« Où puis-je trouver de la viande bio halal à Lyon svp car cela me fait du mal de manger de la viande halal dopée aux antibiotiques ? », demande Amairia sur un forum Internet. « Cherche viande halal et bio en région parisienne », demande un autre internaute. A l’heure où débute le ramadan, les chiffres défilent, étourdissants. 5 millions de musulmans en France dont 70% affirment respecter le jeûne. Des musulmans pratiquants qui mangent souvent halal. Tant que le marché s’élèverait à 5,5 milliards d’euros en France, dont 4,5 milliards glissés dans le panier de la ménagère et 1 milliard dépensé dans les restaurants, détaille l’institut d’études Solis.
Selon les chiffres de Solis, le halal pèserait donc près de deux fois le marché bio estimé à 3 milliards d ’euros. Pour Florence Bergeaud-Blackler, sociologue et coauteure de Comprendre le halal, « si on prend les chiffres de la consommation, on peut estimer que le halal a un potentiel quatre fois supérieur au bio ». Mais y a-t-il des interférences ? En clair, y a-t-il des produits bio et halal ? Sur Internet en tout cas, la denrée est rare. Il y a bien des petits pots pour bébé produits par Malaika ou des cosmétiques vendus par Cosmelal. Mais c’est à peu près tout. « Le marché du bio halal est encore très largement virtuel, d’abord pour des raisons de finance, estime la sociologue. Il y a peu de musulmans qui peuvent s’offrir le coût d’une certification halal et bio. Tous ces produits sont un peu plus chers et mal connus de la population musulmane. »
Des pratiques qui se rejoignent
« C’est une niche pour le moment », opine Baker Aldilaimi, fondateur du groupe Baker qui regroupe une marque de viande et un supermarché halal. Chez lui, on ne propose pas de produits bio. « Mais dans les prochaines années, ça va sans doute se développer. Il y a vingt ans, le halal était plus cher, aujourd’hui c’est presque meilleur marché que la viande traditionnelle. Le bio risque de se démocratiser dans sept, huit ans. Et alors, nous nous y mettrons sûrement. »
Après tout, il n’y a pas d’opposition de principe entre les deux labels. Mieux, pour l’industrie carnée, les pratiques semblent se rejoindre. « Le prophète nous a enseigné comment abattre les animaux, explique Baker Aldilaimi. On ne doit pas les maltraiter. Tout doit être fait dans le respect. » On n’est pas loin des préconisations du bio : « L’agriculture biologique garantit une qualité attachée à un mode de production respectueux de l’environnement et du bien-être animal », souligne par exemple le site de l’Agence bio.
Etourdissement
Pas si simple cependant, estime Florence Bergeaud-Blackler. Car la loi prévoit une dérogation à l’étourdissement en cas d’abattage religieux. En clair, elle autorise les industriels à abattre sans étourdissement les animaux saignés en mode rituel. Une dérogation « largement utilisée » par les abattoirs musulmans, d’après la sociologue. « Les vétérinaires estiment que les animaux souffrent plus de cette manière. Les certificateurs bio risquent de ne pas vouloir certifier des carcasses halal d’animaux non étourdis, car ils peuvent estimer que leur clientèle sensible à l’argument écologique l’est aussi au bien-être animal », pronostique-t-elle.
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