompage-turbinage n’a besoin que d’un potentiel de quelques jours. Ce qui autorise la mise en place de ce système dans de nombreux sites.   Une autre catégorie d’arguments provient du manque de puissance de ces outils censés ne pouvoir répondre à la demande. On insiste aussi sur le coût de revient des équipements éoliens ou solaires rendant le prix du kilowatt bien plus élevé que pour le nucléaire. Prétendre que le renouvelable coûte cher et produit peu relève d’une vision à courte vue, qui oublie les formidables progrès technologiques en cours.

Avec ce type de raisonnement, on a pu, à la fin du XIXe siècle, condamner l’automobile chère, bruyante et lente face au train à vapeur beaucoup plus rapide et confortable à l’époque. De toute évidence pourtant, l’électricité produite avec du gaz et de l’uranium va coûter de plus en plus cher (sans compter le retraitement des déchets ou la pollution généralement sous-estimés) alors que le développement des énergies renouvelables va faire baisser leurs coûts. Le développement prévisible des productions électriques par biomasse ou énergies marines va venir compléter l’offre. Le petit éolien et le solaire vont accroître le nombre de producteurs-consommateurs, accélérant le phénomène.

Enfin, les arguments autour de la comparaison du coût de revient du kilowatt oublient un facteur crucial : les centrales nucléaires ou au gaz fonctionnent avec très peu de personnel, le kilowatt produit avec du renouvelable intègre, au contraire, une proportion de coûts salariaux plus important. La maintenance des éoliennes, l’installation de panneaux solaires, des systèmes électriques décentralisés demandent des moyens humains. Cela contribue à développer l’emploi bien davantage que de grandes centrales.

Enfin, une dernière catégorie d’arguments concerne la destruction des paysages et des biotopes. C’est autour de ceux-ci que se concentrent le mouvement anti-éolien particulièrement puissant en France. Si on peut entendre leurs explications, on peut n’être qu’étonné par leur virulence si on la compare à la faible résistance qu’on rencontré l’installation d’autres équipements ou aménagements bien plus destructeurs.

Le développement de zones commerciales – « la France moche » – n’a pas entraîné de mobilisation. L’installation de plus de 100 000 poteaux de lignes à haute tension, laids et destructeurs pour les oiseaux n’a pas rencontré d’opposition. Les dégâts qu’occasionneraient les éoliennes aux oiseaux et chauves-souris sont-ils de même ampleur que la destruction des bocages et haies ? On aurait aimé que les résistants anti-éolien se mobilisent avec autant de vigueur pour ces causes aussi honorables.

Une autre représentation courante concerne le bruit des éoliennes. Il faut relativiser cette nuisance, d’autant plus que celle-ci est surtout due aux mouvements de la nacelle dans les rafales et sauts de vent. Elle est souvent à peine supérieure à celle du vent. Elle est plus faible pour les éoliennes à axe verticale.   En conclusion, on a oublié le scepticisme qu’ont rencontré en leur temps d’autres progrès technologiques : dans les années 1850, les premiers « chevaux de fer » étaient bruyants et sales, les gazettes raillaient sur cet instrument perçu comme bien inférieur aux bonnes vieilles diligences. Nos descendants percevront sans doute de la même façon les résistances inutiles de nos contemporains.

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Principal de collège, agrégé d’histoire-géographie, j’ai été, dans une autre vie, technicien forestier à l’Office national des forêts et j’ai travaillé en Afrique sahélienne.

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  • Cet article présente une démarche théorique intéressante, mais qui semble très difficile à mettre en oeuvre en pratique.
    Par exemple, si on suppose

    - que la production d’origine nucléaire peut être entièrement substituée par de la production éolienne et que cette production ,

    - que la production éolienne est prévisible malgré son intermittence et qu’elle couvre les mêmes besoins sur l’année en terme de fonctionnement (une centrale nucléaire peut fonctionner en théorie à pleine puissance de 80 à 90% du temps, un éolienne de 20 à 30% du temps)

    voici ce que donne l’analyse des données fournies par Eurostat (l’agence Européenne de statistiques) au niveau de l’Union Européenne :
    Production d’origine nucléaire en 2007 : 935 277 GWh
    Capacité nucléaire installée en 2007 : 132 829 MW
    soit un temps d’utilisation de chaque centrale de l’ordre de 7000 h par an
    (source : Energy, transport and environment indicators (Code produit : KS-DK-09-001 , http://epp.eurostat.ec.europa.eu/po...)

    Hors une éolienne fonctionne beaucoup moins longtemps qu’une centrale nucléaire, de l’ordre de 2000 h par an contre 7000h/an pour le nucléaire (source : Panorama of Energy (Code produit : KS-GH-09-001, http://epp.eurostat.ec.europa.eu/po...)

    Pour remplacer 1 MW de capacité nucléaire (qui produit 7 000 MWh d’électricité par an), il faut donc 3,5 MW de capacité éolienne.
    Résultat ; pour remplacer les 133 GW de capacité nucléaire il faut donc de l’ordre de 465 GW,ce qui représente plus de 6 fois la capacité installée éolienne à fin 2009.

    LA tâche est donc immense quand on sait qu’une éolienne de grande puissance a une capacité de l’ordre de 10 MW....

    De même si on suppose que les interconnexions permettent d’importer de l’électricité d’une région à l’autre de l’Europe en cas d’absence de vent). Par exemple si on suppose qu’on doit importer de la mer Baltique l’intégralité de la capacité de production nucléaire française, soit 63 GW, il va être nécessaire de construire de nombreuses lignes à Haute Tension (en 2003 l’interconnexion entre France et Allemagne etait de 6GW...)

    Enfin sur l’utilisation des batteries peut poser un problème de ressource en métaux rares ...

    La solution ne semble pas aussi simple et doit à mon avis être combiné à des mesures d’efficacité énergétique (isolation massive des logements, norme strictes sur la consommation des appareils électriques, ...)

    21.11 à 14h23 - Répondre - Alerter
    • Rodrigue Coutouly : Ne pas simplifier

      Merci pour vos remarques,

      il ne s’agit pas pour moi de dire que l’éolien serait plus performant que le nucléaire. L’équation est beaucoup plus complexe, le mix énergétique de l’avenir aura de multiples composantes et aucune solution n’est LA solution, ni le nucléaire, ni l’éolien.

      L’objectif de cet article était essentiellement de pointer tous les freins mentaux, les représentations, les arguments qui empêchent les français de passer à autre chose que le nucléaire. Sachant que le nucléaire restera indispensable pendant de nombreuses années, le temps de construire une offre alternative.

      Je suis parfaitement d’accord cependant avec la nécessité de travailler les économies d’énergies, plus efficaces et moins coûteuses que les infrastructures de productions énergétiques. L’un ne va pas sans l’autre.

      Pour d’autres articles sur ce problème, rendez-vous sur mon blog : http://www.fiscalite-environnementa...

      22.11 à 18h09 - Répondre - Alerter
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