Fin juin. Un prix Nobel et un ex-président brésilien signent la déclaration de Vienne aux côtés de nombreux scientifiques et rappellent un chiffre choquant : « En dehors de l’Afrique sub-saharienne, l’utilisation de drogues injectables cause environ le tiers des nouveaux cas d’infection par le VIH. Dans certaines régions où le VIH se répand le plus rapidement, par exemple l’Europe de l’Est et l’Asie centrale, la prévalence du VIH peut atteindre 70% parmi les utilisateurs de drogues injectables ». Une situation que les pays d’Europe occidentale ont « connu dans les années 90, rappelle Fabrice Olivet, directeur d’Asud (Association d’usagers de drogues), avant la mise en place des politiques de réduction des risques », qui a permis de réduire sensiblement le nombre des toxicomanes infectés. Mais comment fonctionnent ces programmes ? Exemple avec un pays pionnier : la Suisse.
Que fait la Suisse ?
Elle distribue des seringues stériles :
Un toxicomane suisse à la recherche d’une seringue propre a plusieurs options. Il peut pousser la porte d’une pharmacie ou bien, s’il est plus vulnérable, opter pour un centre dit « à bas seuil ». Depuis leur création en 1986, ces centres accueillent les drogués sans rendez-vous et sans prêcher l’abstinence. Là, un guichet permet au toxico d’échanger sa seringue pour une nouvelle, de prendre un repas et une douche. En 1996, près de 532 000 seringues étaient ainsi distribuées mensuellement en Suisse dont 122 000 par les pharmacies, 320 000 par les centres « à bas seuil », rapporte l’Agence de la santé publique canadienne qui a mené une étude comparative internationale. Pionnière, la Suisse a fait des émules. Aujourd’hui, tous les pays européens disposent de ces programmes d’échanges de seringues.
Elle met des salles d’injection à disposition des usagers :
A l’arrière d’un centre d’accueil, le toxicomane trouvera quelquefois une salle d’injection. Là, « les personnes toxico-dépendantes peuvent consommer (par injection et pas inhalation) la drogue qu’elles ont apportée, sous surveillance et dans de bonnes conditions », souligne l’Office fédéral de la santé publique suisse. Mais ces pièces sont loin d’être légion : elles sont au nombre de douze en Suisse.
Elle autorise la prescription médicale d’héroïne :
Depuis 1999, les patients sont autorisés à venir dans un centre s’injecter une dose d’opiacée, sous surveillance médicale. Mais pour ces programmes, le ticket d’entrée est strict : il faut être majeur, toxicomane depuis au moins deux ans, avoir suivi et interrompu au moins deux autres traitements, avoir des problèmes de santé, et faire une déclaration écrite de consentement. Aujourd’hui 1 200 personnes en bénéficient dans 23 centres à travers le pays. « Ces programmes sont réservés à des gens qui n’ont pas la possibilité d’abandonner leur addiction, précise Fabrice Olivet d’Asud.
Elle aide les prisonniers toxicos :
Deux des 23 centres qui dispensent de l’héroïne se trouvent en prison. Ailleurs, deux centrales d’incarcération ont expérimenté, il y a quelques années, les distributeurs automatiques de seringues. Et en France ? Pas question. « Parce que ça supposerait de reconnaître que la drogue circule en milieu carcéral. Ça embêterait l’administration », souligne Fabrice Olivet.
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